[Charest dégage !] La bataille de Victoriaville

Québec : le congrès du parti au pouvoir perturbé par la fronde étudiante

Jets de projectiles par des manifestants, largage de gaz irritants par la police anti-émeute, foule en panique, heurts, interpellations : le congrès du parti au pouvoir au Québec a été marqué vendredi du sceau de la contestation étudiante.

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Policiers omniprésents, dans les rues jusqu’au toit d’un hôtel, commerces fermés, afflux massif de manifestants : la paisible Victoriaville était le théâtre, bien malgré elle, de heurts entre forces de l’ordre et manifestants.

« Colère générale contre le Parti libéral » du Québec (PLQ), ont scandé plus de 2.000 manifestants venus de toute la province francophone, réunis dans le parking de la succursale locale du géant américain de la distribution WalMart, qui avait fermé ses portes à la mi-journée avant le début de la grand-messe annoncée.

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Les manifestants ont marché pacifiquement sur un peu moins d’un kilomètre pour arriver au Centre des congrès de cette petite ville de 42.000 habitants, située à 170 kilomètres à l’est de Montréal. Peu avant l’arrivée, des manifestants se sont masqués le visage laissant présager la valse à suivre.

Des protestataires ont lancé des projectiles et des pétards sur le Centre des congrès où le PLQ tient son conseil national ce week-end, fracassé une fenêtre et déplacé les barrières métalliques qui protégeaient le bâtiment, selon un journaliste de l’AFP sur place.

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Plusieurs dizaines de policiers anti-émeute ont répliqué avec des gaz irritants et chargé la foule pour tenter de rétablir l’ordre, sous le regard des délégués du PLQ observant la scène depuis l’intérieur de l’édifice. Les policiers ont interpellé des manifestants dont certains ont été blessés.

« Ce sont des gens qui n’ont aucun respect pour la démocratie… Ce ne sont pas des gestes intelligents », a déclaré à l’intérieur du centre le député libéral Pierre Moreau, au sujet des contestataires.

Le Parti libéral du Québec, au pouvoir depuis neuf ans dans la province francophone de huit millions d’habitants, est confronté depuis près de trois mois à une fronde sans précédent de mouvements étudiants opposés à la hausse des droits de scolarité.

Le Premier ministre Jean Charest a décrété une hausse de 75% sur cinq ans (1.625 dollars, 325 dollars/an) des droits de scolarité à l’université afin de les ramener à 3.800 dollars, soit plus près de la moyenne nord-américaine.

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« Je me bats pour ce que je crois et je crois en la gratuité scolaire », a lancé Antoine Perreault, 18 ans, écharpe rouge, casquette vissée sur ses cheveux bruns en bataille. Cet étudiant en musique au Cégep (lycée, ndlr) d’Alma a fait plus de 300 kilomètres en auto-stop pour participer à la manifestation de Victoriaville qui pourrait s’étirer sur tout le week-end.

« Je ne sais pas où je vais dormir », a-t-il ajouté. Les rares hôtels de la ville affichent complets et les chambres étaient de toute façon trop onéreuses pour ces étudiants. « Moi, j’héberge des jeunes chez moi », assure Luc, un père de famille.

Quelque 170.000 étudiants étaient toujours en grève début mai au troisième mois de ce mouvement de contestation ponctué de manifestations et de heurts entre forces de l’ordre et étudiants.

Jusqu’à présent, M. Charest a opté pour la ligne dure, ce qui semble lui avoir bénéficié. Selon un sondage publié vendredi, sa formation aurait la chance de remporter une quatrième victoire consécutive si des élections anticipées étaient déclenchées.

« Charest ! » « Charest ! », « Charest ! », ont crié à tout rompre les 600 délégués du parti à l’annonce de la présence, sur fond de musique rock, du Premier ministre dans la salle du conseil national.

Leur presse (tempsreel.nouvelobs.com, 5 mai 2012)


Victoriaville : une dizaine de blessés, une centaine d’arrestations

La manifestation qui a eu lieu devant le centre des congrès de l’hôtel Le Victorin de Victoriaville, où se tient le conseil général du parti libéral, s’est terminée vendredi vers 21h après près de trois heures de violents affrontements. Au total, 106 personnes ont été arrêtées. Plusieurs personnes, dont quelques agents de la Sûreté du Québec, ont été blessés. Un policier a notamment été sévèrement tabassé alors qu’un étudiant du cégep Saint-Laurent a dû être hospitalisé d’urgence après avoir reçu ce qui semble être une balle de caoutchouc en plein visage.

