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[Bagnolet] Programme de juillet-août 2013 au Rémouleur
Publié dans Aménagement du territoire - Urbanisme
Marqué avec Bagnolet, Le Rémouleur
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[Bas les pattes sur Fouad !] « Si c’était à refaire, je le referais »
Le militant CNT rattrapé par une ardoise de 39’534 €
La SNCF réclame au Messin Fouad Harjane le règlement du préjudice subi par le blocage du trafic ferroviaire en gare de Metz, lors des manifs anti-CPE en mars 2006.
Voilà un anniversaire que Fouad Harjane, 33 ans, n’est pas près d’oublier. Les faits remontent à mars 2006. Étudiant et militant de la CNT (Confédération nationale du travail) depuis 1997 – il a adhéré au syndicat anarchiste lors de ses années lycée, à Schuman – le Messin occupe alors l’avant-scène de la révolte contre le CPE (Contrat première embauche). La réforme chiraquienne jette une partie de la jeunesse dans les rues, donnant au printemps des faux airs de 68. Au terme d’une « journée nationale d’action », le 30 mars 2006, jour de son 26e anniversaire, Fouad Harjane se retrouve en garde à vue dans les locaux de l’hôtel de police de Metz. Il vient d’être interpellé, seul et sans violence, pour avoir participé à l’occupation de la gare de Metz. En compagnie de 800 manifestants, le jeune homme a bloqué le trafic ferroviaire durant une bonne heure. « Les usagers ont applaudi sur notre passage, lorsque nous avons quitté les lieux », se remémore-t-il, encore surpris d’un enthousiasme aussi inhabituel en pareille circonstance. « Mais beaucoup voyaient en nous les porte-parole de leurs propres enfants », justifie-t-il, avec la certitude rétrospective d’être ainsi parvenu, à force d’actions de ce type, à arracher le retrait du projet de loi. Un fait d’armes qui a, selon lui, contribué à installer la CNT dans le paysage syndical, tout particulièrement en Moselle. Avec, depuis, l’ouverture d’une vitrine place des Charrons à Metz.
« Même pas peur »
Héritière de l’anarcho-syndicalisme, née en 1946, la confédération revendique « le communisme-libertaire comme projet de société », avec pour moteur « la lutte contre le fascisme ». Harjane en assume les fonctions de secrétaire confédéral aux relations avec les médias. De là à se sentir dans la peau de l’homme à abattre… S’il ne l’exprime pas ainsi, Fouad Harjane reste persuadé que l’acharnement de la SNCF à son encontre masque mal la volonté de l’État « de casser l’élan du mouvement social », à la veille de réformes particulièrement sensibles, à l’instar de celle sur les retraites. « Hollande sait bien que la contestation viendra de notre côté, pas de la droite », assure-t-il.
Il ne paiera pas
Toujours est-il que depuis ce 30 mars 2006 où l’intéressé écope d’une citation à comparaître au tribunal, les nuages n’ont cessé de s’accumuler. Quelques jours après sa première garde à vue, rebelote ! Cette fois, il est maintenu 23 heures au poste, à la suite d’une manif, le 3 avril 2006, devant les locaux du Medef, pour laquelle il dément toute implication. Aucune charge ne sera finalement retenue contre lui. Mais il comparaît en septembre 2006 devant le tribunal correctionnel avec sept autres prévenus impliqués dans ce dossier. Tous sont condamnés à 150 € d’amende. Lui seul est condamné pour le blocage des voies ferrées. Au terme des appels successifs de son avocat Ralph Blindauer, le jugement pénal définitif tombe… en janvier 2012 : 300 € d’amende et 800 € de frais de justice. Surtout, la décision ouvre la porte à la procédure civile. La SNCF présente alors l’ardoise. À savoir 5729 minutes perdues, sur la base du nombre de circulations de trains impactées. Le préjudice est calculé selon un barème du coût horaire établi à 414,06 € pour les retards et suppressions de trains. En date du 22 mars 2013, la chambre civile réclame à Fouad Harjane 39’534.45 €, au titre des dommages et intérêts, et 800 € de frais de procédure. Lequel a interjeté appel. L’affaire pourrait voguer jusqu’en Cour de cassation, mais l’intéressé a déjà une certitude : il ne paiera pas. « Et si c’était à refaire, je le referais », promet-il sans se démonter. « Même pas peur ».
Leur presse (Xavier Brouet, Republicain-Lorrain.fr, 3 juillet 2013)
Publié dans Activités de la CNT
Marqué avec antirep, Fouad Harjane, Metz, Ralph Blindauer
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[Grenoble] Juillet-août à la BAF
Publié dans Aménagement du territoire - Urbanisme
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[Révolution égyptienne] Vers un long vendredi (5 juillet)
[Égypte, 5 juillet, 17h30] Vers un long vendredi
Après la destitution de Morsi par l’armée, celle-ci a destitué le procureur général, arrêter un certain nombre des dirigeants des Frères Musulmans, lancé 300 mandats d’arrêts contre leurs cadres et bloqué trois de leurs télévisions (en plus, Al Jazeera dont le directeur a été arrêté momentanément, ne marche plus vraiment, il n’y a plus de son et les images sont figées), dissout le Sénat (élu pour 2/3 qu’avec une participation électorale de 7%, c’est dire leur légitimité démocratique, et 1/3 nommé) qui assurait le pouvoir législatif, annulé la constitution islamiste, les anti Morsi sont rentrés chez eux, sauf un petit nombre qui est resté place Tahrir.
Par contre les Frères Musulmans et leurs alliés appellent aujourd’hui, à un vendredi de manifestations contre ce qu’ils nomment le coup d’État militaire qui a renversé un président légitime. L’armée a autorisé la manifestation mais l’a assorti d’un certain nombre de restrictions dont tout le monde sent bien qu’elles ne visent pas que les Frères Musulmans mais bien tout le monde, en particulier le monde du travail. Qu’on en juge, entre autres : interdiction du blocage des routes, de s’en prendre à des bâtiments officiels, interdiction de tout ce qui peut menacer la paix sociale, la sécurité et l’économie…
Pendant que les dirigeants des Frères Musulmans appellent à une manifestation pacifique, tout le monde sait qu’il n’en sera rien étant donné le désarroi actuel de la confrérie, de ses dirigeant et cadres comme de ses troupes, leurs choix de résistance par tous les moyens devant le raz de marée populaire qui voulaient dégager Morsi, comme face au coup d’État militaire, leur crainte de tout perdre et enfin leurs habitudes de violence dont celles de leurs alliés islamistes les plus radicaux. Bien des cadres ou simples militants ne se gênent d’ailleurs pas pour appeler clairement dans les médias à la vengeance violente, au terrorisme pas seulement contre l’armée mais voire au massacre de tous ceux qui voudraient s’opposer à eux.
D’un autre côté, la politique des militaires, qui contrôlent directement ou pèse indirectement sur bien des médias est aussi de présenter les Frères Musulmans comme des « violents » pour justifier sa politique répressive et la mise en place d’un éventuel état d’urgence qu’elle pourrait imposer à tous, et pas qu’aux Frères Musulmans, au nom de la sécurité, de la protection de la paix, contre le chaos, etc… Il est difficile donc de se rendre compte de ce qui peut être propagande ou réalité dans ce domaine, à un moment où la presse est particulièrement clivée.
Déjà, ce matin les alliés les plus radicaux des Frères Musulmans ont attaqué « pacifiquement » à la roquette et au fusil mitrailleur un poste de police à Rafah et ont tué « pacifiquement » un militaire dans le Sinaï. Ce qui a permis à l’armée de décréter l’État d’urgence dans le Sud Sinaï et à Suez qui pourra servir demain contre les grèves et les protestation sociales en tous genres. Toutefois, pour le moment, mais ça peut changer à tout instant, l’armée semble vouloir toujours caresser dans le sens du poil les anti Morsi. Il y a eu ce matin au Caire, des survols de la ville par des hélicoptères militaires portant le drapeau national et des avions aux panaches de fumée des mêmes couleurs, comme un clin d’œil au rappel des journées qui ont précédé la chute de Morsi où s’était forgé une alliance du peuple et de l’armée. Peut-être fait-elle cela parce qu’elle ne se sent pas très sûre de ses troupes y compris ses officiers qui sont nombreux à appartenir aux Frères Musulmans, peut-être aussi parce qu’elle espère faire descendre dans les rues les anti Morsi pour se protéger, ou qu’elle prend des mesures pour eux, peut-être encore parce qu’elle espère d’un affrontement éventuel entre anti et pro Morsi
qu’elle puisse intervenir alors en argumentant qu’elle veut éviter le chaos et le bain de sang. Peut-être enfin pour s’adresser aux puissances occidentales sa légitimité nationale et donc démocratique. Ou les quatre en même temps.
Pour le moment les manifestations Pro Morsi rassemblent beaucoup de monde. Infiniment moins que les manifestations anti Morsi des jours précédents, mais beaucoup de monde toutefois. C’est difficile à savoir pour le moment car les Frères Musulmans gonflent considérablement les chiffres et leurs adversaires les minorent énormément, mais certainement des centaines de milliers dans le pays. Pas des millions.
De plus, au niveau des impressions du moment, c’est que malgré le monde (mais les Frères Musulmans revendiquent 2 millions de membres) on a le sentiment qu’on assiste à un affrontement entre deux appareils plus qu’à l’affrontement d’un peuple qui se soulève contre des institutions. Il ne s’agit pas tant là d’un peuple qui se soulèverait pour défendre la légitimité du bulletin de vote, ou celle de l’islam, même s’il doit y en avoir bien sûr, mais plutôt des partisans, nombreux certes, qui défendent seulement le pouvoir perdu d’un appareil, celui des Frères Musulmans et de ses alliés. Exactement comme ce qui était reproché à Morsi de ne gouverner que pour son camp, pas tout le peuple, les manifestants ne s’adressent pas au peuple égyptien pour le convaincre de descendre dans la rue, mais mènent une bagarre interne, entre eux et l’armée. On voit ici ou là quelques tentatives timides des manifestants de s’adresser à la population, ainsi il y a eu des services d’ordre de Frères pour protéger des églises lorsque les manifestants passaient devant, des femmes en cheveux libres exposées largement pour montrer leur souci des autres et une ou deux déclarations s’adressant à leurs frères coptes. Mais on a l’impression que c’est pour le communiqué et justifier le soutien des puissances occidentales. Globalement, on voit bien que ce n’est pas leur souci réel.
