[Bangladesh] Troisième manifestation et caillassage des usines

Incendie d’usine au Bangladesh : cadres arrêtés, 5.000 manifestants

DACCA – Trois responsables d’une usine textile ravagée par un incendie qui a fait 110 morts au Bangladesh ont été arrêtés mercredi à la suite de témoignages d’ouvriers assurant qu’ils avaient reçu l’ordre de ne pas quitter leur poste.

De nouvelles manifestations ont parallèlement rassemblé des milliers d’ouvriers qui se sont violemment heurtés aux forces de police.

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Le propriétaire en fuite de l’usine Tazreen Fashion, Delwar Hossain, a été retrouvé mardi et était interrogé sur les circonstances du sinistre survenu samedi soir dans la zone industrielle d’Ashulia, proche de Dacca.

Il était également entendu au sujet d’une violation présumée des normes de construction en vertu desquelles le bâtiment de neuf étages n’aurait jamais dû dépasser trois étages.

Selon le chef de la police de Dacca, Habibur Rahman, les responsables arrêtés dans la nuit de mardi à mercredi avaient ordonné aux ouvriers paniqués de rester à l’intérieur de l’usine, leur assurant qu’ils n’avaient rien à craindre.

Tous trois sont des cadres intermédiaires de Tazreen. Des rescapés nous ont dit qu’ils n’avaient pas autorisé les ouvriers à fuir le feu, expliquant que c’était un simple exercice d’incendie. Certaines informations les accusent d’avoir verrouillé les portes, a-t-il déclaré à l’AFP.

Samedi soir, plus de 1.000 ouvriers ont été piégés par les flammes. Parmi les victimes figuraient de nombreuses femmes, mortes par asphyxie, intoxication ou pour avoir sauté dans le vide, selon des rescapés et des témoins interrogés par l’AFP.

Une enquête a été ouverte pour homicide involontaire.

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Pour le troisième jour consécutif, des milliers de manifestants ont défilé dans la zone industrielle d’Ashulia.

Selon la police, au moins 5.000 ouvriers ont quitté leur ateliers et ont défilé en caillassant les façades de plusieurs des 500 usines de confection de la zone.

http://juralib.noblogs.org/files/2012/11/0522.jpgUne centaine d’entre elles avait fermé afin d’éviter des heurts.

Une rumeur faisant état d’une alerte au feu a déclenché ces (nouvelles) manifestations, a indiqué à l’AFP un responsable de la police de Dacca, Faruq Ahmed.

Ils réclament justice pour les victimes et l’arrestation du propriétaire de Tazreen, a-t-il dit.

La police a fait usage de balles en caoutchouc, déployé des canons à eau et projeté de l’eau chaude pour disperser les manifestants qui s’en prenaient aux forces de l’ordre.

Les ouvriers ont vandalisé plusieurs usines et incendié des deux-roues dans des incidents qui ont fait une vingtaine de blessés, selon la version électronique du journal à grand tirage Daily Star.

http://juralib.noblogs.org/files/2012/11/0914.jpgSelon le site Internet de Tuba Group, la maison-mère de Tazreen Fashion, l’usine employait 1.630 personnes et fabriquait des polos, des T-shirts et des vestes pour des firmes occidentales. (…)

L’incendie meurtrier d’Ashulia a semé la peur dans les ateliers du pays. À Chittagong, une ville portuaire du sud, une cinquantaine de travailleurs ont été blessés mercredi dans une bousculade provoquée par l’émanation de fumée venant d’un climatiseur.

Presse esclavagiste (Agence Faut Payer, 28 novembre 2012)


(…) Environ 15.000 ouvriers ont manifesté lundi et 12.000 mardi à Dacca, à l’appel de 14 syndicats. (…)

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La fédération de l’industrie textile, la Bangladesh Garment Manufacturers and Exporters Association, qui va verser 1.250 dollars (963 euros) à chacune des familles endeuillées, a demandé aux enquêteurs de ne pas écarter la piste d’un sabotage, évoquant une « conspiration locale et internationale pour détruire » le secteur [sic, NdJL].

La police a annoncé mardi qu’elle interrogeait une femme soupçonnée d’avoir fait incendier par un homme, également arrêté, une autre usine de la zone dimanche. Le chef de la police a précisé que les enquêteurs recherchaient un lien éventuel avec le drame de Tazreen.

Le Bangladesh compte quelque 4.000 usines textiles dont les exportations, principalement destinées aux États-Unis et à l’Europe, rapportent environ 20 milliards de dollars (15,4 milliards d’euros) par an. Il est numéro deux mondial derrière la Chine.

Les exportations textiles représentent les quatre cinquièmes du total et nombre de propriétaires ont acquis un grand pouvoir, siégeant au Parlement ou dirigeant des clubs sportifs.

Mais les ouvriers se plaignent des mauvaises conditions de travail et des salaires, qui peuvent ne même pas atteindre les 40 dollars (30,8 euros) par mois. La Police industrielle est spécifiquement chargée des troubles dans les usines et les syndicats accusent les forces gouvernementales d’avoir tué l’un de leurs dirigeants, Aminul Islam, en avril dernier. La loi interdit aux ouvriers du textile de se syndiquer, alors que les autres secteurs le peuvent.

Dans un entretien au journal Daily Star de Dacca publié mardi, le directeur de l’usine Tazreen Fashions se déclare inquiet … de perdre des clients étrangers. « J’ai peur que mes affaires avec eux en souffrent », dit-il sans mentionner les victimes ou les familles. La société Tazreen n’a pas répondu aux demandes d’entretien avec l’agence Associated Press.

L’une des raisons du succès du textile bangladais est le moindre coût du travail, dans la mesure où près du tiers des 150 millions d’habitants vivent dans une extrême pauvreté. Le salaire minimum a été presque doublé cette année après de violentes manifestations, pour s’élever à 3.000 takas (38 dollars ; 29,3 euros) par mois. La Banque mondiale évalue le revenu par tête à environ 64 dollars (49 euros) par tête en 2011.

Presse esclavagiste (Sipa-AP, 27 novembre 2012)


(…) Dacca est réticent à imposer des réglementations dans un secteur qui représente 80 % des exportations du pays et emploie 3 millions de personnes. « Le gouvernement est sous l’influence des patrons et un député sur dix possède, lui ou sa famille, une usine de textile », explique Kalpona Akter, la directrice du Bangladesh Center for Workers Solidarity, une autre ONG de défense des droits des travailleurs. (…)

Presse esclavagiste (Julien Bouissou, LeMonde.fr, 27 novembre 2012)

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