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La porte-parole de l’Hôtel-Dieu D’Arthabaska a confirmé que l’étudiant du cégep Saint-Laurent souffre d’un traumatisme crânien. Selon ce qu’a confié une de ses amies à La Presse, il craint de perdre un œil. La victime, qui est membre de l’association étudiante de son cégep, a été transportée en ambulance à l’Hôtel-Dieu D’Arthabaska.

Son cas étant jugé trop sévère, il a rapidement été transféré au Centre hospitalier régional de Trois-Rivières, où il était toujours en observation durant la nuit. Selon nos informations, la balle de caoutchouc aurait été vraisemblablement tirée par un policier de la Sûreté du Québec.

Une porte-parole de l’hôpital Hôtel-Dieu D’Arthabaska a confirmé à La Presse que quatre personnes ont dû être traitées à l’urgence. Selon la Sûreté du Québec, quatre policiers et sept manifestants ont été blessés. Leur vie n’est pas en danger. Un ambulancier bénévole, Steve Archambault, affirme être venu en aide à au moins dix personnes. Parmi les cas qu’il a traités : des tympans perforés et une oreille presque entièrement sectionnée.

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Autobus interceptés

La SQ avait procédé à quatre arrestations, avant d’intercepter, vers 22h30 un autobus complet qui avait quitté la manifestation un peu plus tôt. Le véhicule a été escorté jusqu’au poste de police de Victoriaville. Selon nos informations, ses passagers sont notamment des étudiants des universités McGill et Concordia.

Un peu avant minuit, deux autres autobus ont été interceptés sur la route 116 près de Saint-Hyacinthe. Leurs occupants ont été amenés dans des postes de la SQ où ils ont été interrogés au cours de la nuit.

Une centaine d’entre eux devront faire face à des accusations d’attroupement illégal et de participation à une émeute.

Au total depuis vendredi soir, 106 personnes ont été arrêtées.

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Des casseurs rapidement en action

Les manifestants « se sont présentés dans un premier temps de façon paisible », rapporte le capitaine Jean Finet de la SQ. Selon son interprétation, une « vingtaine de casseurs » ont perturbé la manifestation vers 18h30 en lançant des projectiles. « Ils étaient habillés en noir et portaient un sac à dos, un foulard et des lunettes de ski. Nous ne pensons pas qu’il s’agissait d’étudiants. »

Ces individus ont facilement renversé la clôture érigée devant l’hôtel Le Victorin, où se réunissait le Parti libéral du Québec. La SQ pense qu’il aurait été malavisé d’utiliser une clôture plus imposante. C’était pour ne pas empêcher les gens de manifester, se défend M. Finet.

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« Ce qu’on trouve dommage, c’est que les manifestants n’ont pas pu exercer ce droit […]. La SQ ne ménagera pas ses efforts afin de retrouver les auteurs de ces crimes. »

La SQ n’a pas mis de temps à déclarer le rassemblement illégal et à demander à la foule de se disperser. Voyant que des centaines de protestataires, dont plusieurs sont masqués portent des lunettes de ski, n’obtempéraient pas, ils ont lancé des dizaines de grenades assourdissantes et utilisé du gaz irritant à profusion.

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La Sûreté du Québec (SQ) a utilisé « quelques armes d’impact », dont des balles de caoutchouc, mais elle estime être intervenue « rapidement », avec « professionnalisme et rigueur », soutient le capitaine Jean Finet. Selon lui, des manifestants ont été blessés par des projectiles lancés par d’autres manifestants avant que ces armes ne soient utilisées.

Quelques milliers de personnes ont alors quitté les lieux. Les manifestants les mieux équipés se tenaient quant à eux très près du cordon policier et lançaient des projectiles aux agents. D’autres couraient régulièrement se réfugier derrière une maison située en face de l’hôtel le temps de s’organiser et revenaient à la course. À certains moments, l’air était si chargé qu’on ne voyait pas à 10 mètres devant soi. La ventilation de l’hôtel a même été fermée à cause des gaz à l’extérieur, de quoi retarder le discours de Jean Charest.

« C’était une tactique pour nous faire fuir », croit Viviane Bossé, étudiante au cégep André-Laurendeau, qui s’est rendue à Victoriaville pour montrer sa colère. Si elle déplore que des manifestants aient lancé des projectiles aux policiers, elle estime que l’usage de grenades assourdissantes était prématuré.

Pour des raisons de sécurité, la Sûreté du Québec a fermé la route 116 dans les deux directions à la hauteur du centre des congrès.