Bien évidemment ces manifestations ont très vite dégénéré dans la violence. À l’heure où j’écris on parle déjà de 4 à 7 morts pour le Caire et de centaines de blessés. Les informations sont confuses, les uns accusant les autres, la police militaire aurait riposté par endroit à balles réelles, bien qu’elle prétende ne l’avoir pas fait, seulement tiré en l’air, n’utilisant que des gaz lacrymogènes. Mais comme l’armée et les frères Musulmans mentent autant les uns que les autres… Les violences ont eu lieu en particulier vers le bâtiment de la garde présidentielle, où la rumeur dit que Morsi serait retenu, et que la foule voudrait libérer. Il y aurait également des affrontements à Alexandrie, Suez, Damanhour, Zagazig, Assiut et surtout à Luxor où suite à la mort d’un Frère Musulman tué par la police, ces derniers ont brûlé 23 maisons de coptes.
Quoi qu’il en soit, l’impression qui ressort actuellement de la situation, c’est que si le coup d’État d’avant hier, ne pesait que parce qu’il s’inscrivait dans une énorme révolution populaire, aujourd’hui et pour le moment, car tout est en pleine évolution, il prend la forme au travers de l’affrontement de l’armée et des Frères Musulmans, sans la présence réelle du peuple, la forme d’un coup d’État militaire classique, s’imposant à tous par la force, restreignant toutes les libertés. Par exemple, des rumeurs disent que l’armée pourrait mettre en place un couvre feu qui s’imposerait à tous pour ce soir. En fait l’action des Frères Musulmans est en train de renforcer le poids de l’armée dans la situation, le pays, les institutions.
Ceci dit l’armée n’est pas sortie d’affaire et loin de pouvoir imposer sa loi, étant donné l’immensité de la mobilisation anti Morsi qu’on a vu les 4 jours précédents et peut-être ne fait-elle que s’affaiblir chaque jour un peu plus. Y compris en s’affrontant aux Frères Musulmans.
Vers 15h, le FSN a appelé également ses partisans à descendre dans la rue pour défendre la révolution qui serait en danger. Et on a vu effectivement des gens commencer à y descendre pour aller s’en prendre aux pro Morsi. Iront-ils nombreux ou pas ? Peut-être pas ayant le sentiment d’avoir gagné et guère l’envie non plus de se ranger aux côtés de l’armée qui restreint les libertés. On verra. Il y aurait eu pour le moment que les habitants de la rue Moharram Bek à Alexandrie qui seraient descendus dans la rue pour attaquer une manifestation de pro Morsi et l’auraient dispersé. Un cas isolé ou une situation qui va se développer ?
À l’étranger, l’Union Africaine a dénoncé le coup d’État, en défense de la démocratie, ce qui a fait pas mal rire quand on pense qu’au moins la moité d’entre eux sont arrivés au pouvoir par un coup d’État. La TV turque s’est mise au service des Frères Musulmans et transmet les images des manifestations pro Morsi pendant que l’AKP et le gouvernement turc qui ont dénoncé le coup d’État organisent des manifestations de soutien aux Frères Musulmans égyptiens. Quant aux régimes occidentaux ou François Hollande qui s’inquiète de l’interruption du processus démocratique en Égypte, bien des Égyptiens attendent d’eux qu’avant de se faire les juges de la vertu démocratique, ils renoncent à être les amis du Qatar, de l’Arabie Saoudite, du Bahrain, des émirats et de tellement d’autres dont on connaît les grands vertus démocratiques. Par contre ce soutien occidental a des effets désastreux parce qu’il légitime aux yeux de certains islamistes radicaux leur combat actuel. Et c’est aussi en regardant l’occident que les Frères Musulmans poussent leurs troupes dans la rue. Comme disent certains, c’est par ce soutien, que les islamistes continueront à battre les femmes, assassiner les coptes et brûler leurs églises, tuer toutes les libertés.
Jacques Chastaing
Publié dans L'insurrection égyptienne et ses suites
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[Égypte] Le poids économique de l’armée
Le poids économique de l’armée égyptienne
L’armée a destitué le président élu Mohamed Morsi, issu des Frères musulmans. Elle est, depuis le renversement de Farouk Ier en 1952, un acteur clé de la vie politique égyptienne. Mais elle joue aussi un rôle prépondérant dans la vie économique du pays. Quel est son poids, dans quels secteurs est-elle active ? Quels sont les problèmes que cela soulève ? Son implication économique a-t-elle eu une influence sur le renversement de Morsi ? Autant de questions auxquelles a bien voulu répondre Akram Belkaïd. Il est journaliste et auteur notamment d’Être arabe aujourd’hui paru chez Carnets Nord en 2011. Une interview menée pour ARTE Journal par Manuel Dantas.
ARTE Journal : Quel est le poids actuel de l’armée égyptienne dans l’économie du pays et dans quels secteurs est-elle impliquée ?
Akram Belkaïd : L’armée pèse entre 25% et 30% du PIB. Alors cela représente beaucoup de chose, ce sont des avoirs et des activités économiques très hétéroclites. L’armée est présente dans plusieurs activités. Cela va de l’activité agroalimentaire, la boulangerie industrielle à l’hôtellerie mais c’est aussi un embryon d’industrie de défense, de l’armement. C’est un véritable acteur économique qui crée de la richesse, qui consomme des ressources, qui paie des salaires et donc c’est une dimension qu’on a tendance à oublier quand on établie des analyses sur l’Égypte. L’armée n’est pas qu’un acteur politique, c’est également un acteur économique.
Comment fonctionne ce système, comment l’armée est-t-elle parvenue à diriger tout un pan de l’économie ?
Il faut bien savoir que l’armée est indissociable de la construction de l’Égypte moderne. C’est-à-dire à une période qui remonte au début du XXe siècle, c’est-à-dire que la modernisation de l’Égypte s’est faite aussi par le développement d’une armée professionnelle moderne, modernisée au fil des années.et donc depuis le début des années 1950, depuis le coup d’état de Nasser, l’armée par son budget a acquis des activités qui étaient d’abord destinées à son propre fonctionnement et qui peu à peu se sont étendues à la sphère nationale. Ça vaut par exemple pour les industries agroalimentaires ou même certains investissements réalisés par l’armée, via ses caisses, via ses œuvres sociales, via son budget dans le domaine du tourisme par exemple. Ce qui fait qu’on a une activité économique multiforme, soit qui est des investissements directs, soit qui est un financement par le biais du budget de l’armée, soit qui est une ligne budgétaire supplémentaire en terme d’activité. Faire tourner une usine par exemple ou recruter des gens pour faire fonctionner une boulangerie industrielle. Ce qui donne à l’armée une palette économique assez large et variée.
Un certain nombre de généraux à la retraite sont à la tête de ces sociétés qui semblent aussi être gangrénées par une certaine forme de corruption, confirmez-vous cette situation ?
Ce n’est pas vraiment de la corruption, c’est plutôt du clientélisme parce que ce sont des activités de l’armée, cela permet à certains dirigeants, à certains officiers supérieurs ou même à des officiers intermédiaires de trouver un point de chute au moment où ils vont prendre leur retraite. C’est une garantie d’emploi après la retraite qui peut intervenir de manière rapide parce que certains militaires sont retraités après la cinquantaine. Au bout de 25 ans de service, ils peuvent réclamer leur droit à la retraite, donc ça leur permet d’entamer une nouvelle vie professionnelle dans ces secteurs là sans avoir à démarcher les secteurs civils. Donc c’est plutôt une manière de garantir à ses propres hommes, ses propres troupes, en tous cas à ses officiers, la perspective d’une reconversion facilitée ce qui n’est pas le cas dans d’autres secteurs, bien entendu. C’est une manière aussi d’entretenir un quant-à-soi social aussi puisque l’armée dispose de facilités, de gymnases, de clubs sportifs, de restaurants, d’endroits de convivialité destinés à son propre personnel et à ses retraités qui font que l’ordinaire, le quotidien d’un officier supérieur ou d’un officier égyptien est tout de même meilleur que celui d’un cadre ou d’un haut-fonctionnaire dans le public ou dans l’appareil d’État égyptien.
N’y a-t-il pas des appelés qui travaillent dans les entreprises de l’armée, dans ses fermes au lieu de faire de la préparation militaire ?
Cela arrive, ça existe, mais c’est rare parce que l’armée égyptienne ne néglige pas l’impact social que ces activités. Alors la frontière n’est jamais claire entre un appelé employé par l’armée (ndlr, pour une activité militaire) et un appelé employé pour l’activité économique de l’armée. Mais ce n’est pas un domaine qui prête à polémique sur place parce que de toute façon les activités économiques sont aussi dédiées aux autres Égyptiens. Donc l’armée peut s’en sortir en disant : « de toute façon, ce sont des gens qui travaillent pour le peuple égyptien ». Si je prends le cas des boulangeries industrielles, qui permettent d’apaiser les tensions quand le pain augmente, qui est un aliment indispensable dans la vie des Égyptiens. Ceux qui sont employés dans ces boulangeries-là sont des civils contractuels. Parfois ce sont des appelés, mais in fine cela permet à l’armée d’alimenter à la fois ses propres troupes mais aussi de réguler les tensions sociales quand on a des problèmes d’approvisionnement par ailleurs. On l’a bien vu. Ça a été beaucoup utilisé par exemple en 2008 quand on a eu la crise sociale annonciatrice d’ailleurs du départ de Moubarak.
Ces officiers supérieurs n’ont pas forcément été formés pour gérer des entreprises, cela ne pose-t-il pas des problèmes ?
Ce n’est pas toujours des militaires qui font tourner ces entreprises, ils recrutent des civils. Ce n’est pas toute l’armée qui fait du business, il faut le préciser. Deuxièmement, on n’est pas dans un contexte économique de type libéral concurrentiel, on est dans un pays plus ou moins protégé économiquement où l’armée dans ses activités économiques ou d’investisseur ou de prise de participations est un acteur plus ou moins protégé par rapport à la concurrence étrangère et même locale.
Sous le régime Moubarak, on a prêté à son fils Gamal l’intention de privatiser certaines parties de l’économie égyptienne au risque de menacer la mainmise de l’armée sur certains secteurs. Cette volonté n’a-t-elle pas inquiété l’armée ? Et la mauvaise santé actuelle de l’économie égyptienne n’a-t-elle pas incité l’armée à intervenir pour ménager ses avoirs ?
C’est vrai que l’une des erreurs du clan Moubarak a été de vouloir s’attaquer, d’une manière plus ou moins déguisée, à des monopoles qui relevaient soit de l’armée, soit de la clientèle militaire. Mais je pense surtout que la grande erreur a été de vouloir faire en sorte de préparer la succession de Moubarak pour son fils, ce qui aurait rompu la tradition habituelle qui est que c’est un militaire qui succède à un militaire. C’est vrai que le fils Moubarak avait de gros appétits, qu’il était entouré de beaucoup d’hommes d’affaires qui espéraient un jour ou l’autre mettre la main soir sur les biens publics privatisés, soit un désengagement de l’armée qui aurait vendu ses actifs à des hommes d’affaires. L’idée était dans l’air. Et ça a beaucoup joué à la destitution du père et à la mise à l’écart des deux fils.
