[Algérie] « Rien à foutre du vote, rendez des comptes »

Des tags muraux à défaut d’affichage à Tlemcen

Une semaine après le début de la campagne électorale, les panneaux d’affichage réservés aux listes des candidats aux élections locales sont encore vides. Absence de moyens financiers ou manque de motivation des partis politiques engagés ?

Toujours est-il que face à ce vide, certains citoyens ont trouvé la parade pour exprimer leurs opinions sur les élus actuels et les futurs candidats en ayant recours aux tags. Les murs de plusieurs institutions publiques et autres administrations sont devenus les « panneaux » de prédilection des tagueurs qui opèrent généralement la nuit pour apposer leurs slogans avec des bombes de peinture. Certains slogans sont vulgaires mais d’autres sont pleins de sens, se voulant surtout dénonciateurs de la « corruption et la dilapidation des deniers publics » à l’égard de tel ou tel responsable tout en les nommant succinctement mais exprimant aussi un ras-le bol d’une certaine frange de la société par rapport à la gestion des collectivités locales par les élus.

On peut lire sur les murs de la DLEP par exemple « … 200 millions pour avoir un marché, taklou errahj » (Mangez du poison), ou sur ceux de la mairie « Win trouhou ya li chrabtouna eddam  win trouhou » (Pas de fuite pour les successeurs de sang), « El vote ma aàndna mandirou bih, khassna el mouhassaba » (On a rien à faire avec le vote, rendez des comptes). À défaut d’avoir un cadre pour porter leurs messages aux gouvernants, certains ont eu recours de plus en plus à ce moyen d’expression.

L’analyse de ces slogans prouve que les citoyens sont au fait de tout ce qui touche à la gestion de leur collectivité. D’autres tags fustigent directement certains élus « Enchoufouhoum ghir enhar el vote » (Ils ne se manifestent que lors des scrutins), « Lamyar entàa chkara ma aàndna ma endirou bihoum » (On a rien à faire avec des maires corrompus), « Kil el barah ki el youm ezzawali gaad zawali wa député yedi 40 mallione » (Rien n’a changé pour les pauvres, alors que le député gagne 40 millions de centimes).

Cela prouve à quel point la confiance est rompue entre le citoyen et l’élu et à quel point les élections perdent au fur et à mesure de leur crédibilité, d’autant plus que les partis politiques ne font rien pour le sensibiliser et le convaincre du changement. La politique a horreur du vide et le spectre de la forte abstention plane sur ces élections locales qui ne semblent intéresser personne.

Leur presse (B. Soufi, letempsdz.com, 10 novembre 2012)

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