[7 août 2012]
Déclaration à mon poteau
Mon meilleur pote a laissé son cerveau derrière les barreaux. Comment ne pas leur en vouloir en voyant ces crimes légalisés.
Je fais des cauchemars même en plein jour. Je suis hanté par nos éclats de rire d’autrefois. On s’est promis à la vie à la mort que rien ne nous séparerait donc tout naturellement sa douleur est devenue la mienne.
La même histoire nous unit, j’écris les yeux dans le vide. Des fois tu ne pleures pas de faiblesse mais pour avoir été fort trop longtemps. Ma larme coule sur ma page blanche et se mélange à l’encre de ma plume pour une déclaration fraternelle, éternelle.
Mon ombre sur le bitume, poussés par notre jeunesse, on a cru à une illusion. On visait les étoiles avec des pierres jetées du haut d’une tour.
On dit que c’est les meilleurs qui partent en premier mais on n’aimerait pas voir partir ceux qui restent.
Le shit t’a fait oublier, t’as préféré zapper, devenir amnésique et moi j’ai tout sauvegardé. Mon cœur bat pour deux, l’amour d’un frère blessé au combat. Le champ de bataille ne pardonne pas.
Tu es trop franc, trop pur, ton cerveau n’a pas supporté tous ces faux, tous ces traîtres.
Moi j’ai fait le mort pendant dix ans pour rester en vie, ils étaient loin d’imaginer que je respirais encore.
Que DIEU te facilite et te rende toute ta raison.
Fidèle en amitié, quoi que l’avenir nous réserve, je veillerai sur l’ombre de ton ombre jusqu’à ma mort.
Ma plume tremble d’émotion et témoigne de ma sincérité.
On est parti à deux donc je te ramènerai par tous les moyens même si je dois ramper, je te porterai sur mon dos. Chez nous, on n’abandonne pas les frères blessés sur le champ de bataille.
On avait prévu de fêter nos 30 ans sur une île entourés que des gens qu’on aime. Oublie l’île, l’essentiel c’est d’être entouré que des gens qu’on aime.
Tu peux compter sur les doigts de la main ceux qui ont fait des permis de visite pour venir te voir. C’est cette main qu’il faut que tu gardes une fois dehors. Ceux qui ont pansé tes pansements, séché tes larmes quand dans ta vie il pleuvait une averse.
Tu es toujours resté digne malgré ces longues années d’enfermement. Tu n’as jamais appelé à l’aide personne.
Si un jour tu lis cette déclaration, sûrement tu seras submergé par l’émotion qui témoignera que ton cerveau est encore intact. Comme un paralysé sur son lit d’hôpital entouré de ceux qui l’aiment, trahi par une larme qui démontre son émotion.
Que DIEU te facilite.
JE T’AIME MON FRÈRE !!!
[La Chronique de Youv derrière les barreaux est disponible en téléchargement gratuit sur le site des Éditions Antisociales. Elle est à suivre sur le compte Facebook dédié.]