Sur l’état actuel de l’économie, moi je pense que les difficultés sont une constante de la vie économique égyptienne, même si dans les années 1980 on a pu lire des rapports élogieux, on sait très bien que ce n’était pas le cas parce que le problème social a toujours été présent, comme en témoigne la crise de 2005 et de 2008. Non je pense que c’est vraiment un problème politique qui a pesé. Personne ne parlait d’économie jusqu’à présent en Égypte même si tout le monde faisait le constat d’une situation difficile. Morsi a payé le prix de sa volonté de s’émanciper trop vite et de manière trop radicale vis à vis du pouvoir militaire d’une part. Et deuxièmement, il paye son impopularité par rapport à la plus grande partie de la population. Je ne crois pas que l’armée soit intervenue et c’est ce qu’elle dit aujourd’hui en disant : « il faut remettre de l’ordre dans le pays, attirer les investisseurs étrangers, etc. » Mais bon, c’est quand même un coup d’État contre un président légitimement élu. On en pense ce que l’on en veut de ce Monsieur et du courant qu’il représente, mais je ne suis pas sûr que ce soit aussi fait pour rassurer les investisseurs. Là, l’Égypte va rentrer dans une période d’incertitude au moins jusqu’à la prochaine élection présidentielle si jamais elle doit avoir lieu.
Akram Belkaïd est né en 1964 à Alger, de mère tunisienne et de père algérien. Journaliste et essayiste, il écrit notamment pour Le Quotidien d’Oran, Le Monde diplomatique, Afrique magazine et Maghreb Émergent ou Slate.fr. Il est déjà l’auteur d’Être arabe aujourd’hui (Carnets Nord, 2011), mais aussi de La France vue par un blédard (éditions du Cygne, 2012), Un regard calme sur l’Algérie (Le Seuil, 2005) et À la rencontre du Maghreb (La Découverte / IMA, 2001) mais aussi de Retours en Algérie qui vient de sortir en mai 2013 chez Carnets Nord.
La puissance économique de l’armée
De l’huile, des pâtes, de l’eau minérale, du pain, du carburant, du gaz en bouteille, des vaccins, mais aussi du nettoyage ou des chambres d’hôtel… En consommant ces produits ou ces services en Égypte, un citoyen est potentiellement un client de l’armée. Car au-delà du secteur de l’armement que l’État égyptien avait décidé de développer dès l’ère Nasser pour accroître son indépendance, l’armée toute puissante a également décidé de diversifier son activité économique pour s’étendre clairement dans le domaine civil. Elle possède ainsi un certain nombre d’entreprises et d’usines. Selon certains experts, le seul secteur de l’industrie militaire représenterait près de 10% de l’emploi en Égypte.
Si l’on y ajoute les activités civiles imputables à l’armée, ce serait près d’un Égyptien sur cinq qui travaillerait directement ou indirectement pour elle. Son chiffre d’affaires global s’éleverait à près de 5 milliards de dollars. L’armée pèserait entre 25% et 30% du PIB égyptien, ce qui en ferait la première entreprise d’Égypte. Pour autant, le thème n’est que peu abordé en public. L’armée préfère rester discrète sur la question et il est difficile de savoir exactement ce qu’elle possède.
Leur presse (propos recueillis par Manuel Dantas, Arte.tv, 5 juillet 2013)
Publié dans L'insurrection égyptienne et ses suites
Marqué avec Akram Belkaïd, Égypte, Farouk Ier, Frères musulmans, Mohamed Morsi, Nasser
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[Solidarité avec les barricadiers d’Amiens-Nord !] « C’est l’acharnement de la police et de la justice qui a poussé ce père à passer à l’acte »
Il s’immole par le feu au cœur de Fafet
Un père désespéré par ce que vit sa famille depuis les émeutes à Amiens-Nord en août dernier, s’est immolé par le feu, mardi, au kiosque de la rue Fafet.
Depuis les émeutes du 14 août dernier dans le quartier Nord, ce père de famille n’avait jamais fait parler de lui. Foued Hadji était resté discret malgré le sort qui a été réservé à sa famille. Mais mardi en fin d’après-midi, cet homme de 53 ans a craqué. Il s’est rendu au kiosque de la rue Fafet et s’est aspergé les membres de white spirit, avant de s’enflammer.
Grièvement brûlé aux bras et aux jambes, l’homme a été évacué au centre des grands brûlés du CHU de Lille. Hier, sa famille ne disposait pas de nouvelles rassurantes : « Il est plongé dans un coma artificiel. On nous a juste dit que ça pouvait durer huit jours. On espère qu’il va s’en sortir car il a déjà assez souffert comme ça », souligne un membre de sa famille.
Le 9 août dernier, son fils Nadir, 20 ans, était mort dans un accident de moto. Un fait divers qui avait été souvent mis en avant pour expliquer les émeutes du 14 août.
Dernièrement, il venait d’apprendre qu’un autre de ses fils, mineur, avait été condamné à deux ans de prison ferme pour trafic de stupéfiants. Ce même garçon était déjà incarcéré suite aux violences urbaines du mois d’août 2012.
« Il n’a pas supporté qu’un de ses fils soit condamné à de la prison ferme. Au moment où il est passé à l’acte, des témoins ont entendu qu’il criait le prénom de son fils. C’est l’acharnement de la police et de la justice qui a poussé ce père à passer à l’acte », en conclut une de ses nièces.
Hier, les services de police confirmaient qu’un homme s’était immolé par le feu dans le quartier Fafet, mais sans donner davantage de détails. L’affaire étant classée comme une tentative de suicide, fait qui hélas se produit souvent [sic – NdJL]. Sauf que cette fois-ci, il s’agissait d’une immolation sur la place publique.
Publié par des larbins de la maison Poulaga (Christophe Berger, Courrier-Picard.fr, 4 juillet 2013)
Publié dans La police travaille, Violences policières et idéologie sécuritaire
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[Révolution égyptienne] Dégager l’armée (4 juillet 2013)
[Égypte, 4 juillet, 18h] Et maintenant les grèves ouvrières ?
Ça a été la fête tout la nuit. Toute l’Égypte était dans la rue, fêtant sa deuxième révolution en deux ans dans un vacarme assourdissant. Et ceux qui n’y étaient pas, finissaient par y aller, n’arrivant pas à dormir, tellement le bruit était considérable et l’émotion intense. Car ce n’est pas seulement qu’une dictature extérieure aux corps, policière ou militaire, qui tombe, mais aussi une dictature dans les têtes, une police des mœurs et des esprits, celle des Frères Musulmans.
On ne mesure pas encore l’immense importance pour l’avenir qu’à, pour la première fois dans l’histoire, d’une part une participation de 30 à 40% des adultes d’un pays à une révolution [LOL – NdJL] et, d’autre part le renversement d’une dictature islamiste par une révolution populaire. C’est une libération mentale qui ne peut qu’en annoncer d’autres. Sissi, le nouvel homme fort de l’armée et du nouveau régime, l’a bien compris en tenant, lors de sa déclaration de la chute de Morsi, à s’entourer du Sheikh d’Al Ahzar et du pape des coptes, pour tenter de faire croire, à la manière Coué, à la continuité de l’alliance du sabre et du « goupillon » tout comme du représentant du FSN pour montrer un semblant d’unité du peuple derrière le nouveau pouvoir. Cette apparence n’était pas une démonstration de force mais un aveu de faiblesse.
Car on a vu des choses incroyables ces derniers jours.
Les dizaines de millions dans la rue [re-LOL – NdJL], tout le monde l’a vu.
Mais ce qui s’est moins vu et qui illustre cette volonté farouche à se libérer de toutes les prisons, y compris mentales, c’est la participation massive et inouïe des femmes et des enfants qui se sont investi à fond dans cette révolution, y ayant tellement plus à gagner. Ils formaient au moins la moitié des participants aux manifestations et certainement parmi les plus déterminés.
C’est en Haute Égypte, la région la plus attardée du pays, celle qui subit le plus l’oppression des préjugés religieux, là où dominaient non seulement les Frères Musulmans et les religieux coptes mais aussi les terroristes de la Jamaa Al-Islamiya, c’est là où on a vu les plus grandes transformations, le plus grand courage. Non seulement des manifestations où il y avait 5 à 10 fois plus de participation que lors de la chute de Moubarak, mais des manifestations où plus qu’ailleurs on savait qu’on risquait la mort, tellement les menaces d’un bain de sang de la part du pouvoir ont été nombreuses et explicites, et où plus qu’ailleurs, il fallait un courage inimaginable pour soulever tout ce qui opprimait le peuple. Et c’est là où on a vu des femmes en nikab (entièrement voilées) manifester en groupe en hurlant « À bas le guide suprême » (des Frères Musulmans). On n’est peut-être pas loin du geste de Hoda Sharaoui, qui, lors de la révolution égyptienne de 1919, était montée sur une caisse à savon et, en pleine place publique, avait arraché démonstrativement son voile, pour faire alors du mouvement féministe arabe — avec celui d’Iran — un des premiers du monde à ce moment, pour devenir personnellement après ça, une des leaders internationaux du mouvement féministe arabe et mondial et rédiger la part qui concerne les femmes dans la constitution turque de Mustafa Kemal, une des plus avancées du monde avec celle de la Russie à cette époque. Infiniment plus en tous cas que celle de la France des ces années où on condamnait encore à mort une femme pour avortement.
Voilà ce que signifie, ce que porte pour l’avenir ce qui est en train de se faire en Égypte.
Et cela s’est vu dans tout le Moyen Orient. Qu’on imagine l’impact social et sociétal en Arabie Saoudite, au Qatar, au Yemen ou en Iran… Les réseaux sociaux de cette région, du Maroc au Barheïn, vibrent de ce qui vient de se passer. Il faut faire comme les Égyptiens et les Égyptiennes…
Les Égyptiens savent l’impact de ce qu’ils viennent de faire. C’est aussi pour ça qu’ils crient leur joie et leur fierté. Ça va bien au delà de la chute d’un tyran.
Ils viennent de faire tomber le gendarme qu’il y avait dans leur tête.
Ils ont appris hier à ne plus avoir peur en faisant tomber Moubarak. Aujourd’hui, ils se débarrassent des autres oppressions qui les étouffaient.
Bien sûr, il y a eu les 91 agressions sexuelles sur ces derniers 4 jours, place Tahrir, dont cette presse qui hait le peuple en révolution, ne cesse de faire ses choux gras derrière les Frères Musulmans qui appelaient cette place, « place du harcèlement » pour dire aux femmes qu’elles ne devaient pas y aller, rester à la maison, pas faire de politique. Mais les femmes y sont allé, massivement. Bien sûr, c’est 91 agressions de trop, mais dans ce pays où l’intégrisme religieux transforme les hommes en obsédés sexuels, c’est partout que ces agressions font partie du quotidien, dans les bus, le métro, la rue… et en bien plus grand nombre. Les femmes ont eu mille fois raison d’y aller, pour qu’il n’y ait plus jamais ces agressions, pour libérer les Égyptiens en se libérant, en prenant leur vie en main. Et les organisations féministes égyptiennes ont eu aussi bien raison d’y appeler tout en demandant aux femmes de s’armer de ces quasi couteaux que sont les aiguilles à matelas. Parions que demain la vie familiale, la vie sociale vont être différentes.