Rappelons que le rassemblement à Victoriaville était organisé par la Coalition opposée à la tarification et à la privatisation des services publics. Plusieurs étudiants participaient également à l’événement pour dénoncer la hausse des droits de scolarité.

Inquiets de la tournure des événements, plusieurs commerçants avaient décidé de fermer leurs portes pour la journée. D’autres avaient carrément placardé leurs fenêtres pour éviter d’être victimes de vandalisme.

Du côté de Montréal

Pendant ce temps à Montréal, quelque centaines de manifestants marchaient pour un 11e soir consécutif. Comme chaque jour, le départ de la manifestation a été donné vers 20h30 à la place Émilie-Gamelin.

Les manifestants, qui marchent entre 15 et 20 kilomètres par événement, ne donnent jamais leur trajet à l’avance. Mercredi, ils ont rendu une visite surprise au premier ministre Jean Charest dans Westmount. Jeudi, ils sont allés crier et lancer des pétards sur la rue où vivent le maire de Montréal et le chroniqueur Richard Martineau dans Outremont. Il n’est pas clair, qui était leur cible, mais des slogans « anti-Martineau » ont été scandés.

Leur presse (LaPresse.ca, 5 mai 2012)


Un manifestant entre la vie et la mort

(Victoriaville) Les médecins craignent pour la vie d’un manifestant qui a participé à l’émeute qui a eu lieu à Victoriaville vendredi soir. Celui-ci aurait subi un traumatisme crânien lors de la manifestation qui s’est déroulée devant l’hôtel Le Victorin où se tient le congrès général du Parti libéral du Québec.

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Josée Simoneau, la directrice du Centre de santé et des services sociaux d’Arthabaska-et-de-l’Érable, a affirmé, lors d’un point de presse samedi matin, que le manifestant aurait reçu un projectile à la tête. Elle a indiqué qu’il pourrait s’agir d’une boule de billard, d’un morceau d’asphalte ou d’une balle de caoutchouc. Ces dernières sont utilisées par les policiers pour éloigner les fauteurs de trouble.

Le patient a été admis à l’Hôtel-Dieu d’Arthabaska. Il a par la suite été transféré dans un centre hospitalier à Trois-Rivières, étant donné la sévérité de son cas. Il a été impossible de connaître l’âge de la victime et son origine.

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Deux autres manifestants ont aussi subi des traumatismes crâniens « sévères ». Ils ont également été transférés dans un autre centre hospitalier, mais on ne craint pas pour leur vie.

En tout, ce sont neuf personnes qui ont été blessées hier lors de la manifestation qui a tourné au vinaigre. Les trois victimes de blessures à la tête sont toujours à l’hôpital, un patient attend de voir un spécialiste et les autres ont quitté après voir reçu les soins pour traiter des blessures mineures. Parmi eux figurent trois policiers de la Sûreté du Québec.

110 arrestations

Par ailleurs, les policiers ont procédé à l’arrestation de quatre personnes durant l’émeute. Plus tard, lorsque les autobus des manifestants ont quitté Victoriaville, trois d’entre eux ont été interceptés. En tout, 106 passagers se trouvaient à bord. Ils ont tous été mis en état d’arrestation.

Trois récidivistes qui avaient déjà été arrêtés dans des attroupements illégaux ou des émeutes devaient d’ailleurs comparaître ce samedi matin. Les autres ont tous été relâchés sous promesse de comparaître.

Les accusations auxquelles feront face les suspects vont d’agression armée à entrave au travail des policiers, en passant par attroupement illégal.

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Le capitaine Jean Finet, porte-parole de la Sûreté du Québec, assure que tout a été mis en oeuvre pour assurer la sécurité des manifestants, des citoyens et des congressistes. « Malheureusement, un groupe d’individus, qui visiblement n’avait pas l’intention de manifester, mais plutôt de commettre des actes criminels, a rapidement et malgré les nombreux avertissements fait tomber le périmètre, la clôture, la ligne à ne pas franchir », a-t-il déclaré.

Le maire de Victoriaville a partagé cet avis. « C’est inadmissible que de gens aient été blessés alors qu’ils voulaient manifester pacifiquement », a dit Alain Rayes. Le maire de Victoriaville, Alain Rayes, s’est néanmoins dit heureux de constater que peu de dégâts matériels aient été recensés dans la ville, mis à part le secteur du Palais des congrès. (…)

Leur presse (Émilie Bilodeau, LaPresse.ca, 5 mai 2012)

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