[Chronique de Youv derrière les barreaux] « Il suffit d’une boîte 6 et d’un extincteur à poivre lacrymogène pour monter sur un Brink’s »

http://juralib.noblogs.org/files/2012/09/0513.jpg[16 mars 2012]
Partie « sombre »

« SOMBRE »

Je ne suis pas sûr que la nuit porte conseil, moi je dirais plus qu’elle engrène, sombre comme ma peau, si tu insultes ma mère investis sur des vitres teintées, combien de fois je me suis retrouvé au volant d’un quatre roues motrices accompagné de deux fous alliés vénères motivés pour corriger une imitation kainri, la violence était mon meilleur ami, c’est un bon serviteur mais un mauvais maître, je compte plus mes gardes-à-vue à manger des sandwichs, en manque de calcium, quand tu dormais on était du bon côté du fusil à pompe, car c’est là que tu as une meilleure vue pour observer les feux d’artifice à vos marques prêts feu tirez ! On a tiré en sens interdit sur la BAC Sarko n’était pas encore actif l’essentiel c’est d’assumer, car tu passes vite de la fiction à la réalité, il suffit d’une boîte 6 et d’un extincteur à poivre lacrymogène pour monter sur un Brink’s.

L’insouciance m’a fait plonger au milieu des requins marteaux, ce que j’y ai vu m’a assommé, une pièce de théâtre à l’état pur ! Ça sniffe, ça boit des épinards pour être fort comme Popeye, à minuit Cendrillon rentre chez elle avec sa paire d’Air Max, impos­sible de trouver son soulier de verre en 2012 elle a serré ses lacets. La nuit les ghetto youth sont des vampires, à cinq sur un képi en civil qui a joué le justicier quand on a plié cette portière, je me méfie même de mon ombre car la nuit elle n’est plus sur mon dos. Enfant de pauvres je kiffe le luxe, je rêve de faire des roues arrière dans le salon de Louis Vuitton, ligoté sur le lustre à cinq chiffres. Le périph’ a accouché des milliers de courses-poursuite, gyrophare, alcoolisé t’as tué tous tes occupants rescapé ta douleur sera pire qu’une mort, tu aimes ta mère mais tes bras elle ne les connaît pas. Wesh !

Mon texte est sombre comme une nuit à Gaza, si tu n’y comprends rien c’est normal ma plume est vénère, donc recule s’il te plaît ou laisse-toi faire, laisse-toi guider et cherche pas d’histoire, c’est une gifle littéraire, autodidacte qui m’aime me suive, j’ai plié en deux les traditions françaises comment un renoi du ghetto ose toucher à leur grammaire, des barres de rire, moi j’ai pas de sang sur les mains, mais les mains remplies de sang et j’écris les larmes des miens pas pour divertir mais pour avertir, j’ai pas mis la cagoule comme un déguisement d’Arlequin, je me répète marche droit on rigole mais on ne plaisante pas, ou dors avec ton gilet pare-balles, j’ai appris à faire des pâtes à la chauffe à l’huile, quand je mangeais mon plat il avait le goût du pétrole, j’ai explosé tous les radars on m’a flashé tellement mon texte est sombre comme l’enterrement d’un pote, je veux du raliss je veux aussi le mafé de ma daronne, on peut pas tout avoir faut faire un choix, j’ai mis un procureur dans le coffre de ma voiture, dans mes rêves au réveil pieds poings liés accusé d’un crime que je n’avais pas commis, nos daronnes se disent bonjour à dix kilomètres à la ronde mais le cœur y est.

Les CRS m’ont lavé [au] lacrymogène en 1997 donc c’est normal qu’en 1998 que j’ai fait un méchoui au cocktail Molotov quand je les ai revus dans ma cité, j’ai nié les faits dans le doute il m’ont lâché, on a mangé pendant dix ans des grecs-frites au chat sans même [s’en] rendre compte, c’est peut-être pour ça que certains dans des cambriolages ne faisaient aucun bruit en longeant les gouttières, quand tu dormais je comptais mes péchés plié en quatre dans un buisson à l’affût de la moindre recette, on allait en équipe à la mosquée, à peine nos baskets enfilées on sautait le bosquet pour tout niquer, infatigables on se reposera une fois morts se disait-on, dans mon jardin secret j’ai planté tous mes souvenirs, la nostalgie m’a puni car beaucoup manquent à l’appel on est condamné à vivre sans eux.

[La Chronique de Youv derrière les barreaux est disponible en téléchargement gratuit sur le site des Éditions Antisociales. Elle est à suivre en direct sur le compte Facebook dédié.]

Ce contenu a été publié dans Beau comme une prison qui brûle, avec comme mot(s)-clé(s) , . Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.