« [Mohamed Merah] a un double visage. Il pouvait subitement changer de comportement. Il pouvait boire une bière et partir, deux minutes plus tard, en courant pour aller faire sa prière. »
Sans le savoir, Aïcha confirme les déclarations que nous avions recueillies en fin de matinée auprès de « proches » du jeune homme. (…) Mais pour Aïcha, c’est le frère de Mohamed, Abdelkader, qui est « le cerveau ». « C’est lui qui lui a bourré le crâne. C’est lui qui partait souvent à l’étranger, en Égypte. »
Le Télégramme, 21 mars 2012 à 23h50
Selon nos informations, le nom d’Abdelkader Merah, grand-frère du tueur présumé, apparaît en effet dans le dossier de la « Filière de Toulouse ». En 2009, des peines de six mois à six ans de prison avaient été prononcées par le tribunal correctionnel de Paris à l’encontre de six personnes accusées d’avoir mis en place une filière de recrutement et d’acheminement de volontaires à la guerre sainte en Irak. « À l’époque, Abdelkader Merah est passé entre les mailles du filet, confirme notre source. Mais il était très proche de ces gens-là. Il était surveillé par la DST. »
20 Minutes, 21 mars 2012
C’était le bureau de recrutement pour le djihad islamique. Le coup de filet effectué cette semaine par la sous-direction antiterroriste à Toulouse, en Ariège et en région parisienne a abouti hier à la mise en examen de six personnes. (…)
De lourds soupçons pèsent au contraire sur les six hommes mis en examen et habitant dans la région Midi-Pyrénées. Olivier Corel, un Français né en Syrie, qui habite à Artigat, dans l’Ariège, est suspecté d’être à la tête du réseau toulousain. Il est considéré par les policiers comme le chef idéologique des jeunes interpellés mercredi. Il avait visiblement une forte influence sur les autres membres du réseau, âgés de 25 à 30 ans. (…)
La filière toulousaine, elle, fonctionnait depuis plusieurs mois, et aurait recruté une dizaine d’apprentis djihadistes, dont certains auraient rallié la Syrie en bus. « Il y avait une première phase d’endoctrinement, explique un enquêteur. Puis, les jeunes étaient envoyés en Égypte, pour des séjours de plus en plus longs. » Une phase de préparation, plus dure, était ensuite organisée : stages sportifs, conditionnement à base de vidéos de combats de djihad. Les candidats djihadistes devaient compléter leur « formation » en Égypte, dans une école du Caire, avant d’atteindre l’Irak, via la Syrie.
La Dépêche du Midi, 18 février 2007
Parmi les huit hommes mis en examen, le cerveau du groupe, cheikh Olivier Qorel, 60 ans, Français d’origine syrienne, habitant Artigat, un village de l’Ariège. C’est lui qui convainc Sabri Essid, un compagnon de Barnouin, d’aller rejoindre ce dernier en Syrie, via la Bulgarie et la Turquie. « Tu retrouveras ta copine au paradis, mais avant vends ta voiture et règle tes dettes » lui enjoint Qorel.
Le Figaro, 28 mars 2007
Seconde étape, fin octobre 2007. Sur les six individus arrêtés à Toulouse et dans le Lot, deux sont mis en examen. L’un d’eux, désigné comme le « formateur » au combat est écroué, toujours dans le cadre de l’enquête des juges Coirre et Trévidic, sur les supposées filières irakiennes. Enfin, troisième volet de l’opération commencée en février 2007, l’interpellation, le 20 février 2008, à Toulouse de deux frères ayant fait des voyages religieux en Égypte [sans aucun doute Mohamed Merah et son frère Abdelkader Merah — NdJL], et d’une femme. Après 96 heures de garde à vue, l’un de ces Toulousains est mis en examen pour association de malfaiteurs.
La Dépêche du Midi, 20 mars 2008
Des peines de 6 mois à 6 ans de prison ferme ont été prononcées hier par la 14e chambre du tribunal correctionnel de Paris à l’encontre de huit jeunes de la région toulousaine pour avoir mis en place une filière de recrutement et d’acheminement de volontaires à la guerre sainte ou « djihad » en Irak. C’est moins que les deux à huit ans réclamés par l’accusation pour qui cette filière « incarne une nouvelle forme de terrorisme qui met en place les conditions permettant aux candidats djihadistes de basculer dans l’opérationnel ». Le Toulousain Sabri Essid, 24 ans, et l’Albigeois Thomas Barnouin, 28 ans, interpellés le 13 février 2007 à leur retour forcé de Syrie, ont été reconnus coupables d’association de malfaiteurs à visée terroriste et condamnés à 5 ans de prison dont un an avec sursis, assortis d’une mise à l’épreuve de 3 ans et de l’obligation de se soumettre à un stage de citoyenneté d’une semaine. Leurs co prévenus, un Marocain et cinq Français convertis à l’islam, ont été condamnés pour leur avoir fourni un soutien logistique ou financier. Fabien Clain, considéré par l’accusation comme l’un des organisateurs, a été condamné à cinq ans ferme. Arrivé libre au tribunal, il en est reparti les menottes aux poignets. Son avocat Me Grégory Saint-Michel a aussitôt annoncé son intention de faire appel. Six ans ont été prononcés contre Mohamed Megherbi, qui s’était défendu sans avocat. Anouar el Madhi a écopé de 30 mois dont 24 avec sursis assortis de 5 ans d’interdiction de séjour sur le sol national. Contre Miloud Chachou, qui pourrait avoir disparu en Irak, 5 ans ferme ont été prononcés avec maintien du mandat d’arrêt. Les armes et la documentation islamiste radicale qui avaient été découvertes et placées sous scellés demeurent confisquées.
