[PSA Aulnay] « La violence n’a jamais été aussi prégnante. “Je n’ai jamais vu ça en trente-cinq ans de carrière ici, remarque un cadre de la maintenance, qui regarde ses équipes décrocher un écran plat tagué. Un cap a été franchi par rapport aux anciens mouvements” »

Violences, menaces : PSA Aulnay sous tension

Un manteau blanc recouvre les hangars et parkings vides de l’usine PSA Peugeot Citroën d’Aulnay-sous-Bois, promise à la fermeture en 2014. Ce lundi 21 janvier, aucun bruit ne sort de ce site de production dont la vie est habituellement rythmée par la percussion des presses et la lente avancée des véhicules sur la ligne de montage.

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À la fin de la ligne d’assemblage, où les véhicules sont démarrés pour la première fois, les grévistes avaient installé leur QG. En place de grève. Pour bloquer la production, certains ont subtilisé les clés d’une trentaine de véhicules…

La direction a mis l’usine à l’arrêt. Officiellement, à cause d’une avarie sur une machine de l’atelier de peinture. D’autant que la neige a perturbé la circulation des poids lourds en Ile-de-France. « C’est bien la première fois que la neige nous empêche de travailler », ironise, dépité, un responsable de l’usine, qui, comme la plupart de nos interlocuteurs, grévistes ou non, souhaite garder l’anonymat.

Car il n’y pas que cela. Après la grève lancée le 16 janvier par les syndicats de PSA pour faire pression sur la direction dans le cadre des négociations sur l’avenir des salariés de l’usine, tout est parti en vrille. Depuis octobre, la « tension est montée crescendo », constate un cadre intermédiaire de l’usine, d’astreinte sur le site. Et la violence n’a jamais été aussi prégnante. « Je n’ai jamais vu ça en trente-cinqans de carrière ici, remarque un cadre de la maintenance, qui regarde ses équipes décrocher un écran plat tagué. Un cap a été franchi par rapport aux anciens mouvements. »

Les premières alertes remontent à octobre : le directeur du site, puis un cadre des ressources humaines, ont été séquestrés par quelques salariés en colère. « Depuis, la direction a été relocalisée dans un autre bâtiment, loin des ateliers », indique Laurent Vergely, le directeur du site. Les cadres supérieurs sont persona non grata dans les ateliers où ils ne s’aventurent qu’à plusieurs. « Pour gérer nos gars, c’est pas l’idéal », lâche l’un d’eux.

PRESSION

En décidant de fermer le site, la direction a voulu faire retomber la pression qui n’a jamais été aussi importante depuis l’annonce, le 12 juillet 2012, de la fermeture du site. « Si la tension est montée, c’est la faute de la direction, accuse Jean-Pierre Mercier, le médiatique militant de la CGT Aulnay, tendance Lutte ouvrière. Elle n’a qu’une ambition : briser la grève légitime des salariés en nous empêchant d’occuper le site. C’est un véritable lock-out. » Terme pour désigner une « grève patronale » qui empêche la venue des salariés – grévistes ou non – sur le site et les prive de salaire. « À Aulnay, les salariés sont toujours rémunérés, se défend Laurent Vergely, le directeur du site. Mais l’enjeu, aujourd’hui, est la réouverture. Il faut d’abord imaginer les moyens d’assurer la sécurité de tous. » Le problème est bien là.

Jeudi et vendredi, lors de la poursuite de la grève, l’usine a été le théâtre de tous les excès. Habituellement, les grévistes patrouillent ensemble pour entraîner les salariés à les suivre. Ils sont encadrés par les cadres intermédiaires, restés à distance. « Vendredi, tout est parti dans tous les sens. Impossible de les suivre », relève un cadre.

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Dans l’atelier du ferrage, des graffitis ont été peints. Un trait habituel des grèves.

Des extincteurs ont été vidés sur des armoires électriques, les responsables de groupes, un échelon hiérarchique intermédiaire, ont été canardés d’œufs, de tomates, de caissettes, de boulons, de cailloux, voire de pétards, quand ils n’étaient pas confinés dans leurs bureaux. Certains d’entre eux, ainsi que des délégués syndicaux, affirment avoir reçu des menaces de mort.

« LA TROUILLE AU VENTRE »

Dans les ateliers traînent encore les stigmates de l’action militante. À l’atelier logistique, des caisses gisent au sol. Sur les lignes d’assemblage, des boulons sont éparpillés, des boîtiers électriques de robots ont été débranchés. « Le plus souvent, c’est fait de manière pro sans abîmer les machines afin de bloquer la chaîne, note-t-on à la maintenance. Enfin, pas toujours. » Dans l’atelier du ferrage, on peut lire sur un mur : « La force des travailleurs, c’est la grève », à côté de l’interpellation du président du directoire de PSA : « Varin T.mort ». « Je ne l’ai pas vu, assure M. Mercier. La direction essaie de diaboliser notre mouvement avec cette campagne de calomnies. Nous cherchons simplement à convaincre les salariés de nous rejoindre. »

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Denis Martin, le directeur industriel de PSA, s’insurge contre « la destruction de l’outil de travail », les « méthodes militaristes » de quelque 50 à 150 personnes, sur un total de 3000 salariés. Des accusations que M. Mercier « dément ».

Vendredi 18 janvier, confirment pourtant des interlocuteurs, les menaces étaient permanentes. La consigne passée par les grévistes les plus déterminés était simple : les salariés viennent en tenue civile, et non en bleu de travail, sinon « on s’occupera d’eux ». Beaucoup sont venus en civil. Et restés à leur poste de travail sans rien faire… « Certains ont toujours su résister. D’autres ont peur. Notre rôle est d’essayer de les rassurer. C’est dur », constate un autre cadre. « Vous avez déjà vu des gens vouloir venir travailler la trouille au ventre ? », demande un représentant syndical contacté par téléphone.

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Hors SUD, qui ne participe pas aux négociations et ne commente pas, les autres syndicats (SIA, CFDT, CFE-CGC, CFTC…) réprouvent les méthodes employées. « Tout est fait pour nous distraire de notre objectif qui est de négocier le meilleur plan possible pour les salariés et qu’aucun ne termine à Pôle emploi, assure Tanja Sussest, représentante du SIA et autre figure de proue du site. J’espère que les intempéries vont faire baisser la tension et cesser les comportements inadmissibles de certains. »

Presse esclavagiste (Philippe Jacqué, envoyé spécial à Aulnay-sous-Bois, LeMonde.fr, 22 janvier 2013)

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3 réponses à [PSA Aulnay] « La violence n’a jamais été aussi prégnante. “Je n’ai jamais vu ça en trente-cinq ans de carrière ici, remarque un cadre de la maintenance, qui regarde ses équipes décrocher un écran plat tagué. Un cap a été franchi par rapport aux anciens mouvements” »

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  3. Bradbury dit :

    Un texte pétrit de ragots à deux balles qui ne tient aucunement compte de la détresse des salariés qui ont été trompés par les promesses de l’actuel président et de son soi disant parti de gôche . Nul doute que l’après Sarkosysme et son lot de discours haineux et de pratiques anti-sociales ne soi devenus la nouvelle norme de la confrérie qui siège actuellement à l’Elysée.

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