[21 septembre 2012]
Le premier jour de nos vies
Le mirador me guette, j’ai pas choisi d’y naître mais j’ai choisi de l’écrire, on n’a pas choisi de vivre mais on va tous mourir texte tellement sincère que si tu tends l’oreille tu entendras mon cœur battre, nos cœurs battre car je ne suis pas seul j’ai invité sur mon texte une petite surdouée prodige de 15 ans « KATSHOU » une rose du bitume, un pur talent d’écriture made in cité made in Val-Fourré. Championne de boxe thaï comme quoi quand on a des mains en or on met tout le monde d’ accord. Qui a dit que le talent dépendait des années ? Ceux qui pensent ça risquent d’être complexés par la précocité de ma protégée…
En clair de Lune quand le Soleil s’évade, s’allume dans le ciel, tous nos frères, partis comme des étoiles.
Au départ, tout était paisible. La vie était belle, elle brillait de mille feux. C’est vrai qu’elle était pas facile, mais quand tout le monde est là, faut être heureux. Je me rendais toujours au quartier, prendre des nouvelles, discuter et m’amuser. Une bonne habitude que je n’ai malgré tout pas lâchée.
Plus de quinze ans nous séparent mais ton talent nous rapproche discipline réservée à l’élite on vient dépoussiérer faire un contrepied aux idées préconçues, même si le maton me guette je m’évade le temps de ce texte pour mettre en avant une petite sœur.
À cette époque, on me disait que les grands, vendaient… qu’ils étaient, à la pointe des trafics, la vie de voyou, était bien, vu qu’elle rapportait. Mais personne ne nous avait prévenus, nous enfants des cités, qu’elle cachait une vie de ouf, pleine de mystères cachés. Au quartier, l’ambiance familiale résonnait, on s’aimait tous… et nos sourires, nous renforçaient… En passant devant les entrées, entassés par nos frères du quartier, on leur serre la main, en leur passant le salam, preuve de respect. Toujours souriants et fidèles au poste, ils sont cette petite étincelle, qui illumine ce décor éteint. Eh oui… ce jour-là, c’est fou comme il faisait beau, tout le monde riait c’était l’été… On jouait, on rigolait… Ce jour paraissait tellement parfait, mais l’un des nôtres nous a quittés, forcé par les bruits de balle, nous avons tous entendu la fin d’sa vie passer. Le quartier était agité, le règlement de comptes avait sonné. Affolée, la cité s’est éteinte, car ce n’était pas n’importe qui. C’était un homme que j’aimais. Un homme que je respectais. Oui mon grand frère, car parfois les liens du cœur sont plus forts que les liens du sang.
Oublie Victor Hugo et Racine ici c’est Katshou et Youv qui croisent leur plume c’est le premier jour de ma vie, de nos vies, je renais en poésie, c’est le premier jour de ma vie donc c’est loin d’être fini Katshou explique-leur ma sœur :
Ce fut pour moi le premier jour de ma vie, car au-delà des apparences, perdre un frère, ça ouvre les yeux…
Je sais pas quoi vous dire, ça fait tellement mal quand j’y pense, c’est ce qui m’a permis de me battre, et vouloir foncer… sans jamais baisser les bras. On pourrait me demander pourquoi ? Mais c’est pas le seul, qui nous a quittés, et c’est sûrement pas le dernier. Combien des nôtres on a vu tomber, combien des nôtres se sont envolés ? Tout ça pour échapper à la misère, et donner une raison à leur vie. Y a tellement mieux à faire, que de vendre son âme… Tellement mieux à faire, que faire verser des larmes.
À tous mes frères, réfléchissez deux fois… avant de vous engager… En espérant, que vous vivrez chaque jour, en n’ayant aucun regret. C’est vrai, que la vie nous pousse parfois dans des impasses, mais le comportement le plus noble que vous pourriez avoir c’est essayer de s’en sortir, en étant optimiste. Sans oublier, mes sœurs, égarées qui triment comme des esclaves, ou qui donnent leur pureté… pour quelques sous, en retour de leur travail.
Qu’Allah vous accompagne dans vos épreuves.
On prend en otage la littérature française un dernier braquage à visage découvert, cette fois je plaide coupable. Je me devais de rendre hommage à Katshou petite prodige de Mantes-la-Jolie (78) à 15 ans elle fait du bruit un talent infini que j’ai eu plaisir de mettre en avant, à mettre en lumière même si je suis à l’ombre.
Si c’est pas nous qui va l’faire ?
[La Chronique de Youv derrière les barreaux est disponible en téléchargement gratuit sur le site des Éditions Antisociales. Elle est à suivre sur le compte Facebook dédié.]