Le 14 juillet dernier, lors de la fête annuelle de Rebellyon, un site lyonnais de cartographie participative et de ressources contre la vidéosurveillance était lancé ! Notre manière à nous de fêter les 10 ans de flicage des voies publiques lyonnaises. Et on n’a pas chômé pendant l’année, avec plein de complices qui n’aiment pas non plus être filmés : sur Lyon plus de 1500 caméras ont été recensées dans l’agglomération, signalements qui permettent de mieux se protéger de la vidéosurveillance tout en informant sur la prolifération inquiétante et les évolutions technologiques. Et le projet a depuis été lancé dans 25 autres villes, dont Paris, où 2400 caméras ont déjà été recensées dans l’agglomération (il en reste un paquet à signaler).
Septembre 2011 : le maire de Lyon fête tranquillement l’anniversaire des dix ans de la vidéosurveillance à Lyon, en compagnie de journalistes complaisants, dans un QG tenu secret. En 2001, lors de l’installation des premières caméras, Collomb avait pourtant essuyé un feu nourri d’oppositions. Une décennie plus tard, plus aucune voix ne se fait entendre localement contre le déploiement et le renforcement de la surveillance à distance. Pire : les médias locaux clament que tout le monde est désormais d’accord et que le dispositif est utile. Le collectif de Rebellyon, un site d’infos alternatives lyonnais, lance alors un appel pour la mise en place d’une cartographie participative des caméras de l’agglomération, histoire de remettre un peu de piquant dans cette affaire.
En juillet 2012, grâce à l’aide de quelques complices, un site lyonnais est lancé, augmenté d’une revue de presse régulièrement mise à jour sur le sujet. Il permet à n’importe qui de signaler facilement l’emplacement d’une caméra, son orientation, sa photo, et qui en est l’opérateur (les caméras privées sont, pour la première fois, également repérées).
Soutenir la mise en place de collectifs locaux
Le résultat est suffisamment enthousiasmant pour que l’envie naisse de le proposer à d’autres villes. En effet, au lieu de centraliser le signalement des caméras sur un seul et même site, le but du projet est de vérifier l’emplacement réel des caméras proposées facilement par les personnes qui s’inscrivent sur le site, mais aussi de soutenir la mise en place de collectifs locaux sur la question ou de renforcer ceux qui existent déjà. Car c’est au niveau local que se décide l’implantation des caméras, même si une lutte au niveau national est importante. Et si l’opposition à la vidéosurveillance est difficile dans les grandes agglomérations, elle est tout à fait possible dans les villes de taille plus modestes.
Comme l’installation de sous-surveillance est un peu complexe, une architecture permettant de déployer facilement d’autres sites locaux est proposée (à la manière d’une plateforme de blogs). Suite à quelques articles ici et là, des personnes d’autres villes rejoignent l’iniative. Rapidement, Paris, Nice, Clermont-Ferrand, Angers ou encore le Luxembourg créent un site local. Le projet sous-surveillance est né.
En juin 2013, 26 sites locaux existent, aussi bien dans des grandes agglomérations que des villes comme Feurs (Loire) ou Val d’Isère (Savoie). Ils référencent plusieurs milliers de caméras, quasiment 10% de celles officiellement recensées sur la voie publique en France, ainsi que des dizaines d’articles servant de ressources.
Un wiki dédié à de la documentation technique de la vidéosurveillance et ses promoteurs (industriels ou lobby) est aussi en place, tandis qu’une revue de presse nationale est proposée sur un site commun, en attendant des revues de presse en différentes langues, puisque des villes d’autres pays sont intéressées. Berlin, où a eu lieu une importante campagne cette année sur le sujet (Cam-Over), mais aussi Seattle aux États-Unis, testent le site. Enfin, du matériel de propagande est mutualisé, autocollants, affiches, flyers, illustrations et argumentaires, déclinables dans chaque ville [Comme ces illustrations que Tanxxx a réalisé pour le projet. Il paraît qu’il y aurait une linogravure de soutien prévue pour bientôt !]. Chaque collectif est ainsi autonome, mais peut enrichir, de manière fédérative, le projet.
