[La liberté ou la mort] Manifestation contre une usine de traitement de terres rares en Malaisie

Malaisie : manifestation contre une usine de traitement de terres rares

KUANTAN (Malaisie) – Des milliers de personnes se sont rassemblées dimanche [26 février 2012] en Malaisie pour protester contre une usine de traitement de terres rares, qui pose selon eux de sérieux risques pour la santé des habitants et pour l’environnement.

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Le groupe minier australien Lynas a presque terminé la construction de cette usine controversée, dans l’État de Pahang (est de la Malaisie), qui traitera des terres rares importées d’Australie.

Plus de 5.000 personnes, beaucoup vêtues en vert et agitant des banderoles sur lesquelles étaient écrit « Arrêtez la pollution, arrêtez la corruption, arrêtez Lynas », ont défilé dans la ville côtière de Kuantan, pour demander au groupe australien de cesser ses opérations.

L’usine sera ainsi une des rares structures dans le monde pour le traitement de terres rares, ces métaux indispensables à la fabrication de produits de haute technologie, qui vont des missiles aux téléphones portables, en passant par les voitures électriques et les éoliennes.

Le Conseil de licence pour l’énergie atomique de Malaisie avait accordé début février une licence provisoire pour l’entrée en activité de l’usine pour une période de deux ans, sous des conditions très strictes de sécurité.

« L’usine est dangereuse car elle produit une quantité énorme de déchets qui sont radioactifs », a déclaré dimanche Lee Tan, un des organisateurs de la manifestation.

Le dirigeant de l’opposition, Anwar Ibrahim, faisait partie des manifestants. Une de ses collègues, Fuziah Salleh, a estimé que le site devrait déménager « au milieu du désert ».

La police intervient fréquemment lors des manifestations dans ce pays, mais bien que largement déployées, les forces de sécurité ont laissé le rassemblement se dérouler.

Des manifestations de moindre ampleur se sont déroulés dans d’autres régions du pays, y compris à Kuala Lumpur.

Le site de Lynas avait été piraté et affichait le slogan « Arrêtez Lynas, sauvez la Malaisie ».

Le groupe australien assure que son usine opèrera selon de strictes consignes de sécurité et que les déchets radioactifs produits seront de faible intensité et sans danger pour l’homme.

À l’heure actuelle, 97% de la production de « terres rares » provient de Chine, qui ne dispose pourtant que d’environ un tiers des ressources mondiales et où l’extraction provoque de gros dégâts sur l’environnement et les populations.

Les pays acheteurs tentent depuis plus d’un an de diversifier leurs sources d’approvisionnement.

Leur presse (Agence Faut Payer, 26 février 2012)


Cette raffinerie qui fait scandale

Un site en construction de traitement des terres rares soulève un tollé. Présentant de graves défauts de conception, il pourrait provoquer une pollution sans précédent.

Un complexe de raffinage de terres rares, dont le coût de construction se monte à 230 millions de dollars [158 millions d’euros], devrait devenir la plus grande unité du genre au monde. Il est destiné à contrecarrer la Chine dans son monopole sur les terres rares — ces métaux, comme le scandium ou le cérium, sont indispensables à la fabrication de nombreux produits issus des nouvelles technologies, comme les smartphones ou les voitures hybrides.

Cependant, le complexe est violemment attaqué par les militants écologistes, qui craignent que l’usine ne rejette des substances toxiques et radioactives dans les nappes phréatiques de la région. Au printemps, des manifestations ont eu lieu chaque semaine devant le site, et la propriété d’un des directeurs du projet a été la cible d’un attentat.

Si les minerais dits de terres rares ne sont pas radioactifs, ils sont souvent mélangés à l’état naturel avec du thorium, qui, lui, est hautement radioactif. C’est pourquoi, il y a trois ans, Lynas, la compagnie minière australienne à l’origine du projet, avait promis de prendre des mesures spéciales de sécurité après avoir obtenu auprès du gouvernement malaisien la permission de construire cet énorme complexe sur une centaine d’hectares de marais tropicaux.

Si tout se passe comme prévu, ce complexe deviendra la première usine de traitement des terres rares à être implantée en dehors de la Chine depuis près de trente ans. Lynas veut terminer le chantier au plus vite. L’année dernière, les restrictions de la Chine sur ses exportations ont entraîné des pénuries de terres rares à l’échelle mondiale et fait flamber les cours. Or de nouvelles raffineries devraient voir le jour aux États-Unis, en Mongolie, au Vietnam et en Inde avant la fin 2013, ce qui pourrait faire chuter les cours des terres rares.

Les dirigeants de Lynas affirment que la raffinerie est parfaitement sécurisée et qu’elle répond aux normes internationales en vigueur. Mais, selon des ingénieurs de l’usine qui ont fourni des rapports et des courriers électroniques émanant de Lynas et de ses sous-traitants, certaines structures pourraient comporter de graves défauts de fabrication.

Il y aurait des fissures, des poches d’air et des fuites dans les parois de béton qui constituent la structure des 70 réservoirs de confinement, qui, pour certains, sont plus grands qu’un bus à impériale. Le minerai, extrait dans le désert australien et expédié par bateau en Malaisie, est d’abord mélangé avec des acides très puissants. On obtient une boue légèrement radioactive qui est ensuite pompée et circule à travers les réservoirs à des températures avoisinant 90 °C. Selon les ingénieurs, les conduits en acier commandés pour l’usine sont de qualité médiocre et ne résisteront pas à cette boue très corrosive. Dans les autres pays, les raffineries de terres rares utilisent un acier inoxydable beaucoup plus cher.

Toujours selon les ingénieurs, les réservoirs en béton ont été construits avec du béton ordinaire et pas avec du béton polymère, mélangé à du plastique, plus cher et souvent utilisé dans les raffineries occidentales pour limiter les risques de fissures. D’après les documents produits par les ingénieurs, Lynas et UGL, son prestataire australien pour la construction, minimiseraient la gravité de ces problèmes.

Des rapports internes révèlent également que Lynas et UGL auraient fait pression sur leur prestataire malaisien, Cradotex, afin qu’il poursuive l’installation de revêtements hydrofuges en fibre de verre sans avoir réglé les problèmes d’humidité et de fissures dans les réservoirs. Mais Cradotex a refusé. “S’ils ne sont pas résolus, ces problèmes pourraient entraîner de graves dysfonctionnements”, explique Peter Wan, directeur de Cradotex.

D’après les documents produits, les fondations en béton de la raffinerie ont été réalisées sans apposer la fine couche de plastique qui empêche l’humidité issue des marais de s’infiltrer dans les piliers de béton. Le site se trouve à proximité d’une mangrove et à quelques kilomètres de l’embouchure d’un fleuve.

D’après un ingénieur, il était bien précisé sur le papier que cette protection de plastique était indispensable mais l’employé aurait reçu l’instruction de ne pas en commander, par mesure d’économie. M. James, vice-président de Lynas, a déclaré que l’entreprise n’avait pas cherché à réduire les coûts. “Lynas n’a pas de problèmes d’argent”, a-t-il affirmé. “Nous ne faisons pas de compromis sur la qualité de nos services pour faire des économies.” UGL s’est refusé à tout commentaire, s’abritant derrière la politique de confidentialité de l’entreprise.

Leur presse (Keith Bradsher, The New York Times / Courrier international, 1er septembre 2011)

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