On a vu aussi de nombreuses pancartes « Frères tunisiens, écoutez-nous » qui, comme le disait l’écrivain Khaled Al-Khamissi à leur sujet, est un message au peuple tunisien mais aussi à tous les peuples arabes opprimés… Et plus loin, car on a en effet vu une démocratie de la rue et des places supérieure à celle des bulletins de vote. Ce qui fait enrager tous les dirigeants occidentaux et les médias à leurs soldes, et peut tout à fait relancer tous les « indignés », de l’Espagne aux USA, puisque déjà ceux de la Puerta del Sol s’étaient directement inspirés de Tahrir 2011. Quel effet aura Tahrir 2013, au moment ou de Taksim à Rio, d’Athènes à Sofia, de Santiago à Lisbonne, les peuples secouent ce qui les écrase et cherchent les chemins de leur émancipation ?
C’est pourquoi ceux qui disaient que la révolution égyptienne était morte étouffée par l’hiver islamiste, sont aussi ceux qui disent aujourd’hui que ce n’est qu’un coup d’État militaire (pour voir ce que je pense de cet aspect, « Un coup d’État dans la révolution », publié hier 3 juillet, en fil d’actualité sur le site de TEAN), sont aussi ceux qui se se rangent maintenant aux côtés de la légitimité électorale des Frères Musulmans et des terroristes de la Jamaa Al-Islmiya, sont encore de ceux qui appuient la dénonciation de la barbarie sexuelle place Tahrir, car il n’y a rien qu’ils ne haïssent plus, ou ne craignent plus, qu’un peuple qui commence à s’émanciper. Au cas où ça serve d’exemple.
On a vu l’incroyable, des médecins, avocats ou magistrats embrasser des hommes et femmes sortis des bidonvilles, car là aussi, c’est remarquable, ces manifestations populaires étaient encore plus qu’en janvier 2011, des manifestations d’en bas, des quartiers pauvres et des ouvriers. On ne peut imaginer 30 à 40 millions d’adultes dans la rue [re-LOL – NdJL] dans un pays de 85 millions d’habitants sans comprendre que c’étaient majoritairement des « prolétaires » qui prolongeaient de manière politique ce qu’ils tentaient d’obtenir de manière sociale les mois qui précédaient ce soulèvement en se faisant battre chacun dans leur coin.
Car, et c’est le plus important, il y aurait eu, selon des militants d’extrême gauche égyptiens, des appels à des grèves qui devraient être organisées dés aujourd’hui jeudi, dans les trains, les bus, les cimenteries et sur le canal de Suez, à l’appel de militants syndicalistes de ces secteurs, pour préparer une grève générale. On ne peut pas s’empêcher de penser — en changeant ce qu’il faut changer — à l’état d’esprit qui a présidé au déclenchement de juin 36. Les travailleurs français s’étaient mis en grève au lendemain de l’élection du Front Populaire mais avant que celui-ci ne soit réellement mis en place, un mois après. Ils étaient infiniment heureux de ce succès, ils l’ont montré, mais en même temps, ils voulaient des changements tout de suite et se méfiaient suffisamment du nouveau pouvoir pour se dire qu’il fallait qu’ils s’y mettent eux-mêmes sans attendre, s’ils ne voulaient pas qu’on les oublie, eux et leurs revendications. On verra dans les jours ou semaines qui viennent si les appels à la grève seront suivi d’effet et s’ils iront jusqu’à la grève générale. Mais c’est une possibilité très réelle. Il faut se souvenir que les grèves avaient déjà éclaté en nombre important juste après l’élection/nomination de Morsi en juin 2012 parce que les travailleurs voulaient tester sa volonté de tenir ses promesses et lui dire que ça pressait. Aujourd’hui ça presse encore plus.
La majorité des hommes et femmes qui se sont soulevés, était là parce qu’elle a faim (40% des Égyptiens vivent avec moins d’un dollar par jour), parce qu’elle n’en peut plus de la misère, du chômage, des coupures d’électricité (parfois 8 heures par jour), d’eau, des hausses des prix, de la pénurie de pain, d’essence et de gaz pour circuler, cuire ses aliments, des menaces de suppression des subventions publiques aux produits de première nécessité. Et ça presse tellement depuis le début de l’année 2013 que l’Égypte a battu tous les records historiques mondiaux, en nombre de grèves et protestations, dans les usines et les quartiers, et surtout en mars, avril et mai (respectivement 1354, 1462 et 1300). La participation massive de ces 4 derniers jours traduit aussi cette participation massive aux luttes sociales ces derniers mois.
On a vu enfin des « comités populaires » spontanés, prendre en main la sécurité de ces millions d’hommes en mouvement, la sonorisation, l’alimentation, la circulation, l’hygiène (le problème des toilettes n’est pas le moindre quand des millions d’hommes restent des journées entières dans la rue). Des « comités populaires » qui continuent les tentatives d’auto organisation faites en février et mars 2013 à Port-Saïd, Mahalla et Kafr el Sheikh où les habitants ont pris en main, symboliquement ou quelques jours, la police, l’éducation ou tout simplement la vie municipale. Des « comités populaires » où des dizaines de milliers d’hommes, infiniment plus qu’en 2011, et notamment des milieux populaires, font une expérience qu’ils n’oublieront pas de sitôt, surtout dans la situation sociale qui vient.
Alors la joie de la victoire, la fierté, la libération mentale, les débuts d’auto-organisation, l’avalanche de mouvements sociaux, l’urgence et la méfiance à l’égard de ceux du dessus, en particulier l’armée dont beaucoup se méfient car ils se souviennent de son passage au pouvoir de février 2011 à juin 2012, tout cela forme peu à peu une conscience collective qui devrait rapidement montrer ses exigences politiques et pratiques d’ici peu, pour passer d’une deuxième révolution politique à la construction d’une révolution sociale, la seule à être vraiment démocratique jusqu’au bout et pour tous.
Jacques Chastaing
Publié dans L'insurrection égyptienne et ses suites
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Les lacets de la liberté
Des lacets de chaussures équipés de passes pour menottes
Info le Parisien. L’information a été transmise récemment par la police belge à son homologue française. Au cours de plusieurs interpellations, les enquêteurs d’Outre-Quiévrain se sont subitement retrouvés face à des suspects démenottés alors qu’ils venaient de leur attacher les mains. Après avoir observé attentivement leurs vêtements, ils se sont rendu compte que le bout métallique de leur lacets n’avaient pas une forme habituelle.
« Après examen minutieux de ces étranges lacets, il est apparu clairement qu’il s’agissait, en réalité, de micros passe-partout permettant d’ouvrir une paire de menottes, confie un haut fonctionnaire. Plusieurs boutiques ont mis en vente ce type de lacets. La plupart ont été retirés du marché mais nous ne savons pas combien ont pu être écoulés. » Des investigations sont toujours en cours pour remonter la filière d’approvisionnement de ces lacets de « la liberté »…
Presse carcérale (Stéphane Sellami, LeParisien.fr, 3 juillet 2013)
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Procès contrôle au faciès
Contrôle au faciès : un procès historique
Voilà deux ans que le collectif Stop le contrôle au faciès milite pour la remise d’un récépissé lors des contrôles d’identité dont sont régulièrement victimes les jeunes issus des quartiers ou à la peau basanée. Ce 3 juillet 2013, 13 plaignants se sont présentés au Tribunal de Grande Instance de Paris pour demander des comptes à l’État. Reportage.
Mercredi 3 juillet 2013. 13 heures. Devant le Tribunal de Grande Instance de Paris, situé sur l’Île de la Cité, les touristes flânent dans le quartier et photographient le parvis. Sur les marches au loin, beaucoup de monde et pas mal de caméras. Ça sent le procès. Mais à l’extérieur, personne ne semble s’interroger.
Passé les contrôles de sécurité, les personnes mobilisées pour le procès historique qu’intentent 13 plaignants à l’encontre de l’État (15 au départ, 13 à l’arrivée) se retrouvent sur les marches du Palais de Justice de Paris. Là, membres du collectif Stop le contrôle au faciès, militants de la Brigade Anti-Négrophobie ou simples sympathisants sont réunis, comme Yves, Lucas et Laure, venus de Montreuil avec l’encadrante de leur chantier d’insertion Cinévie. « Nous qui sommes de la banlieue, nous sommes assez concernés parce que nous nous faisons souvent contrôler pour des broutilles, témoigne Yves, 23 ans, de Noisy-le-Sec. Le président avait dit qu’il n’y aurait plus de contrôle « de routine » mais la demande a été rejetée par le Ministère de l’Intérieur, alors on vient réclamer nos droits ». « Je viens pour la même raison que mes collègues, poursuit Laure, 21 ans, qui s’est vue coller l’étiquette de « fumeuse » par les forces de l’ordre. J’ai fini en garde à vue il n’y a pas longtemps et je me fais souvent contrôler depuis, tout en sachant que je suis blanche donc rien à voir avec la couleur ».
Sortir de la fatalité
Devant la Chambre des Criées, les médias s’agitent, filment, photographient, enregistrent. Ou patientent. Comme l’auteur et éditorialiste Marc Cheb Sun, heureux de cette initiative : « La démarche est historique puisqu’on sort de cette espèce de fatalité qui a marqué bien des années où il était normal d’être interpellé à n’importe quel sujet, pour n’importe quoi, sans aucune raison. Ça faisait partie de la vie, de l’environnement. On est complètement sorti de ça parce que les gens qui ont porté plainte et ceux qui sont là aujourd’hui pour les soutenir disent non. C’est toute la responsabilité de la société qui est en cause ».
Alors que les spectateurs entrent au compte-goutte dans la salle d’audience, Sihame Assbague, porte-parole du collectif Stop le contrôle au faciès, revient sur la genèse de ce procès : « Suite à sa création en 2011, le collectif Stop le contrôle au faciès a jugé nécessaire de porter cette affaire de discrimination devant la justice, c’est pour cela qu’il a assigné l’État en justice le 11 avril 2012 ». Pour Bocar Niane, l’un des plaignants, ce procès marque le début d’un combat : « Ce qu’on dénonce aujourd’hui, ce sont les contrôles abusifs, pas les contrôles de manière générale (…) Il est temps que le gouvernement prenne ses responsabilités et que François Hollande tienne ses engagements pris lors de sa campagne présidentielle, à savoir la mise en place du reçu lors des contrôles d’identité ». Lui sortait en 2011 du domicile de ses parents avec ses deux jeunes sœurs lorsqu’un policier l’a pris par le bras et l’a emmené dans un coin avant de le menacer avec son Taser. Jugeant la situation inacceptable, Bocar Niane saisit l’Inspection générale des services (IGS) mais s’entend dire que « les enquêtes se font en interne et que, de fait, je ne serai pas informé ». Il décide donc de se rallier au collectif Stop le contrôle au faciès et engage avec eux la procédure judiciaire.