Sous-surveillance est par ailleurs une initiative originale de développement d’un site entre plusieurs villes, avec des outils permettant à des développeurs éloignés d’améliorer ensemble le site (Git et Redmine pour les curieux), et au projet de se coordonner (Crabgrass). Une expérimentation qui pourrait peut-être profiter à d’autres projets au niveau national ! Une réflexion est ainsi entamée au sein du collectif Rebellyon pour permettre à des villes de se doter de sites d’information locaux facilement, avec une base voire une plateforme commune et un partage des expériences. Nom de code : « mutu ». Normal pour une ville où le mutualisme est né. Sur Toulouse vient ainsi de se lancer le site IAATA.info (Informations Anti-Autoritaires de Toulouse et Alentours). D’autres sites sont prévus pour la rentrée sur Tours, Reims, et Paris.
Une opposition à la surveillance généralisée à construire
L’année écoulée a en tout cas montré que le sujet avait toute sa pertinence : la vidéo-surveillance « intelligente », qui rajoute une couche de traitement automatique et en temps réel des images récoltées par les caméras, fait son apparition dans plusieurs villes. Des journalistes technolâtres succombent au travail de marketing du plus gros fabricant de drones « ludiques » (Parrot) et font l’éloge de ces robots aériens dotés de caméras, laissant présager leur irruption prochaine au-dessus de nos manifestations. Soyons sûrs qu’ils seront rejoints par ceux de la police à court ou moyen terme [Mise à jour du 11 juillet : ça y est, Valls l’a annoncé !]. Enfin, dans un domaine proche, les révélations de l’ancien espion américain Snowden sur la surveillance généralisée des communications numériques, montrent l’insatiable volonté de contrôle social des gouvernements et des multinationales.
Plus que jamais, au niveau local comme global, une opposition forte et déterminée face à ces projets est à construire. Sous-surveillance est un outil modeste à disposition de tous les collectifs, constitués ou non, qui souhaiteraient l’utiliser pour rassembler et agir contre la vidéo-surveillance, dans un premier temps, et peut-être contre d’autres aspects du contrôle social dans un second.
Il est très facile de rejoindre le projet sous-surveillance et de monter un site local : il est seulement demandé d’être opposé à la vidéo-surveillance et d’être plusieurs localement, pour pouvoir vérifier les caméras signalées et organiser dans la mesure du possible au moins un événement par an sur le sujet (manifestation, projection, débat…), et de partager les documents produits pour permettre à d’autres villes de les reprendre si elles le souhaitent.
Rejoignez-nous, et renforçons ensemble la lutte contre la surveillance !
www.sous-surveillance.net est le site commun aux différents sites locaux.
Pour tout contact
Sur Twitter® : @s_surveillance.
Sur irc : #sous-surveillance sur irc.indymedia.org ou https://irc.indymedia.nl/?channels=sous-surveillance
Y’a plein de choses à faire : on a besoin de personnes pour nous aider pour la revue de presse globale, pour du développement web, un nouveau serveur, des affiches, des tracts, etc. !
A. pour le collectif lyonnais
P.-S. : il reste de nombreuses choses à améliorer pour que la carte ne soit pas inutilement flippante. Pour l’instant les caméras de DAB ont été rajoutées, mais il faut savoir qu’elles ne filment que par intermittence (quand quelqu’un-e fait un retrait) et leur champ de vision est plus limité que ce que peut laisser penser la carte. D’autre part, les caméras dôme ne filment pas en permanence à 360°. Mais l’outil est tout en cas précieux pour connaître les emplacements avant une manif’ : sur Lyon, des cartes des parcours de manif’ mentionnant ces emplacements sont par exemple parfois distribués. Et un peu de renfort en développement nous permettrait d’améliorer l’outil !
Indymedia Paris, 1er août 2013