Retour des manifestants anti-Sivens samedi à Toulouse
24 heures avant la grande manifestation nationale des «zadistes» à Toulouse, l’inquiétude grandit en centre-ville, loin des revendications récurrentes des contestataires.
Les «zadistes» sont de retour. Demain, tous ceux qui estiment avoir une «zone à défendre», les anti-Sivens bien sûr, mais également les opposants à la future Technopole d’Agen ou à l’Aéroport de Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique), se sont donné rendez-vous derrière la place du Capitole, à partir de 14 heures, dans un square Charles-de-Gaulle qui s’annonce plein comme un œuf.
Combien seront-ils seulement à se rassembler, ces «zadistes» qui auront convergé depuis plusieurs points de France, d’Albi, d’Agen, de Pau, mais aussi de Montpellier ou de Marseille ? Le rassemblement est déclaré en préfecture, et, pour la première fois, la manifestation devant s’ensuivre n’a pas été interdite, même si celle-ci sera fortement encadrée par les forces de police (lire par ailleurs).
Les «zadistes» reviennent à Toulouse pour deux raisons officielles majeures : la lutte contre le «monde des bétonneurs», mais aussi celle contre les «violences policières», un point sur lequel la préfecture n’aurait pas été alertée (lire également par ailleurs). Elsa, dont la main avait été atteinte par une grenade policière lancée dans une caravane le 7 octobre 2014 (soit 19 jours avant la mort de Rémi Fraisse), fait spécialement le déplacement depuis Marseille. Elle et ses amis sont signataires de l’appel à la manifestation de demain. Où ils haranguent clairement : «Il est essentiel de rappeler que c’est l’État qui se place en agresseur de par la violence sociale qu’il impose et la répression systématique qu’il met en place. N’oublions pas que souvent des lacrymogènes pleuvent avant les pavés…»
Centre-ville à éviter
Le ton est donné. Tant les promeneurs du samedi après-midi que les commerçants, lassés par les manifs à répétition de l’automne dernier (lire ci-contre), redoutent le retour des «zadistes». Hier, bon nombre de commerçants commençaient déjà à se protéger d’éventuelles échauffourées en installant des panneaux ou des rideaux protecteurs, sur l’ensemble du parcours prévu de la manif [Rue d’Alsace-Lorraine, boulevard de Strasbourg, Monument-aux-Morts, rue de Metz, rue du Languedoc, place du Salin]. «On n’est pas à l’abri d’un défilé musclé en centre-ville», confie ce propriétaire de boutique de prêt-à-porter de la rue d’Alsace-Lorraine. Un centre-ville toulousain où il ne fera sans doute pas bon circuler demain après-midi. Avec en filigrane la menace éventuelle d’un nouvel arrêt du métro, cela avait été plusieurs fois le cas en novembre.
«On vient avant tout pour faire écho à la grande manif de Nantes de l’an passé, en pensant aussi à l’actualité récente», glisse Camille. Outre une première décision d’expulsion des «zadistes» du 10 février, ceux-ci ont pris comme un camouflet la nouvelle décision du tribunal d’instance d’Albi de lundi dernier de les chasser de la «métairie», lieu emblématique de cette zone du Testet/Sivens, qu’ils occuperont du reste dès le lendemain de la manif de Toulouse. Toujours pour dire «non» au barrage de Sivens.
Le mois de novembre dans le rétroviseur des Toulousains…
Demain, les «zadistes» manifesteront pour dénoncer les violences policières, dès 14 heures, à la sortie de la station de métro «Capitole» (ligne A). Des manifestations aux revendications similaires avaient déjà eu lieu l’automne dernier dans le centre-ville toulousain pour dénoncer ces violences policières survenues sur le chantier du barrage de Sivens, violences qui avaient causé la mort du militant Rémi Fraisse. Ces manifestations, souvenons-nous, avaient causé des dégâts importants, provoquant l’arrêt total du métro et des bus pendant plusieurs heures. Des perturbations qui avaient touché Toulouse durant trois samedis de suite (les 8, 15 et 22), au grand dam des commerçants, qui s’estiment aujourd’hui encore lésés par le manque à gagner subi à quelques semaines des fêtes de fin d’année. Notons qu’au lendemain de leur manifestation prévue ce samedi, les «zadistes» se rassembleront sur la zone du Testet, dès dimanche matin «pour la construction d’un chantier et pour poursuivre nos rencontres», précisent-ils dans un communiqué.