« Aucune différence de traitement ne peut être justifiée »
La politique, justement, est la ligne de fond utilisée par les avocats de la défense, Maîtres de Belloy et Ben Achour. La salle comble est attentive aux dires des uns et des autres, au bruit du parquet comme à celui des micros, non débranchés en début de séance, qui perturbent l’introduction de Maître Ben Achour. Face à lui, trois femmes et deux hommes en toge noire et collerette blanche : le Procureur de la République, deux juges, le Président et la greffière. La stratégie des avocats de la défense est simple : témoigner de incapacité de l’État à justifier pareille discrimination et porter réclamation, au nom des treize plaignants, pour que le droit soit respecté.
À la barre, treize plaignants masculins, venant de Lille, Paris, Saint-Ouen, Besançon et Vaulx-en-Velin. Treize victimes d’un contrôle basé davantage sur le faciès du prévenant que sur ses réels méfaits : l’un aurait porté une capuche, l’autre était avachi sur une table, un autre aurait pressé le pas, d’autres encore étaient susceptibles d’avoir une arme ou de la drogue sur eux… Pourtant, la réalité des visages est implacable. Les treize prévenus sont Noirs et Arabes. Deux caractéristiques qui ont 11 fois et 15 fois plus de chances d’attirer les contrôles policiers selon une enquête de l’Open Society Justice Initiative et du CNRS.
Délinquant financier vs. délinquant juvénile
La tactique de la défense est construite en deux temps : Maître Ben Achour s’appuie posément sur des textes de lois – de la Déclaration des Droits de l’Homme de 1789 à la Charte des droits fondamentaux adoptés par l’Union Européenne en 2000 – pour avancer le fait qu’« aucune différence de traitement ne peut être justifiée » entre les citoyens. À l’inverse, son collègue Maître de Belloy interroge avec fougue les articles 78-2 du Code de procédure pénale (portant sur les contrôles d’identité) et L-141-1 du Code de l’organisation judiciaire (portant sur la responsabilité du fait du fonctionnement du service de la justice) pour amener le tribunal à se positionner face à cette « zone de non-droit » avançant ainsi que « le sursaut ne va pas venir du législateur ou de la classe politique actuelle, mais de vous, j’espère, de votre tribunal, ou en tout cas de la juridiction constitutionnelle ». Terminant sur les préjudices à la fois désastreux et non quantifiables de la discrimination (l’avocat citera plusieurs témoignages du collectif Stop le contrôle au faciès), Maître de Belloy s’aventure jusqu’à’ à se comparer à un « délinquant financier » (portant un costume-cravate du lundi au vendredi) pour faire rire l’audience et utiliser cette réaction collective dans sa plaidoirie. « Pourquoi ce raisonnement, quand je l’applique à ma personne, provoque des rires comme s’il était immédiatement absurde mais que ce même raisonnement, appliqué à eux, devient « acceptable » ? » S’ensuivront des demandes de dommages et intérêts « dissuasives » à hauteur de 10’000€ par plaignant, largement contestés par l’autre partie.
« Ce n’est pas un spectacle »
Vient le tour de l’agent judiciaire de l’État, dont la voix ne porte pas. « On n’entend pas » râlent des gens dans la salle. « Ce n’est pas un spectacle », rappelle le juge, implacable. Assurant qu’elle sera forcément moins « drôle » que ses prédécesseurs, l’agent judiciaire oriente son argumentaire non vers un plaidoyer général mais vers un plaidoyer particulier. C’est donc au cas par cas qu’elle analyse les dossiers, soulignant que pour neuf d’entre-eux la Réquisition Judiciaire (justificatif permettant aux policiers d’effectuer leurs contrôles dans des lieux et selon des horaires précis) est appliquée et que pour l’un d’entre-eux, Bocar Niane, l’horaire des faits varie entre sa déclaration dans la main courante (22 heures, heure à laquelle la Réquisition est appliquée) et son assignation (20 heures, heure où elle ne l’est pas). « J’avais rédigé mon témoignage à chaud et oublié le détail de l’heure », rectifie Bocar Niane à la sortie du procès.
Argumentant que « ce sont les demandeurs eux-mêmes qui expliquent ce que les policiers ont cherché », que certains plaignants étaient accompagnés d’amis Blancs, que d’autres habitaient effectivement dans une zone de sécurité prioritaire justifiant des contrôles de police réguliers, que d’autres portaient une capuche alors que, pour l’avoir vu, « en garde à vue, ce sont des personnes qui portent une capuche qui leur vendent de la drogue », que d’autres encore se trouvaient dans un secteur où venait d’être commise une effraction (« sans aucune preuve » avait auparavant souligné la défense), l’agent judiciaire de l’État requiert que les demandeurs soient déboutés et qu’est lieu une condamnation symbolique « au cas particulier » en ce qui concerne les dommages et intérêts.
« Les idées générales sont une chose, les dossiers en sont une autre »
Dernière à prendre la parole, la Procureur argumente elle aussi dans le sens de l’agent judiciaire de l’État. D’abord parce que, selon elle, les articles 78-2 et L 141-1 ont été abordés très tard par la défense, ensuite parce que ces plaidoyers visaient uniquement « à frapper les esprits ». « Je mets quiconque au défi, par la lecture des conclusions, par le moindre commencement de début de phrase que l’un comme l’autre nous serions dans cette démarche visant à encourager la discrimination et l’inégalité devant la loi ».
Avançant que le plaidoyer de la défense divise les plaignants en deux catégories (élu, athlète de haut niveau, élève en école de commerce) et les autres (dont les professions n’ont pas été précisées au cours de l’audience), le Procureur interroge le Tribunal : « Doit-on contrôler uniquement les personnes ayant un casier judiciaire ? » et rejette l’accusation portée contre le Ministère : « Les idées générales sont une chose, les dossiers en sont une autre ». Intervenant en dernier, le Procureur a ainsi la possibilité d’encenser l’agent judiciaire (pour sa « sagacité », son « expérience ») et de critiquer la défense (« désinvolte », « insultant ») et de déformer certains propos (le plaignant qui marchait « à vive allure » en début de procès est ainsi considéré comme s’étant mis « à courir » dans sa plaidoirie, le port de la capuche soulevé par la défense comme un préjugé, est alors réfuté en tant que tel « je ne suis pas persuadée qu’on puisse voir sa couleur de peau »).
Considérant que l’absence de preuve quant à l’accusation de discrimination ne permet pas d’établir un verdict fondé, la Procureur requiert le rejet « purement et simplement » des demandes. Attentifs à l’ensemble des plaidoiries, les juges se tournent alors vers la greffière, concentrée sur son ordinateur avant d’annoncer posément que les délibérations auront lieu le 2 octobre 2013.
Claire Diao, Bondy Blog, 4 juillet 2013
Publié dans La police travaille, Violences policières et idéologie sécuritaire
Marqué avec Besançon, Bocar Niane, Brigade Anti-Négrophobie, IGS, Inspection générale des services, Lille, Montreuil, Noisy-le-Sec, Paris, Saint-Ouen, Sihame Assbague, Stop le contrôle au faciès, Vaulx-en-Velin
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[Le peuple veut la chute du système] Docu sur le mouvement anarchiste en Tunisie
Bonjour à tou.te.s,
Voici le docu réalisé en mars-avril sur le mouvement anarchiste en Tunisie :
« Le peuple veut la chute du système. An V de la révolution tunisienne »
Il est libre et gratuit, le seul moyen de le faire connaître, c’est vous ! Merci de faire tourner.
Le peuple veut la chute du système
An V de la révolution tunisienne
الشعب يريد إسقاط النظام
السنة الخامسة من الثورة التونسية
Tourné et monté en mars-avril 2013, ce documentaire, libre et gratuit, part à la rencontre de diverses composantes du mouvement anti-autoritaire tunisien. Il porte les paroles de groupes organisés et d’individus : le Mouvement Désobéissance, la lutte contre le Forum Social Mondial, des activistes de rue ou des syndicalistes de base, une mutuelle agricole, un projet culturel autogéré… Il pose un regard sur le développement d’idées et de pratiques anarchistes et autogestionnaires au cœur du processus révolutionnaire en Tunisie. Il se veut être un outil, peut-être une arme, pour construire la solidarité internationale et renforcer le mouvement d’émancipation mondial dont l’un des actes fondateurs fut le soulèvement de Gafsa en 2008.
TÉLÉCHARGER LE FILM – 1h11
Publié dans L'insurrection tunisienne et ses suites
Marqué avec Gafsa, mouvement Désobéissance, Toulouse, Tunisie
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[Révolution égyptienne] « Les syndicats sont parfaitement impuissants »
Publié dans L'insurrection égyptienne et ses suites, Radicalisation des luttes ouvrières
Marqué avec Égypte
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[Vide grenier d’été : débarrassons-nous des idées rances] Rendez-vous jeudi 4 juillet devant la préfecture (arrêt 50 Otages) à Nantes, 21 heures
Vide grenier d’été : débarrassons-nous des idées rances
Le printemps français a été pourri : des homophobes partout ! À l’assemblée, à la télé, dans la rue… gonflés à bloc par les leaders de la droite « respectable » qui ont offert une véritable tribune de choix à ces réactionnairEs de tous bords ! S’en est suivi un déferlement d’agressions homophobes, sexistes, racistes et fascistes que nous subissons au quotidien !
Alors on va aérer tout ça pour se débarrasser des vieilles idées réactionnaires et réserver à l’été de l’égalité l’accueil qu’il mérite !
Rendez-vous jeudi 4 juillet devant la préfecture (arrêt 50 Otages) à Nantes, 21h00
Action Antifasciste Nantes et Les Dures à queer
Publié dans Antifascisme, Luttes LGBT
Marqué avec antifa, Nantes
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[Et de deux !] La mafia du pétrole congédie une employée indélicate
Delphine Batho ne veut pas modifier la loi sur le gaz de schiste
La ministre de l’énergie, Delphine Batho, a exclu mercredi toute modification de la loi interdisant la fracturation hydraulique, dans un débat sur RMC et BFMTV avec Laurence Parisot, la dirigeante du Medef.
DE LOURDES CONSÉQUENCES ENVIRONNEMENTALES
La ministre a rejeté tout assouplissement de la loi de juillet 2011 bannissant la fracturation hydraulique en France et rendant impossible l’exploitation en France du gaz de schiste. Elle a qualifié cette décision de « victoire démocratique », consécutive à une « mobilisation sans précédent ».
