Édito
L’idéologie managériale, celle conçue et patiemment construite depuis mai 68, semble réussir là ou le taylorisme avait échoué : capter l’individu dans sa totalité et le rendre complètement dépendant de son employeur, sans aucune ressource personnelle et/ou collective pour faire face à la domination et l’oppression qu’il subit.
Les suicides à France Télécom et ailleurs mettent en lumière, de manière dramatique, l’isolement terrible dans lequel nombre de salariés vivent leur rapport au travail. Si le syndicalisme a su, pendant un temps, construire des rapports de forces, voire une culture ouvrière autonome capable de produire de l’entraide, des solidarités et du sens face au patronat, les résistances face à l’injonction d’être employable, mesurable, taillable et corvéable à merci ont du mal à se construire aujourd’hui.
Les outils actuels de la mise au travail et de l’embrigadement des salariés au seuls bénéfices des gestionnaires semblent terriblement opérants. Tout sacrifier à son travail, rendre des comptes, voir son activité réduite aux seuls résultats statistiques qui ne traduisent rien de la réalité, être en rivalité avec ses collègues, se méfier de tout le monde, atteindre toujours plus d’objectifs sans aucun moyen, être sans cesse compétent et performant, endosser toute la responsabilité et la culpabilité de ses échecs sans jamais remettre en question le système semblent parfois être intégrés comme étant la norme…
Pour autant, nous sommes nombreux à ne pas nous résigner à être réduits à de simples objets économiques, tels des robots ou des machines. Nous sommes nombreux à refuser que notre travail soit dénué de sens, de rencontres avec l’autre et le monde, d’entraide et d’altruisme.
Ainsi dans plusieurs secteurs la remise en cause ou le refus de l’évaluation individuelle, l’un des pivots de la gestion high tech des salariés, se développe et porte ce refus d’un travail complètement étranger à la manière dont nous souhaitons le vivre.
Comme il se doit, la CNT fait l’impasse sur le chômage comment moment du travail, comme l’ensemble des syndicats, de la gauche…
L’idéologie du travail, le travaillisme interdit d’analyser le travail en tant que forme de contrôle, et donc le chômage, la discontinuité de l’emploi. On versera tout au plus quelques larmes sur ces pauvres chômeurs (la CNT déborde même l’INSEE sur sa droit en les qualifiants d »inactifs »…), qui sont pas au bon endroit dans la société pour faire de a politique (on sait combien l’emploi en entreprise donne de capacités politiques…).