[Chroniques de mitard publiées du 7 au 11 septembre 2012]
Emmuré vivant
Des murs de ciment jusqu’au cou mais je garde un bras levé pour respirer expirer faire acte de présence. Tenir retenir une plume, une enclume lourde de mes péchés tellement nombreux que je ne peux les dénombrer. Une vie entière à délinquer à piller, saccager, sans répit, sans permis nique la loi Robin des blocs conteste leurs lois qui ont sacrifié nos renpa dans un ghetto où la masse à la ramasse se bouscule. Être emmuré vivant sans le savoir c’est encore pire. Handicap non négligeable citéen, citéenne partis des ghettos desaffectés ZUP zappés oubliés zone dézonées et par-dessus le marché du vendredi discriminés, examinés tutoyés, négligés, asile à ciel ouvert où la précarité est reine lieu où on ne vit pas on survit on surjoue on surestime l’oppresseur et on sous-estime nos capacités à s’autoproduire, s’autograndir s’entraider sans rien attendre en retour.
Ta tour ? T’inquiète ça fait quarante ans qu’elle tient debout toute seule même si à ses pieds une trentaine de lascars tiennent les murs persuadés qu’ils amortiront sa chute. Leur chute ; leur shit vendu au détail sans détail à prendre ou à laisser c’est mieux de laisser ou tu vas finir par te faire prendre à ton propre jeu, ton propre joint évasion sommaire, éphémère qui rendra ta santé précaire.
Manque de souffle face au commissaire inspiration venue de loin je suis qu’un enfant dans un corps de grand je joue avec les mots comme ils jouent avec nos vies. Et j’en paye le prix dix ans de captivité à méditer à penser ma douleur ma rancœur sans rancune même si j’en ai perdu des plumes et des ex-amis et des futurs ex-amis pas de regrets ni de remords la vie le vent balaye les feuilles mortes balaye devant ta porte avant de me juger, me blâmer je suis emmuré vivant OUI et ALORS ??
J’AURAIS PU ÊTRE EMMURÉ MORT.
[La Chronique de Youv derrière les barreaux est disponible en téléchargement gratuit sur le site des Éditions Antisociales. Elle est à suivre sur le compte Facebook dédié.]