Publié par des larbins de la maison Poulaga (Xavier Hurtevent et P.M., LaDepeche.fr, 20 février 2015)
Forte mobilisation policière attendue
Selon la préfecture, «un dispositif policier important» est attendu, demain, dans les rues de Toulouse pour encadrer la manifestation des «zadistes», prévue dès 14 heures, autour du square Charles-de-Gaulle, derrière le Capitole.
Fin novembre, l’un des derniers rassemblements avait mobilisé pas moins de 400 policiers et gendarmes mobiles. Au cours de cette manifestation, seize personnes avaient été interpellées pour des dégradations en tout genre. Certains ont écopé d’une peine de prison ferme.
Demain, un hélicoptère de la gendarmerie, prêt à décoller en cas débordement, viendra se greffer au vaste service de sécurité déployé tout autour de la ville. Avec les CRS et les gendarmes mobiles, des effectifs de la brigade anticriminalité (BAC), de la compagnie de sécurisation et d’intervention (CSI) viendront compléter le dispositif. Des modes d’intervention spécifiques sont prévus pour parer à tous débordements et faire face à tout début d’incidents.
Hier matin, les services de la préfecture ont enregistré le dépôt de déclaration de manifestation émanant du collectif des «zadistes». Ce nouveau rassemblement intervient alors que la justice tarnaise vient d’ordonner l’évacuation partielle d’un terrain occupé par les anti-Sivens, où un projet de construction de barrage cristallise toujours de fortes tensions. Ces manifestants se rassemblent également demain pour afficher leur soutien à toutes les «zones à défendre», en France.
Publié par des larbins de la maison Poulaga (F. Ab., LaDepeche.fr, 20 février 2015)
«Le contexte est très différent de novembre»
Olivier Delcayrou, directeur de cabinet du Préfet de Région, revient sur le dispositif mis en place à l’occasion de cette manifestation. Les forces de l’ordre seront vigilantes mais l’inquiétude est moindre qu’au mois de novembre.
La manifestation prévue demain à Toulouse est-elle interdite par les services de la Préfecture ?
Les organisateurs de cette manifestation ont fait une déclaration auprès de nos services avec un parcours en centre-ville depuis le square De Gaulle, derrière le Capitole, jusqu’à la place du Salin, en passant par la rue Alsace-Lorraine, le boulevard de Strasbourg, le monument aux Morts, la rue de Metz et la rue du Languedoc. Ces personnes se sont engagées, nous n’avions pas de raison de l’interdire.
Doit-on craindre, comme certains commerçants, des débordements similaires à ceux que nous avons connus au mois de novembre ?
Le contexte pour nous est totalement différent. D’une part parce qu’il y a cette déclaration et d’autre part parce que c’est un appel de soutien aux ZAD uniquement. Nous n’avons pas identifié de velléités de manifestation contre les violences policières comme au mois de novembre.
Le dispositif policier sera-t-il pour autant plus léger ?
Il y aura un dispositif important mais je ne peux pas vous donner de chiffres à ce sujet. Nous serons vigilants. Le dispositif sera déployé tout au long du parcours pour assurer à la fois la sécurité des manifestants et celle des nombreux passants qui risquent d’être présents ce samedi en centre-ville. Il y aura du monde sur le terrain. Le Préfet lui aussi sera présent en salle de commandement.
À cet égard, invitez-vous les Toulousains à ne pas se rendre dans le centre-ville ce samedi ?
Non pas du tout, comme je vous l’ai dit, le contexte est différent de celui de novembre.
Combien de manifestants sont attendus ?
Il est difficile aujourd’hui (N.D.L.R., hier), de savoir s’il y aura beaucoup de personnes. Le chiffre de la participation est difficile à évaluer.
Publié par des larbins de la maison Poulaga (propos recueillis par Claire Lagadic, LaDepeche.fr, 20 février 2015)