[Chronique de Youv derrière les barreaux] « Dans l’après-midi, ils m’ont amené du renfort, un pote qui s’est fait attraper lui aussi avec un téléphone, il a pris quatorze jours. Nous voilà partis pour une nuit de « pipeletage », la misère se vit mieux à deux, c’est plus supportable avec un compagnon de galère. Toute la nuit, nous allons crier, chanter comme des ados jusqu’à l’aube. On finira bien par s’endormir de fatigue »

http://juralib.noblogs.org/files/2012/09/0513.jpg[Chroniques de mitard publiées du 7 au 11 septembre 2012]
Un dîner loin d’être parfait

18 heures mon estomac crie famine, j’ai déjà perdu deux kilos en huit jours dans ce trou à rats.

Menu du jour : Soupe aux choux et tripes d’agneau juste le nom donne envie de vomir. Je me demande qui mange ce genre de choses, c’est hallucinant, dégoûtant, répugnant !!! Une odeur pestilentielle se dégage de ce plateau repas.

Le maton me regarde avec un air de compassion, qui voulait dire sûrement « désolé je n’ai que ça » ou bien si j’ai mal interprété son regard il a dû vouloir me dire « t’avais qu’à pas faire le con ».

Mon ventre me disait prends, prends ! Ma tête et mon nez m’ordonnaient de ne pas y toucher. Et comme c’est ma tête qui commande, j’ai pas pris. Mon ventre et mon estomac m’en voulaient à mort.

Sur la table, il me restait une pêche de ce midi, une dosette de confiture. Tellement c’était petit, je crois que c’était des doses de nain. Il y avait aussi deux dosettes de sauce vinaigrette et un yaourt nature sucré, avec ça je devais me concocter mon festin de la soirée. Mais même Maïté ou un chef dix étoiles aurait pas pu réussir un tel pari où il fallait être magicien. Tellement j’avais la dalle, j’ai tout avalé, salé, sucré dans l’ordre dans lequel ils étaient disposés sur la table. J’ai bu un litre d’eau au jus de calcaire pour remplir mon ventre. Un dîner loin d’être parfait.

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Quel pervers a eu l’idée d’inventer la prison dans la prison ?

Il me reste six jours à tirer, au mitard, c’est pas la mort mais presque.

Dans l’après-midi, ils m’ont amené du renfort, un pote qui s’est fait attraper lui aussi avec un téléphone, il a pris quatorze jours. Nous voilà partis pour une nuit de « pipeletage », la misère se vit mieux à deux, c’est plus supportable avec un compagnon de galère. Toute la nuit, nous allons crier, chanter comme des ados jusqu’à l’aube. On finira bien par s’endormir de fatigue.

[La Chronique de Youv derrière les barreaux est disponible en téléchargement gratuit sur le site des Éditions Antisociales. Elle est à suivre sur le compte Facebook dédié.]

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