45 jours de rétention – 14 juillet de solidarité

45 jours pour te punir de ne pas avoir les bons papiers

Le lundi 18 juillet de nouvelles dispositions de la loi sur l’immigration dite loi Besson entreront en vigueur. Les personnes sans-papiers resteront désormais 45 jours en rétention au lieu de 32 auparavant.

45 jours enfermés, mis à disposition de l’administration pour qu’elle organise l’expulsion. Cela veut dire 45 jours dans l’angoisse de voir son nom affiché sur la liste des vols, dans l’angoisse d’entendre son nom résonner dans les hauts-parleurs, dans l’angoisse de voir les flics débarquer dans sa chambre.

45 jours où lorsque toutes les portes de sortie du labyrinthe juridique se sont refermées les unes après les autres, trop de gens n’entrevoient plus que l’auto-mutilation et la tentative de suicide pour échapper à l’expulsion.

Et si on a « la chance » de ne pas être expulsé, ce sont quand même 45 jours pendant lesquels on ne peut plus voir sa famille et ses amis comme on veut. 45 jours à ne plus pouvoir aller dans les endroits qu’on aime. 45 jours pendant lesquels on perdra peut-être son travail, son logement, ses affaires. 45 jours de volés par des fonctionnaires en uniforme ou en civil.

Dans le quotidien de ces prisons ce sont 45 jours où il faut mendier pour tout : avoir un stylo, avoir un médicament autre qu’un tranquillisant, avoir du feu pour allumer une clope, manger autre chose que la nourriture dégueulasse et parfois périmée du centre.

Mais peut-être aussi 45 jours où la solidarité et les révoltes collectives enrayeront la machine à expulser.

45 jours pour foutre le feu…

De toutes façons un jour de liberté volée, ce sera toujours un jour de trop, c’est ce que nous sommes allés rappeler le jeudi 14 juillet sous les murs du centre de rétention de Vincennes en criant liberté en écho avec les retenus.

Ni rétention ni expulsion, liberté de circulation et d’installation !
Des papiers pour toutes et tous ou plus de papiers du tout !

Fermeture des centres de rétention

Infozone, 14 juillet 2011.

 

Témoignage d’ un retenu du centre de rétention de Vincennes – 14 juillet 2011

« Ici, c’est très dur !

Tout à l’heure, il y avait plein de monde à l’extérieur qui ont crié “Liberté, liberté, liberté !” Nous aussi, on a crié “Liberté, Liberté, Liberté !” Puis, la police est venue. Ils nous ont calmé.

Juste après, il y a un mec, il a mangé des lames et des pièces de 50 cts. Il est tombé par terre. Il a vomi. Ils l’ont emmené à l’infirmerie. Ils lui ont donné un cachet. Ils n’ont pas appelé les pompiers !

Ici, c’est la merde !

La bouffe est toujours donnée à la date limite de péremption. Aujourd’hui, ce midi la bouffe est datée du 14 juillet. Je mange que le pain et le fromage. La bouffe pue ! Si je mange, je vomis. Aujourd’hui, il y avait de la viande, je l’ai mise dans la bouche, puis je l’ai vomie ! Ici, j’ai perdu 7 kg.

Je suis passé devant le juge (JLD), il m’a donné 15 jours. Ma femme a pleuré. Elle est enceinte de 4 mois. Elle a dit au juge qu’elle avait besoin de moi. L’avocat n’a rien dit ! J’étais énervé, j’ai jeté le papier. Le flic m’a donné un coup. En m’énervant, je me suis blessé au bras. En revenant du tribunal, la police m’a mis dans le camion. La police m’a mis des coups.  J’arrivais pas à respirer.  Je saignais, le policier m’a mis un masque. J’ai saigné dessus. Le flic m’a dit : “Si tu mors le masque, je te mets dans la voiture, tu vas voir qu’est-ce qui va t’arriver.”

Ils m’ont ramené à Châtelet. J’ai demandé pourquoi. J’ai compris que c’était parce que j’ai cassé une porte.

L’ASSFAM m’a donné un papier comme quoi la police m’a frappé. Ils l’ont vu. Les policiers m’ont pris comme un chien. Ils m’ont dit : “Ferme ta gueule ! Tu vas voir ce qui va t’arriver !”

J’ai un problème de santé qui me cause des douleurs. À l’infirmerie, on m’a donné des cachets pour dormir. J’ai dit : “Non, je ne veux pas de ce cachet.” Je me réveille la nuit de douleur. J’ai demandé à aller à l’hôpital. On m’a répondu : “Non, tu n’y vas pas. C’est pas toi qui décide.”

Je voulais appeler mon patron car il ne me paye pas. Il dit qu’il n’a pas d’argent. L’ASSFAM m’a dit qu’elle ne peut rien faire. Ma femme a essayé d’appeler, il prétendait être parti en vacances. Après, je n’arrivais plus à le joindre. L’autre association (l’OFII) a bien voulu appeler. Le patron a eu un peu peur. Il m’a donné 100 euros sur les 5000.

J’ai une femme, elle est enceinte de quatre mois. On est pas encore mariés car elle est mineure. Elle est venue me voir, ils m’ont interdit de lui toucher la main. Je suis resté une semaine sans basquettes. Hier , ma femme m’en a ramené.

J’ai demandé l’asile car si je suis expulsé, je vais en prison parce que j’ai pas fait mon service militaire et aussi parce que je suis parti par bateau (sans visa), ce qui est interdit.

Je suis ici, j’ai perdu mon travail. Je suis loin de ma femme. »

Fermeture des centres de rétention

Infozone, 14 juillet 2011.

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