[Chronique de Youv derrière les barreaux] Partie 40 – « Je m’inspire de mon vécu, j’ai pas besoin de lire leurs bouquins falsifiés »

Partie 40

Je m’inspire de mon vécu, j’ai pas besoin de lire leurs bouquins falsifiés, j’ai tenu des conversations avec des soi-disant bac + 5 + 7, moi avec mon bac – 6 – 7 j’avais beaucoup plus de vocabulaire, l’expérience de ma vie m’a apporté plus que les bancs du collège, mais j’avoue que parfois au mitard j’ai triché, j’ai ouvert et lu pas mal de livres qui m’ont apporté, enrichi, perfectionné mes connaissances, mais j’ai surtout appris avec les gens, des anciens, les expériences de chacun, j’ai tiré du pire et du meilleur dans les différentes rencontres de ma vie, même le pire de mes ennemis m’avait apporté méfiance et vigilance, avant je vivais avec beaucoup d’a priori, tous les mecs n’étaient pas purs et durs, made in cité, je pensais qu’ils ne pouvaient rien m’apporter on ne parlait pas la même langue, on ne venait [pas] des mêmes endroits et je pensais qu’ils ne pouvaient pas me comprendre, alors que plus tard, les plus grosses connections, se sont faites au-delà des murs de Mantes-la-Jolie, j’ai connu des mecs qui au premier abord même pas tu les regardes tellement ils sont d’une banalité alors que le shit que tu fumes venait de lui, l’arme avec laquelle tu le braques venait de lui, il vivait à l’ombre du showbusiness, je juge plus les gens au premier abord mais au deuxième LOLL, j’avais encore beaucoup à apprendre de la vie.

Ça me rappelle une anecdote 2001, Kamel et moi, étions suragités à l’affût de la moindre embrouille, ce jour-là nous étions au pied des immeubles quand un mec arrive en voiture immatriculée d’un autre département, était sorti, nous a lancé un regard froid, ça nous a pas plu, le temps qu’il monte chez la personne qu’il était venu rendre visite, on a désossé sa voiture, il ne restait plus que la carcasse, quarante requins, chacun a démonté ce qui l’intéressait, quand le mec est redescendu, il a vu rouge, mais le pire dans cette histoire c’est qu’il était venu voir un grand de la cité, laisse tomber les regards se sont portés direct sur moi, ça a haussé le ton, à la limite d’en venir aux mains, il m’en a pas fallu plus pour sortir les armes, Kamel et moi cagoulés et armés sommes venus demander des comptes à l’ancien, son discours avait changé mais tout s’est arrangé à l’amiable vu qu’on venait du même quartier, mais la rumeur a fait le tour du Val-Fourré que j’avais encore braqué un mec, tout le monde savait qu’on était armés.

Kamel et moi, étions dans un café du quartier on s’est mis à la table de frères musulmans avec lesquels on avait grandi, mais moi qu’ils faisaient la prière ou pas, mon attitude envers eux n’a pas changé, je les voyais comme des mecs avec qui j’avais grandi, on s’est mis à discuter de tout et de rien, j’ai bien remarqué que la discussion était tendue, qu’il y avait un truc qui n’allait pas, le frère mus m’a dit : « Oumar j’ai besoin de toi j’ai appris que t’avais des armes, j’ai un problème peux-tu bouger pour nous ? », j’ai regardé Kamel qui d’un hochement de tête m’a fait comprendre qu’il était opé, du coup j’ai donné mon accord au frère mus, tout ça m’a semblé chelou mais bon je voulais rendre service à des amis d’enfance, le frère mus, Kamel et moi sommes montés dans ma voiture direction l’armurerie (endroit où l’on stocke les armes), j’étais au volant de ma voiture, Kamel passager et le frère mus derrière, je sentais qu’il se passait un truc pas normal pas logique, parce que je connaissais ces frères mus ils étaient surarmés, et n’avaient pas besoin de deux jeunes à peine majeurs pour régler leur problème, arrivés à l’armurerie, cinq voitures remplies de frères mus sont sortis et nous ont braqués Kamel et moi on n’a rien compris, parce qu’on les connaissait tous, les frères mus voulaient absolument voir où on cachait nos armes, dans un premier temps, c’est parti en couille, Kamel et moi poussés par l’inconscience de notre jeune âge, on a rebellé alors que nous étions plus que vulnérables mais face à nous, on avait dix frères mus déterminés du coup je suis parti avec les frères avec qui j’avais grandi jusqu’à la porte de l’armurerie, c’était trop tendu, on a failli se taper plus d’une fois, tellement je parlais mal avec ma bouche, j’ouvre, il examine mes armes, une par une puis se retourne vers moi puis me serre dans ses bras, l’émotion l’a envahi, il me dit « JE SAVAIS QUE C’ÉTAIT PAS VOUS », j’ai appris plus tard que les frères, avaient été cambriolés et ils avaient perdu un stock important d’armes et des mauvaises langues avaient dit que c’était forcément moi pour se faire pardonner, les frères nous ont donné deux 11.43 (arme de voyou) j’avais trop le seum, je voulais pas lâcher l’affaire mais ils avaient de la chance que c’était des frères mus, mais bon j’ai vite passé l’éponge, on avait d’autres chats à fouetter, mais faut reconnaître qu’on a eu très très chaud ce jour-là, on s’attendait pas du tout à ce genre de scénario.

Assis sur une chaise, dans ma toute petite cellule, j’ai refait le monde plus d’une fois, j’ai l’impression de raconter la vie d’un autre tellement ça me paraît loin, mais mes années de prison et mes cicatrices témoignent bel et bien que c’est ma vie que je raconte, la route fut longue, jusqu’en 2011, ma vie a pris un autre tournant, vivement la LIBERTA, l’air pur me manque follement.

ON DIT QUE TOUT VIENT À POINT À QUI SAIT ATTENDRE DONC J’ATTENDS MAIS ÇA A INTÉRÊT DE VENIR À POINT LOLLLL.

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