Mme Batho a justifié l’interdiction par les lourdes conséquences environnementales liées selon elle à l’extraction du gaz de schiste, évoquant « des séismes de plus de 5 sur l’échelle de Richter dans plusieurs États américains » et « des pollutions des nappes phréatiques ».
« RELANCER L’ÉCONOMIE DE LA FRANCE »
Pour Laurence Parisot, les gaz de schiste permettraient pourtant de « relancer l’économie de la France ». « Il faut évidemment permettre la recherche », a déclaré la présidente du Medef, qui a également déploré le fait que la France s’interdise « de considérer une ressource qui pourrait tout changer pour la situation économique du pays ».
Les compagnies pétrolières et le patronat français critiquent la loi française qui empêche, selon eux, d’exploiter un filon prometteur. (…)
LeMonde.fr, avec Reuters et l’Agence Fracturation Pollution, 5 juin 2013
Pour rappel :
L' »affaire » de la suspension des forages de Shell au large de la Guyane aura duré une semaine. Et aura fait une victime : Nicole Bricq. À la faveur du premier remaniement du gouvernement de Jean-Marc Ayrault, jeudi 21 juin, la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie est mutée au ministère du commerce extérieur, une dépendance de Bercy.
Impossible de ne pas faire le lien entre ce désaveu et la décision surprise de Mme Bricq, jeudi 14 juin, de retarder l’exploration du bassin pétrolier de Zaedyus, à 150 kilomètres des côtes du département d’outre-mer (DOM). Le ministère avait alors stoppé à la signature deux arrêtés préfectoraux nécessaires au lancement des travaux, mettant en avant « une nécessaire remise à plat de l’instruction des demandes de permis afin de ne plus sacrifier l’environnement ». (…)
Mais c’est surtout la voix des groupes pétroliers et des industriels qui semble avoir pesé. La colère de Shell a été suivie de celle de Total, de l’Union française des industries pétrolières (UFIP) et de Laurence Parisot, présidente du Medef, qui en ont appelé directement à Matignon, voire à la présidence de la République. (…)
Le Monde, 22 juin 2012
Publié dans Aménagement du territoire - Urbanisme, Luttes pour la terre
Marqué avec Delphine Batho, Guyane, Jean-Marc Ayrault, Laurence Parisot, Medef, Nicole Bricq, Shell, Total, UFIP, Union française des industries pétrolières, Zaedyus
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[In memoriam Clément Méric] Bagnolet (93) antifa, juin 2013
Publié dans Antifascisme
Marqué avec antifa, Bagnolet, Clément Méric, Seine-Saint-Denis
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[Mort aux el-Assad et à tous leurs complices !] Du terrorisme et de l’État : le cas de la « Katiba des Tchétchènes »
Qui a créé et manipule la Katiba des Tchétchènes, nouvel « épouvantail jihadiste » en Syrie ? (2/2)
La présence de Tchétchènes en Syrie n’est pas une nouveauté. L’Encyclopédie des Familles Damascènes de Mohammed Charif al-Sawwaf la fait remonter à plusieurs siècles. Comme nombre de leurs frères sunnites du Maghreb et du Moyen-Orient, des Circassiens (Tcherkesses, Daghestanais, Tchétchènes…) se sont jadis installés à Damas. Les uns étaient en quête d’approfondissement de leurs connaissances religieuses. D’autres recherchaient des maîtres dans l’étude des « voies » du soufisme. D’autres étaient désireux d’améliorer les techniques de tel ou tel artisanat. Passant par là au hasard d’un voyage de commerce ou d’un pèlerinage, quelques uns ont été conquis par l’atmosphère particulière de cette ville, ouverte aux étrangers et apte à les assimiler. Ultérieurement, engagés de façon plus ou moins volontaire dans les rangs de l’armée de la Sublime Porte, certains sont restés en Syrie où ils avaient déjà fondé une famille lorsque l’Empire ottoman s’est effondré.
Ceux qui font actuellement parler d’eux, dans le nord du pays en particulier, proviennent en majorité de l’étranger. Des Tchétchènes sont mentionnés parmi les combattants jihadistes depuis le milieu de l’année 2012. Comme les Libyens, désireux de rendre à Bachar al-Assad la monnaie de sa pièce en coopérant au renversement de son régime, allié jusqu’à la dernière heure de Moammar Qaddafi, des Tchétchènes n’ont pas tardé à arriver en Syrie. Ils voulaient combattre un régime que les Russes, auteurs de tant de crimes et de désolation dans leur pays, portaient depuis des mois à bout de bras aux niveaux politique, diplomatique, économique et militaire.
Leur apparence est caractéristique et ils sont aisément reconnaissables. Mais leur nombre est limité. Le chiffre de 6000 hommes, avancé dans une étude de février 2013, est tout à fait farfelu. Il ne repose sur aucune évaluation sérieuse. D’ailleurs l’imputation, dans le même article, de la « fuite d’au moins 700’000 personnes de Syrie » (en 2012) aux « massacres régulièrement commis par l’opposition islamiste principalement sunnite contre des minorités ethniques et religieuses », montre que son auteure a moins pour volonté d’informer sur la réalité du conflit, qui a principalement jeté hors de Syrie des musulmans sunnites, que de justifier les craintes russes pour la « potentielle déstabilisation du Caucase par la guerre civile en Syrie ». Le chiffre d’une centaine, fourni en avril 2013 par un combattant tchétchène répondant au sobriquet d’Abou Hamza, ou celui de 200, avancé par le chef du Service de Renseignement intérieur russe en juin 2013, sont certainement plus proches de la réalité.
Sans doute en raison de leur expérience des combats, acquise pour les uns dans la lutte contre le « bouillant colonel », pour les autres dans la guerre pour l’autonomie qui oppose leur pays à la Russie depuis le début des années 1990, certains de ces combattants étrangers ont été en mesure d’imposer leur autorité au groupe dans lequel ils étaient accueillis. C’est le cas du Libyen Mahdi al-Harati, l’un des héros de la seconde bataille de Tripoli devenu en Syrie le chef du Liwa al-Oumma, et d’Abou Omar al-Chichani, vétéran des guerres de Tchétchénie, dont l’autorité s’est étendue en quelques mois de Katibat al-Mouhajirin (Brigade des Émigrants… en référence aux compagnons du prophète Mohammed ayant « émigré » avec lui de la Mecque à Médine en 622) à Jaïch al-Mouhajirin wa-l-Ansar (Armée des Émigrants et des Partisans, ce dernier terme renvoyant à ceux qui, à Médine, s’étaient rangés du côté du prophète de l’Islam), toutes deux composées de combattants originaires de divers pays.
*
Mais avec la Katiba des Chéchènes, il s’agit de tout autre chose. Selon Itab Mahmoud, elle est apparue au printemps 2013, comme un groupe déjà constitué fort de près de 200 hommes, dont les uns parlaient tchétchène et les autres russe. Sous la conduite d’un certain Abou Omar al-Koweïti, ils se sont installés d’autorité dans les environs d’al-Machhad, au sud-est des villages d’Aqrabat et de Qah. Situé à 3 km du village d’Atmeh, ce hameau est également distant de 5 km du poste frontière de Bab al-Hawa. Il s’agit donc d’une position stratégique, à proximité immédiate de la frontière qui sépare la Syrie du Liwa d’Iskandérun. Ils ont accaparé des terrains agricoles pour en faire leur campement. Les habitants du village les ont laissé faire : ils n’étaient pas en mesure de les chasser pour récupérer leur bien et ils les ont crus lorsqu’ils ont affirmé être là pour « combattre le régime et défendre le peuple syrien opprimé ».
Rapidement, le comportement de ces moujahidin les a intrigués. Ils manifestaient une intransigeance à laquelle la population locale n’était pas habituée. Ainsi, ayant interdit aux villageois de fumer, ils ont coupé deux doigts d’un homme qu’ils avaient surpris une cigarette à la main. Ils menaçaient de procès les hommes dont les épouses portaient, selon eux, des vêtements « inadaptés ». Ignorant que l’école chaféite à laquelle appartiennent la plupart des habitants de cette région autorise les femmes à montrer leur visage et leurs mains, ils passaient de village en village pour les inciter à adopter le voile intégral. C’est pourquoi, lorsqu’ils ont demandé aux habitants des environs de leur donner leurs filles en mariage, ils n’ont reçu que des réponses négatives. En revanche, pour rallier à eux ceux qu’ils pouvaient, ils proposaient des salaires mirobolants aux hommes qui acceptaient de rejoindre leur groupe. Le plus connu d’entre eux se faisait appeler Abou al-Banat. Il semblait être tchétchène ou russe. Pour affirmer son autorité, il avait tué pour un motif obscur, également au début du mois d’avril, un habitant d’un village voisin.
Passant un jour par al-Machhad, un homme du village de Tarmanin a aperçu Abou Omar al-Koweïti. Surpris d’apprendre comment il se faisait appeler, il a indiqué à des unités de l’Armée Syrienne Libre positionnées non loin de là que l’individu, qu’il avait déjà rencontré et qu’il connaissait, s’appelait en réalité Huseïn. Il était peut-être koweïtien, mais il était certainement chiite. Il travaillait comme accompagnateur de groupes iraniens qui se rendaient d’Iran en Arabie pour le pèlerinage. Cette révélation a fait l’effet d’une bombe. En rapprochant un certain nombre de faits — la tendance du bonhomme à traiter les autres de kouffar (impies, athées), l’incitation à des affrontements interconfessionnels dans lesquels des dizaines de personnes avaient failli périr à Atmeh, l’ignorance de la langue tchétchène de la part de certains de ses hommes qui ne s’exprimaient qu’en russe, leur incompréhension du moindre mot d’arabe qui surprenait de la part de musulmans… — ils se sont demandés s’ils n’avaient pas affaire, avec cette Katiba des Tchéchènes, à des agents ou des complices d’un service de renseignement qui pouvait être russe ou iranien.
Pour en avoir le cœur net, ils sont partis en groupe vers al-Machhad. Alors qu’ils s’approchaient du camp, ils ont été surpris par des tireurs qui, positionnés en divers endroits élevés, ont tiré sur eux sans sommation. Croyant avoir ainsi la réponse à leur question, ils sont revenus à la charge avec des renforts solidement armés. Mais à peine avaient-ils encerclé le camp que l’aviation du régime est intervenue, les obligeant à se retirer au plus vite. Or, cela faisait plusieurs mois que les Mig de l’armée de l’air syrienne n’avaient plus fait leur apparition dans cette région pour eux délicate, en raison de sa proximité avec la frontière turque et de la possession, par l’ASL, de quelques missiles antiaériens portables à l’épaule… Tout cela démontrait que, si ce n’est tous, du moins quelques membres importants du groupe étaient en contact avec les moukhabarat. Cela pouvait expliquer aussi la possession par le groupe des fortes sommes d’argent qui lui permettaient d’acheter les gens.
