De l’épouvantail terroriste à l’invisibilité du terrorisme d’État

À propos d’une conférence à Lille 2 – « L’Europe face à la menace terroriste »

Une conférence sur « l’Europe face à la menace terroriste » était organisé aujourd’hui à Lille 2. Réunissant des expertEs en la matière, nous nous sommes invités pour une petite distribution de tracts à l’entrée. Cela n’a pas raté, la diffusion a été écourtée. Le texte constitue visiblement une offense aux étudiantEs organisant la chose (le sujet leur ayant été imposé de ce que l’on nous a dit, mais tout de même très pris à cœur car « c’est pas politique »…), et une offense à l’autorité du président ou encore à la maison du concierge ou à la sécurité… Bref, ils nous ont raccompagné dehors, non sans quelques insultes à notre égard. Nous avons fini la distribution devant où l’accueil était quand même plus chaleureux.

Le tract distribué :
De l’épouvantail terroriste à l’invisibilité du terrorisme d’État

Ce lundi 16 avril est organisée à l’Université de Lille 2 une conférence sur « L’Union européenne face à la menace terroriste ». Le directeur adjoint d’Europol, le coordinateur de la lutte contre le terrorisme de l’Union Européenne et la vice-procureur au sein de la section terrorisme et atteintes à la sûreté de l’État auprès du Parquet de Paris y sont invitéEs.

Pour celles et ceux qui organisent, il s’agit peut-être de mettre en place un projet dans le cadre de leurs études. Pour les institutions et/ou professionnel.le.s de la politique qui les soutiennent, il s’agit d’introduire toujours davantage au sein du système d’éducation l’idée de défense des nations face à une menace omniprésente. Les « Cafés Défense » organisés régulièrement dans les universités en sont aussi une belle illustration, sorti directement des stratégies contre-insurectionnelles dans lesquelles la (F)rance est spécialiste.

En soi, cet ensemble de liens entre armée, police et éducation participent à la construction et au maintien d’un climat de peur, permettant le renforcement des structures de domination et de contrôle social, ainsi que la mise en place d’un arsenal répressif et son acceptation. Si les outils de lutte contre le « terrorisme » sont en premier temps présentés comme des exceptions, ils ne manquent pas ensuite d’être généralisés partout, tout le temps. Le fichage ADN ou la banalisation des dispositifs Vigipirate illustrent parfaitement cette logique.

L’épouvantail terroriste est ici brandi de nouveau. Pointant depuis longtemps une menace venant de l’extérieur du territoire national, il sert à criminaliser et répandre un racisme latent à l’encontre des personnes étrangères ou immigrées. C’est également la figure de la menace intérieure qui est développée à l’encontre des habitantEs raciséEs des « banlieues », mais aussi des personnes dont les idées se placent en rupture radicale avec le cirque démocratique actuel.

Après le fiasco de l’histoire dite de Tarnac et du spectre de « l’ultra gauche », Europol consacrera le 25 avril prochain une réunion aux « euro-anarchistes » qu’elle considère comme une menace terroriste. Entre autres à l’ordre du jour, les luttes contre la construction de la ligne de TGV Lyon-Turin, celles contre l’Europe forteresse ou pour la libération animale. De manière explicite, le réseau No Border, les résistances No TAV de Val de Suse et d’ailleurs, ainsi que la Féderation Anarchiste Informelle sont cibléEs. Dans la foulée, du 14 au 22 mai prochain, 6 militantEs des luttes contre le CPE et contre les centres de rétention passeront en procès sous une juridiction antiterroriste après plusieurs mois de prison préventive. La généralisation du label « terroriste » est en marche. Elle n’est pas seule.

La police, l’armée, la prison, les dispositifs français et européens (Frontex) contre l’immigration, les institutions sociales, le travail salarié… forment un ensemble d’outils qui tuent et détruisent des vies. Pour autant face à la violence toujours plus forte de ces structures de domination, c’est celles et ceux qui s’y opposent qui sont taxéEs de « violentEs » et « terroristes ».

Cette terminologie vient renforcer l’idée de danger répendue dans le discours politico-médiatique. Elle participe au maintien et à la légitimation du monopole de la violence autorisée par l’État qui ne sert qu’à assoir l’exploitation de tous et toutes. En d’autres termes, pointer certainEs comme terroristes tend surtout à invisibiliser et banaliser le terrorisme des États et la guerre qu’ils mènent pour renforcer l’ordre établi.

Nous sommes solidaires des personnes inculpéEs. Les luttes contre les frontières et les grands projets destructeurs, désignées par Europol comme des « mouvements terroristes », sont aussi les nôtres. Nous nous opposons à cette volonté de contrôle total et de répression sans limite.

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Il y aura toujours des grains de sable dans la machine.
Pas de justice, pas de paix.

Indymedia Lille, 16 avril 2012

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