[Chronique de Youv derrière les barreaux] Partie 31 – « J’ai horreur des jeunes de cité qui pleurent et se lamentent sur leur sort »

Partie 31

La vie fait de nous ce qu’on mérite et dès notre plus jeune âge on était condamnés à l’échec, enfin c’est ce qu’ils nous faisaient croire, et à force de nous le dire on a fini par y croire, ils nous le répétaient tellement fort qu’on n’osait même pas rêver au-delà de nos tours HLM, le système n’était pas fait pour des jeunes qui n’acceptaient pas le rôle qui [leur] avait été attribué, du fin fond de ma cellule j’ai eu le temps d’analyser de comparer et ma conclusion est sans appel, 50 % des jeunes de ma cité avaient fait de la prison et pire encore, 60 % des jeunes diplômés issus de la cité pointaient au chômdu, comment ils ne voulaient pas que certains jeunes se dressent face [à] une telle tragédie ? Mais j’ai horreur des jeunes de cité qui pleurent et se lamentent sur leur sort, du style « on n’a rien pour nous » au contraire c’est en touchant le fond que tu es plus apte et plus revanchard, pour mettre une balayette à son destin qui était écrit avant même que tes parents décident de te concevoir, je me suis toujours battu contre les clichés et les idées reçues.

Si on lâche pas on aura tous une belle place dans la société, et moi j’irai la chercher avec les dents si il le faut, c’est vrai que j’ai mal commencé, je me suis trompé de feuille de route, comme si un p’tit renoi de cité pouvait faire tomber tout un système, je voulais diriger une armée, une équipe de mecs conscients, prêts à faire des trucs d’inconscients, avec le recul ce n’était qu’une utopie on avait le mérite de rêver et de vivre nos rêves, mais surtout d’assumer quand nos rêves tournent au cauchemar, mais le destin en voulait ainsi et qui dit que si j’avais été dehors j’aurais pas été pris par une envie de vengeance à faire une dinguerie qui m’aurait amené à prendre la perpète, ou me faire buter par la balle d’un traître quand je lui tournerai le dos, donc j’accepte mon destin et que Dieu me préserve et me fasse sortir sans séquelles SANS envie de revanche. La meilleure des revanches était de réussir ma vie faire taire les mauvaises langues qui disent qu’un youv finirait automatiquement ses jours entre quatre murs et quatre planches.

Je prends une énorme décision c’était de demander d’aller dans le Sud près de Delphine, elle avait passé près de cinq ans à venir me voir au parloir sur Paris, cinq ans fidèle comme mon ombre, je voulais lui faire la surprise et faire la demande sans l’avertir, mais la demande n’était pas gagnée, parce qu’avec mon dossier ils voulaient m’envoyer dans une prison sécuritaire, parce que me priver de liberté ne leur suffisait pas, ils voulaient me mater me corriger, l’administration ne supportait pas que j’avais toujours la tête haute ils auraient préféré que je me drogue aux cachets qui me tueraient à petit feu, j’aime trop la vie pour m’empoisonner, il était hors de question que sous prétexte que je suis en prison je devais me laisser aller, je devais tenir pour mes proches, et toutes les personnes qui m’attendaient, je leur devais de tenir bon et de ressortir en un seul morceau, c’était tous ces gens-là qui me faisaient tenir, l’espoir d’une vie meilleure celle que j’aurais toujours dû avoir. Dehors je n’ai jamais manqué de rien mais à quoi bon tout avoir si c’est pour vivre dans l’urgence ou que la prison me guette à chaque coin de rue.

Delphine a accueilli ma nouvelle avec des larmes d’émotion, elle me croyait pas capable de venir dans une prison du Sud que pour elle. Mais c’était à mon tour de lui prouver à quel point je tenais à elle. C’est dans l’épreuve que l’on voit ceux qui nous aiment et dans l’épreuve elle était là, elle avait signé présente la première je me devais de soulager ces déplacements, elle le méritait cent fois, j’étais dans l’angoisse de la réponse de la demande, en général quand tu demandais un endroit ils t’envoyaient à l’opposé. Par miracle ils ont fini par accepter ma demande de transfert dans le Sud, c’était la fiesta dans ma tête, le Sud le soleil SI SI mais j’avoue une prison reste une prison soleil ou pas, quand j’arrive dans le Sud ça m’a changé des pirates des prisons du Nord, Delphine enchaînait les parloirs elle était la plus heureuse et la voir heureuse me remplissait de joie.

QUAND ON AIME ON COMPTE PAS SI TU COMPTES C’EST QUE TU N’AIMES PAS !!!!!

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