Mais, compte-tenu du moment et du lieu où la Katiba des Tchétchènes avait imposé sa présence, cela posait aussi beaucoup d’autres questions.
• D’où venaient précisément ces hommes ?
• Quel avait été leur parcours en Syrie et auparavant ?
• Pourquoi avaient-ils choisi de se fixer dans cette région dont ils ne connaissaient rien ?
• Comment y étaient-ils arrivés ?
• Qui les y avait aidés ?
• De quelles armes disposaient-ils ?
• À quoi servaient les mortiers aperçus dans leur campement puisqu’ils ne se battaient jamais contre les forces du régime ?
• Ne pouvaient-ils détenir des produits entrant dans la fabrication « d’armes chimiques » ?
• N’auraient-ils pas installé dans le secteur des systèmes d’écoute et de surveillance ?
*
Ayant constaté quelques jours plus tard que la Katiba des Tchétchènes avait miné les alentours de son campement, base de l’État du Califat qu’ils appelaient de leurs vœux, l’Armée Syrienne Libre a estimé qu’en dépit de sa gravité l’affaire pouvait attendre. Tant que les Tchétchènes en question ne s’éloignaient pas du périmètre qu’ils s’étaient approprié et se limitaient à faire de la prédication dans un rayon limité, mieux valait ne pas mettre en danger
la vie de combattants plus utiles ailleurs, dans la lutte contre les forces du pouvoir. Mais, pour une raison peu claire, des jihadistes de Jabhat al-Nusra ont finalement organisé une expédition au terme de laquelle ils ont chassé un peu plus loin la totalité du groupe.
À la fin du mois de mai, Abou Omar al-Koweïti a attaqué avec ses hommes le village où résidait celui qui l’avait reconnu et dont les révélations avaient été reprises par nombre de sites Internet et de pages FB favorables à la révolution. Par chance, ce dernier n’était pas chez lui. Parallèlement, le chef de la Katiba des Tchétchènes tentait de mettre les choses au point en expliquant qu’il avait bien été chiite et qu’il avait travaillé en Iran, mais qu’il avait adhéré au sunnisme avant d’arriver en Syrie.
Rendus plus que méfiants à l’égard de ces hommes, les habitants de la région les ont étroitement surveillés. Ils ont formulé contre eux auprès de l’Armée Syrienne Libre un certain nombre d’accusations.
• Ils leur ont imputé l’assassinat d’un chef de l’ASL.
• Ils ont affirmé qu’ils avaient contribué à guider l’aviation syrienne lors d’un raid aérien sur Atmeh.
• Ils leur ont attribué la responsabilité du bombardement chimique de Khan al-Asel.
• Ils les ont accusés d’avoir enlevé Mgr Youhanna Ibrahim et Mgr Boulos al-Yaziji, respectivement évêque syriaque et évêque grec-orthodoxe d’Alep.
• Ils ont enfin signalé qu’Abou Omar al-Koweïti, qui était en relation avec les services syriens, le Hizbollah et les Russes, avait pour conseiller un élément du Parti de Dieu libanais.
Le 26 mai, Itab Mahmoud rapportait enfin que, aux dires de témoins, la Katiba des Tchétchènes avait égorgé trois personnes dont nul ne connaissait l’identité jusqu’à ce jour, en obligeant les gens et en particulier les enfants à assister à leur exécution. De manière étrange, une vidéo montrant la scène était parvenue à Dounia TV qui l’avait immédiatement diffusée alors qu’elle n’était pas accessible sur YouTube.
*
Ainsi, l’enregistrement dont il a été question dans la première partie de cet article, utilisé pour imputer à Jabhat al-Nusra l’assassinat du père François Mourad, tué dans son couvent fin juin 2013, avait déjà été diffusé un mois plutôt ! Les victimes n’étaient pas alors des chrétiens mais des Syriens anonymes. Les criminels étaient membres non pas du Front de Soutien, mais de la Katiba des Tchétchènes… Il n’empêche : un article le 1er juillet publié sur Médiapart, qui reflète dans son titre la confusion dans laquelle vit son auteur… s’agissant au moins de la Syrie, nous parle encore de « Trois religieux chrétiens décapités par la révolution syrienne » !
On serait moins porté à entendre les questions que se posent sur cette étrange Katiba des Tchétchènes les révolutionnaires et les combattants dans la région si le régime n’avait pas montré, à d’innombrables reprises depuis le début du soulèvement populaire, à quoi il est prêt pour faire de ses ennemis des monstres. Il n’hésite à manipuler ni les hommes, ni les faits, pour imputer aux autres ses propres crimes — comme à Houla par exemple — et pour démontrer que, tous les combattants de l’Armée Syrienne Libre étant des terroristes, des fanatiques, des extrémistes, etc… il n’y a de salut en Syrie, pour les Syriens modérés et les minorités, que dans le maintien indéfiniment en place de Bachar al-Assad. Pour parvenir à cet objectif, un obus tiré sur un quartier devient un attentat suicide, une opération organisée en riposte à une attaque devient une épuration confessionnelle, et ainsi de suite…
On serait également moins porté à entendre leurs questions si la totalité des actions de cette Katiba des Tchétchènes n’avait d’une manière ou d’une autre servi les intérêts du régime, fournissant des arguments aux menaces sectaires que celui-ci ne cesse de brandir, alors que tous, au sein même des communautés minoritaires concernées, ne partagent pas sa hantise. Est-ce avoir l’esprit mal intentionné que de s’interroger sur un lien éventuel entre l’enlèvement de Mgr Youhanna Ibrahim, le 22 avril, et des propos qu’il avait tenus quelques jours plus tôt, le 13 avril, sur les ondes de la BBC, à l’occasion d’un voyage à Londres, d’où il revenait en compagnie de son ami via la Turquie ? Interrogé sur la situation de son pays et sur l’inquiétude des chrétiens de Syrie, il avait déclaré que « ni les chrétiens, ni les églises ne sont visés en tant que tels. Mais ils sont exposés à des attaques indiscriminées ». Il avait également affirmé que « la situation diffère en Syrie de ce qu’elle est en Irak. Le maintien des chrétiens n’est pas lié, en Syrie, au maintien en place du régime de Bachar al-Assad ».
Y a-t-il actuellement pire crime en Syrie que tenir de tels propos et suggérer que personne, y compris le fils du fondateur de la dynastie présidentielle en place, n’est irremplaçable ?
*
Pour nombre d’opposants Syriens, l’apparition de la Katiba des Tchétchènes a répondu, au début de 2013, à une nouvelle donne. Fin 2011, en relâchant des centaines de jihadistes revenus d’Irak qu’il détenait dans les geôles de ses différents services depuis le milieu de la première décennie 2000, le régime de Bachar al-Assad comptait sur le trouble et l’épouvante qu’ils ne manqueraient pas de semer à la veille de l’arrivée en Syrie des premiers observateurs de la Ligue Arabe et des premiers journalistes étrangers. Il a fait de l’un des groupes qu’ils ont rapidement constitué, avec ou sans son aide, le Jabhat al-Nusra, un véritable épouvantail. Or, s’ils ont effectivement tétanisé les États « Amis du Peuple syrien » qui s’interrogeaient sans fin sur la nécessité, l’opportunité, l’utilité, le moment, le moyen… de répondre aux appels à l’aide des opposants et des révolutionnaires, les combattants de ce Front de Soutien n’ont pas suscité la réaction de rejet que le régime espérait de la part des populations parmi lesquelles ils se sont installés. Certes, elles ne partageaient généralement ni leurs idées, ni leurs méthodes. Mais, abandonnées à elles-mêmes par leurs « Amis », face à un régime impitoyable et sanguinaire, elles se félicitaient à la fois de leur acharnement au combat, de leur mépris de la mort et des services qu’ils leur rendaient. C’est pourquoi elles ont riposté à l’inscription américaine du Jabhat al-Nusra sur la liste des organisations terroristes, en affirmant, lors des manifestations du vendredi 14 décembre 2012, que « le seul terrorisme en Syrie est celui d’al-Assad ».
La Katiba des Tchétchènes est apparue quelques semaines plus tard pour modifier du tout au tout cette situation. Alors qu’elle n’a provoqué aucune perte dans les rangs des forces de l’ordre contre lesquelles elle ne s’est jamais battue, elle a exercé sa violence sur la population locale, soumise à ses exigences, à son fanatisme et à son interprétation provocatrice des « règles de la religion ». Pour tenter une nouvelle fois de détourner des « terroristes » ceux qui s’étaient solidarisés avec le Jabhat al-Nusra, le régime a donc imputé à ce dernier les scènes que la Katiba des Tchétchènes est opportunément venue lui offrir.
Les mêmes opposants n’excluent pas que, installée à proximité immédiate des limites du Liwa, la Katiba d’Abou al-Banat mène aussi d’autres missions, au profit des services de renseignements syriens et de leurs alliés russes et iraniens, surveillant les allers et venues au poste frontière, notant l’entrée et la destination de matériels militaires, repérant les personnalités — les évêques par exemple… — et les journalistes étrangers à leur arrivée et à leur départ, et contribuant éventuellement à leur capture à son propre profit ou à la demande de ses commanditaires.
À ce stade, il ne s’agit là que de méchantes suppositions, de rêves éveillés, de théories du complôt… Mais, si tel est le cas, pourquoi, dans son évaluation plus haut rapportée, le chef du Service de Renseignement intérieur russe « oublie-t-il » de compter les « quelque 200 hommes » de la Katiba des Tchétchènes ? Parce qu’il s’agit pas de Tchétchènes ? Parce qu’il ne s’agit pas de jihadistes ? Parce qu’ils sont en mission ou en service commandé ?
Ignace Leverrier, blog « Un œil sur la Syrie » toléré par LeMonde.fr, 2 juillet 2013
Publié dans La révolution syrienne
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[Révolution égyptienne] Dégager l’armée (2 juillet 2013)
[Égypte, 2 juillet, 19h] Révolution acte II
Foule énorme dans les rues du Caire et des villes d’Égypte. Ce qui montre que les Égyptiens n’attendent pas que l’armée fasse le boulot à sa place, ou passe un compromis avec Morsi, contrairement à ce que dit la correspondante de France Info au Caire qui prend ses souhaits pour la réalité.
Ambiance toujours très festive. Le slogan dominant aujourd’hui « il partira, nous resterons ». Des chants contre la mère de Morsi. Ah si elle avait connu l’avortement My god ! Bref la foule se libère. Absence de manifs importantes des Frères Musulmans sauf place Rabea al-Adaweya (Le Caire) mais il n’y a aucune commune mesure avec les anti Morsi. Ils semblent avoir disparu. Le navire coule.