Les avocats regrettent, pour leur part, « la position très conservatrice du tribunal devant une accusation mal étayée ».
[On peut déduire, par élimination, qu’Olivier Corel, dont le nom n’apparaît pas dans la liste des condamnés ci-dessus, n’a donc écopé que de six mois de prison, ce qui est — on en conviendra — particulièrement clément quant à celui qui est supposé être le « chef idéologique » ayant « une forte influence sur les autres membres du réseau » ! — NdJL]
La Dépêche du Midi, 10 juillet 2009
D’habitude, les Corel ne sortent pas de leur hameau isolé. À Artigat, dans l’Ariège, on ne les voit presque jamais. Ni au bar ni à la supérette. Dans ce village où l’on a pendu Martin Guerre, un étranger éveille vite le soupçon. Mais pas les Corel. Un couple très discret. Jusqu’au raid lancé cet hiver, à l’aube, par une armée d’agents cagoulés, de gendarmes et chiens renifleurs. Un coup de filet mené conjointement à Toulouse, Bruxelles et en Île-de-France. Corel, lui, est placé sous contrôle judiciaire et mis en examen pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste ». Que lui reproche-t-on ? Les enquêteurs le considèrent comme le chef d’une filière d’acheminement de djihadistes de la France vers l’Irak. Sous son influence, trois Français seraient partis en guerre contre l’Amérique. Deux d’entre eux ont été arrêtés en Syrie, au moment où ils s’apprêtaient à franchir la frontière irakienne. Le dernier a disparu. Dans des testaments, ils disaient vouloir « mourir en martyr ». Grand, élancé, la barbe blanche, Olivier Corel est une sorte d’émir échoué dans l’arrière-pays ariégeois. Comme son épouse, il est né en Syrie. À Talkalakh, il y a soixante et un ans. À l’époque il s’appelait encore Abdullah. Devenu français, il dirige depuis quinze ans un groupe de néoruraux musulmans. Zone de recrutement : la région toulousaine. (…) Ce sont de jeunes maghrébins réislamisés, ou des « Gaulois » convertis, souvent ex-petits délinquants « sauvés » par la religion. Sabri, mais aussi Thomas, Imad, Mohamed [Merah ? — NdJL], Stéphane, passent des heures à consulter des sites internet où des djihadistes français racontent leur expérience en Irak. Ils rêvent d’aventure, de sacrifice. À Artigat, ils tombent sous le charme d’Olivier Corel, le salafiste. Ce dernier fait office d’imam. Les exhorte-t-il à la guerre sainte au cours de ses prêches ? Tous ne sont pas des candidats au départ. Certains membres de la communauté pratiquent la poterie ou vendent des fripes sur les marchés. La face inoffensive du groupe ? Une voisine se souvient en tout cas des « cris de joie des mômes le 11 septembre ». Elle poursuit : « Vers la fin, on a senti une radicalisation. Plein de gens débarquaient avec des tenues repérables à cent lieues. » Le hameau devient un centre de pèlerinage, surtout les jours d’Aïd. Les parents retirent leurs enfants de l’école, trop laïque à leur goût. Les femmes arborent « le tchador ». Les gendarmes connaissent bien la communauté. Les RG de Foix également. Tous les services défilent. Dans les bois alentour, des chasseurs tombent sur des « guetteurs avec des jumelles ». Les téléphones sont sur écoute. « Il y a des kilomètres de littérature sur chacun de ces gars-là », indique un enquêteur. La police les observe comme des poissons rouges dans un bocal. (…)
L’Irak sert de moteur, de force d’attraction à ces nouveaux fanatiques. Depuis 2003, une soixantaine d’entre eux y sont partis. Une dizaine y ont trouvé la mort, dont au moins deux lors d’attaques suicides. D’autres ont carrément disparu. D’autres, enfin, sont parvenus à rentrer au pays. Aujourd’hui, une trentaine d’entre eux sont incarcérés dans les prisons de l’Hexagone. Pour tous, une seule plaque tournante, la Syrie.
Le Nouvel Observateur, 22 juin 2007
Olivier Corel avait en fait carrément « bénéficié » d’un non-lieu, sans même avoir été défendu par Me Assous ! (cf. ici : https://juralib.noblogs.org/2012/03/23/antiterrorisme-les-mensonges-de-la-dcri-1/)