[Guangdong, Chine] « Comment ne pas travailler, quand un homme armé d’un bâton et d’un casque se tient à côté de vous ? »

Triste fin de grève pour 40’000 ouvriers chinois

Une grève massive de près de 40’000 ouvriers chinois d’une usine de chaussures dans le sud de la Chine, lancée mi-avril, s’est terminée après douze jours.

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Manifestation d’ouvriers de l’usine Yue Yuen à Dongguan dans la province du Guangdong le 24 avril 2014.

Pékin a ordonné à la société à capitaux taïwanais Yue Yuen de répondre aux revendications sociales de ses ouvriers mais ces derniers n’ont reçu qu’une modeste prime. Explication.

Quelle est l’origine de cette grève massive ?

Le mouvement social dans l’usine Yue Yuen – la plus grande au monde dans son domaine, située dans la province du Guangdong près de Hong Kong – avait éclaté début avril et pris la forme d’une grève depuis le 14, rassemblant près de 40’000 ouvriers et déclenchant un imposant déploiement des forces de l’ordre.

Les ouvrières – la main-d’œuvre est très majoritairement féminine – se plaignaient de leurs salaires, de contrats d’embauche lacunaires et de carences dans leur couverture sociale.

Société à capitaux taïwanais, Yue Yuen se déclare premier producteur mondial de chaussures de sport, avec 300 millions de paires chaque année. Son immense usine de Dongguan est l’un des plus grosses du secteur, avec 45’000 employés.

Après deux semaines de tension et de discussion avec des délégués des ouvriers (les syndicats libres sont interdits en Chine) et la direction de la société, les autorités ont donné pour instruction à la direction de l’usine, qui produit notamment des chaussures pour Nike et Adidas, de « rectifier selon la loi » les versements à effectuer. Plus de 80 % des employés de l’usine Yue Yuen ont repris le travail depuis le week-end dernier.

Les ouvrières ont-ils eu gain de cause ?

Les grèvistes ont repris le travail sans avoir vu leurs principales demandes satisfaites et dénoncent des manœuvres d’intimidation de la part des autorités. « La police a arrêté une soixantaine d’employés dans les ateliers », a indiqué à l’Agence France-Presse une ouvrière sous couvert d’anonymat, dénonçant « le contrôle de la police ».

L’usine a accepté de verser une prime de 230 yuans (30 €) par mois à chaque employé, et Yue Yuen s’est engagé à « compenser » les retards de versements des indemnités de sécurité sociale, tout en indiquant que « ces contributions ne pouvaient pas être quantifiées pour le moment ».

Sans convaincre : « On ne nous a pas promis le versement de toutes nos prestations sociales en retard. On a seulement obtenu une petite victoire, en obtenant une prime », a soupiré M. Wang, un employé gagnant 330 € par mois. « Les ouvriers n’ont pas obtenu gain de cause, et maintenant le gouvernement nous force à revenir à nos postes », déplore un agent d’entretien de 45 ans, nommé Li.

Le président de la société, Lu Chin-chu, a annoncé dans un communiqué envoyé à la bourse de Hong Kong que cette grève a entraîné des pertes d’environ 20 millions d’euros, et que la décision de Yue Yuen de satisfaire certaines demandes de ses employés « pourrait avoir un effet négatif » sur ses performances financières.

Le conflit est-il réglé ?

Les autorités n’ont fait que temporiser en faisant pression sur les ouvriers. Les mouvements sociaux n’ont cessé de se multiplier ces dernières années, faisant craindre au régime de Pékin des troubles sociaux massifs dans toute la province du sud pouvant rassembler des dizaines de millions d’ouvriers.

Selon l’ONG China Labour, basée à Hong Kong, les conflits du travail ont bondi de 30 % au premier trimestre 2014 par rapport à 2013 en raison des pénuries de main-d’œuvre qui placent les employés en position de force et d’un usage accru des réseaux sociaux pour mobiliser les ouvriers.

Presse cul-bénite (Dorian Malovic, La-Croix.com, 29 avril 2014)

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