Le mouvement du 6 avril (démocrate révolutionnaire) demande des élections avant trois mois. Il semble y avoir du flou à la tête de Tamarod et du Front du 30 juin qui avaient appelé à la désobéissance civile et qui viennent il y a quelques instants de rejeter l’idée d’un projet de référendum de Morsi, par contre certains à leurs têtes parlent maintenant d’élections. Et d’autres ont dit qu’ils iraient à la réunion de préparation de la feuille de route de l’après Morsi organisée par l’armée et notamment la suite électorale avec les autres partis d’opposition, gouvernement technocratique de transition, présidence du chef de la Haute Cour Constitutionnelle et tutti quanti… ils se font même représenter par Baradei, le type du politicard, bien qu’ils aient dit qu’ils n’iraient pas hier. Ah le crétinisme électoral ! Le mouvement continuera sans eux.
Pour voir les images en direct sur les chaines TV satellitaires
Forte ambiance à 18h devant le palais présidentiel Qubba
[2 juillet, 21h] Ce n’est qu’un début…
La foule des anti Morsi continue à croître partout. Ambiance toujours festive et familiale. La moitié de la foule, au moins, est composée de femmes et d’enfants. Grande fierté des femmes présentes.
À 21h, on notait un certain nombre d’affrontements au Caire en dehors des trois lieux principaux des rassemblements anti Morsi, mais près des rassemblements pro Morsi. Toutefois pas grand chose par rapport à la foule dans les rues, et pas assez pour justifier une intervention immédiate de l’armée pour éviter le bain de sang. Le général Sissi, a en effet demandé à Morsi de démissionner pour sauver des vies. On voit sous quel axe politique l’armée veut intervenir. Le personnel de l’ambassade américaine commence à être évacué.
Channel 1, télé d’État, vient de changer de camp. Ils ne passent plus que des vidéo, photos, témoignages anti Morsi, hier c’était le contraire. C’est fait comment le cerveau d’un journaliste ? Ceci dit, il y a des bons journalistes. Un des meilleurs et plus courageux journaliste égyptien, Hani Shukrallah, démocrate révolutionnaire mais sincère et honnête, vient probablement d’être réintégré dans le journal qu’il dirigeait et dont il avait été viré par les Frères Musulmans en février 2013 en signant un article dans ce journal, Al Ahram online (pour ceux qui veulent lire ce qu’il écrit, en anglais). Al Ahram online qui était donc dirigé depuis février 2013 par un sympathisant des Frères Musulmans sent-il le vent tourner ?
Des dirigeants des Frères Musulmans appellent toujours à résister jusqu’à sacrifier sa vie. Non pas qu’ils croient qu’ils peuvent enrayer le mouvement actuel, mais préparent certainement à travers leurs prises de position, la suite pour l’organisation des Frères Musulmans lorsqu’ils seront dans l’opposition. Il y a un peu plus de monde dans les manifs pro Morsi toutefois elles sont insignifiantes par rapport aux anti Morsi.
[2 juillet, 23h] Good morning Revolution
Foules anti Morsi immenses partout. Les trois places où étaient appelé les égyptiens par Tamarod sont archi pleines. C’est toujours la fête. Feux d’artifice et immenses lettres lumineuses sur des immeubles place Tahrir avec écrit « Dégage » ou d’autres choses comme l’alliance de la croix et du croissant. Musique, chants, danses, les Égyptiens sont heureux. Le pouvoir, pour le moment, c’est eux, ni l’armée ni les Frères Musulmans [sic – NdJL]. Et c’est un monde heureux, de respect des autres, de fraternité et de solidarité où la ségrégation entre les sexes et les religions, les âges et les milieux, n’existe plus.
Je me demande s’il n’y a pas encore plus de monde dans les rues que les jours précédents, surtout en province et en particulier dans les petites villes. Les choses ont beaucoup changé en deux ans à la campagne, en particulier en Haute Égypte, la plus attardée politiquement, et là où il y a eu certainement le plus de transformations. Beaucoup ont été souvent aux manifestations à Tahrir et sont revenus avec cette expérience. Aujourd’hui, ils animent celles des provinces jusque dans les villages.
Ces manifestations ne sont pas indépendantes de la contestation économique. À la grande usine textile de Mahalla, il y aurait eu la semaine dernière plus de 200 débrayages. Et regardez ci-dessous la manif à Mahalla ce soir, la plus grande ville industrielle d’Égypte, 500’000 mille habitants, une véritable marée humaine, une immense manifestation ouvrière.
Il y a plus d’affrontements violents que hier mais toujours en marge des grandes manifestations. Il y en a eu dans les quartiers du Caire, à Imbaba, Dokki, Kit et Kat, Ben El Sarayat, université du Caire, 6 octobre, à Giza, à Minya où les affrontements auraient été les plus violents…
Il faut dire que les télés islamistes multiplient par cent ou plus les chiffres de participation à leurs manifs, ainsi à Rabbaa, où il y a eu une manif de 10 à 40’000 personnes, cela donne à la télé une manif de 4 millions. Ils donnent les noms et les adresses de leurs ennemis comme s’ils les désignaient à la mort. Les Frères Musulmans tiennent un langage de haine et de guerre civile, tout le contraire de ce qu’on voit dans les manifs anti Morsi. Ils ont déclaré la guerre. Les manifestants islamistes sont armés de pistolets mitrailleurs, revolvers, sabres et couteaux et n’hésitent pas à tirer dans le tas.
Quand ils sont attaqués, les anti Morsi ripostent comme près de l’université du Caire, où ils ripostent à l’arme automatique.
Jacques Chastaing
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[Prisonniers en lutte pour leur dignité] Mutinerie et féroce répression à la prison de Makala (Congo Kinshasa)
RDC : mutinerie à la prison de Makala, la situation reste confuse
En République démocratique du Congo, ce mardi 2 juillet, une mutinerie secoue la prison centrale de Makala, près de Kinshasa. Selon plusieurs témoins, des tirs ont été entendus sur place, la police et l’armée se sont déployées près du bâtiment où la situation reste très confuse.
Tout a commencé vers 4 heures du matin, avec l’arrivée à la prison de militaires et de policiers lourdement armés. Selon plusieurs sources, les forces de l’ordre et de sécurité ont eu pour mission de transférer des détenus, 16 au total, vers la prison militaire d’Ondolo, qui se trouve également dans la capitale.
D’autres détenus, en nombre assez important, se sont ralliés au groupe visé, pour empêcher qu’ils sortent de la prison centrale de Makala. Vers 7 heures, les policiers et les militaires ont alors usé de la force. Ils ont lancé des grenades lacrymogènes. Des coups de feu ont été entendus pendant longtemps.
Quand la tension a baissé, une ambulance a franchi la porte de la prison et n’en est pas encore ressortie à la mi-journée. Certaines sources parlent de morts et de blessés, mais aucun bilan n’est pour l’instant disponible.
Presse néo-coloniale (RFI, 2 juillet 2013)
RDC : une forte tension observée ce matin à la prison de Makala
Des dizaines d’éléments des Forces armées de la RDC (FARDC) et de la Police nationale congolaise ont été déployés mardi 2 juillet dans la matinée pour étouffer une tension observée à la prison de Makala à Kinshasa. Les habitants des quartiers situés dans le voisinage immédiat ont entendu des coups de feu. Les forces de l’ordre ont aussi lancé du gaz lacrymogène pour mater un soulèvement de détenus, créant une panique dans les quartiers environnants.
Jusqu’après 9 heures (heure locale), la tension était toujours forte à la prison centrale de Makala. Tout le périmètre de ce pénitencier était quadrillé. Personne ne pouvait accéder à la prison ni trainer dans ses environs.
Des policiers munis d’armes à feu et des lance-roquettes faisaient la patrouille en dehors de la prison tandis qu’à l’intérieur des dizaines de soldats FARDC accompagnés de certains officiers militaires tentaient de rétablir l’ordre.
Difficile de dire à l’heure actuelle avec certitude ce qui est à la base de cette tension. Mais des sources proches de cet établissement carcéral indiquent qu’il s’agit d’une révolte des détenus contre des mesures prises par l’actuel directeur de la prison, un colonel des FARDC. Des mesures que les détenus estiment qu’elles violent les droits des prisonniers, soulignent les mêmes sources.
Des sources officielles parlent d’un « simple contrôle de routine ». Aucune balle n’a été tirée, selon elles. Seul le gaz lacrymogène a été utilisé, précisent-elles.
C’est pour la deuxième fois en l’espace de deux semaines qu’un soulèvement des prisonniers est signalé à la prison centrale de Makala.
Presse pseudo-indépendante (Radio Okapi.net, 2 juillet, 2013)
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[Prisonniers en lutte pour leur dignité] Mutinerie et féroce répression à la prison de Xuan Loc (Vietnam)
Vietnam : émeute dans une prison contre les conditions de détention
Des prisonniers ont pris pendant quelques heures le contrôle d’une prison au sud du Vietnam dont ils ont pris en otage le directeur pour réclamer de meilleures conditions de détention, a indiqué la presse officielle lundi.
L’émeute a commencé dimanche matin dans la prison de Xuan Loc, dans la province de Dong Nai, près de Ho Chi Minh-Ville, où sont détenus des prisonniers politiques de premier plan, selon des blogs de dissidents. Quelques dizaines de prisonniers ont « détruit la prison » et pris le directeur en otage avant que les gardiens ne reprennent le contrôle dans l’après-midi, a précisé le quotidien Tien Phong, indiquant qu’un policier avait été légèrement blessé.
Presse carcérale (SudInfo.be, 1er juillet 2013)
(…) « Nous avons identifié quelque 40 prisonniers » responsables des violences et de la prise d’otage, « qui seront punis conformément à la loi », a déclaré le le lieutenant-général de la police Ho Thanh Dinh, cité lundi par le quotidien Thanh Nien.
Les troubles ont été provoqués « par certains prisonniers de premier plan », a-t-il encore indiqué, sans préciser s’il s’agissait de prisonniers politiques. Selon des blogs dissidents, le militant pro-démocratie Tran Huynh Duy Thuc, qui purge une peine de 16 ans de prison pour tentative de subversion du régime communiste, est notamment détenu dans cette prison.
Le Parti démocratique populaire du Vietnam, interdit par Hanoï, a de son côté indiqué par e-mail à l’AFP que des prisonniers politiques étaient à l’origine du mouvement destiné à dénoncer leur « traitement inhumain ».
Ces violences ont eu lieu quelques jours après la fin d’une grève de la faim de trois semaines du célèbre dissident Cu Huy Ha Vu. Condamné à sept ans de prison pour propagande contre l’État, il dénonçait lui aussi ses conditions de détention, dans un autre établissement. Vu voulait « montrer que même en prison, on peut se battre pour ses droits », avait alors déclaré son avocat Tran Vu Hai.
Presse carcérale (RTL.fr avec l’Agence Faut Payer, 1er juillet 2013)
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