[Chronique de Youv derrière les barreaux] « Rappelle-toi des batailles de neige que l’on faisait en bas du hall de la cité les petits contre les grands mais comme on n’avait pas de boules de neige on faisait la guerre à coups de pierres »

http://juralib.noblogs.org/files/2012/09/0513.jpg[20 février 2012]
Partie lettre à mon frère

MON FRÈRE,

Cette fois-ci c’est la bonne je suis parti pour un bon moment je t’écris cette lettre pour que tu retrousses tes manches et que tu prennes les rênes de la famille en mon absence.

Tu as sept sœurs et un petit frère à sauvegarder, veille sur eux prends soin d’eux car ils auront besoin de toi car là je suis parti pour un long périple derrière les barreaux.

J’assume mes erreurs mais Dieu merci tu ne marches pas sur mes pas j’ai jamais été un exemple pour quiconque encore moins pour toi.

On se connaît à peine car j’ai passé la plupart de mon temps entre les terrains de foot et les cours de promenade de Bois-d’Arcy.

Quatre ans nous séparent trop jeune pour comprendre ton grand frère agité pendant que je pillais les banques toi tu te prosternais pour t’offrir une place au paradis.

Je pensais me sacrifier pour les nôtres alors que mes actes alourdissaient notre fardeau déjà trop lourd ne t’inquiète pas pour moi, peu importe le temps et la peine qu’ils m’infligeront je resterai solide intact bats-toi pour la mama sèche ses larmes même avec les manches de ton pull ta tâche est lourde frangin mais tu en es plus que capable.

Rappelle-toi des batailles de neige que l’on faisait en bas du hall de la cité les petits contre les grands mais comme on n’avait pas de boules de neige on faisait la guerre à coups de pierres. Tellement on avait de l’imagination on se prenait des pierres dans la figure en étant persuadés que c’était des boules de neige. J’ai voulu vivre mes rêves mais dur a été mon réveil ça fait plus d’un mois que je suis incarcéré pour les raisons que tu sais. Rien de nouveau tu as l’habitude mais peu importe assume ton rôle à plein temps fais les choses bien.

Les voitures qui étaient dans le 31 je les ai laissées à Delphine et ce que tu as entre les mains te revient de droit j’ai même pas fait trois mois dehors une brève escale à la maison on se croisait en silence trop pressé dans ma tête à répondre à l’appel du brolique du haram je te glissais un billet par-ci par-là pour ne pas que tu embrasses le chemin du sheytan je suis ton aîné donc je me devais de te montrer comment slalomer entre les hypocrites les mythos les jaloux dans la cité mais j’étais trop occupé à construire mon pseudo-empire je t’ai mis de côté je t’ai rien inculqué. Je me suis cassé le dos pour glorifier notre nom dans la banlieue et qu’ils nous respectent je pense que à ce sujet-là je réussis mon taf mais je n’ai pas été à la hauteur des valeurs de nos parents je m’en rends compte un peu tard frangin assis dans ma cellule ma lettre en guise de reconnaissance de dette. Demande à faire le permis pour que l’on se dise enfin ce qu’on n’a jamais pu se dire auparavant je suis tombé pour la énième fois je ne suis pas mort caractère chaud bouillant je démarre au quart de tour trop ambitieux pour ma petite tête voilà où ça m’a mené.

Prends soin des nôtres frérot fais pas les mêmes erreurs que j’ai fait avec toi avec ton petit frère parle-lui évite-lui les chemins semés d’orties facilite-lui la vie mets-le à l’abri mais ne lui cache rien car tout se sait.

Sur ce je t’embrasse frère sûrement à bientôt au parloir.

Ton frère

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