Voici un texte d’appel à la solidarité écrit de l’anglais par le Revolutionary Anarchist Action (DAF) à Istanbul. S.V.P., faites ciculez dans vos réseaux et distribuez-le librement de façon massive.
La semaine dernière, un groupe de protestant.e.s débutent une action visant à protéger les arbres d’un parc après que plusieurs d’entre eux furent coupés illégalement au nom d’un projet de gentrification urbaine. Très tôt le matin lors du deuxième jour de protestation, la police attaque les protestant.e.s violemment avec des gazes lacrymogènes, des jets d’eau à pression et des balles de plastiques blessant grand nombre d’entre eux. L’étincelle, d’abord allumée par cet événement de terrorisme d’État, se propage partout à travers le pays et devient vite une action rapide et organisée de révolte.
Le peuple s’organisent contre les attaques croissantes des forces de l’ordre, le terrorisme d’État et la violence policière, transforment les rues en véritables aires de résistance. Cette révolte populaire est en cours depuis quatre jours et continue de grandir.
Des centaines de milliers de manifestant.e.s ont résisté ensemble dans Taksim, dont le gouvernement bloquait l’entrée et où les violences policières ont atteint un sommet, pour parvenir finalement à reprendre le contrôle et occuper la zone en bloquant les accès au square par des barricades de matériaux de construction et de pavées à plusieurs endroits stratégiques de la ville, étendant ainsi la révolte. À Izmir, une autre grande ville de Turquie, des centaines de manifestant.e.s ont incendié le bâtiment du parti au pouvoir.
La solidarité sociale et le support mutuel lors des manifestations et des confrontations sont palpables. Dans toutes les villes où les confrontations éclatent, les gens ont ouvert leurs maisons aux protestataires et aux personnes blessées. Plusieurs ont distribué devant leur porte des trousses de premiers soins et de la nourriture pour les manifestant.e.s. Les équipes de volontaires médicaux se sont auto-organisées efficacement dans les zones de protestations aidant le plus rapidement possible les blessé.e.s. Des avocat.e.s volontaires aident également les arrêté.e.s.
Plus les confrontations continuent, plus le nombre de mort.e.s et de blessé.e.s augmente. Les médias de masse continuent d’agir comme si rien n’arrivait. Le nombre de mort.e.s semble s’élever à 10, mais rien n’est certain en raison de l’absence de déclaration officielle. Un protestant à Istanbul s’est fait écraser sous un camion policier en essayant de bloquer une rue. Un autre a eu un accident vasculaire cérébrale causé par les gazes, un autre est passé sous un bulldozer de police. Tous ont perdu la vie. À Ankara, un manifestant s’est fait descendre d’une balle dans la tête par un policier.
Plus les actions et la confrontation continuent ici, plus la solidarité globale augmente. Anonymous est entré dans les sites internet du parti au pouvoir, de la police d’Istanbul, de la municipalité d’Ankara et de plusieurs autres agences gouvernementales. Anonymous a déclaré son intention de continuer les cyber attaques contre le terrorisme de l’État turc.
Alors que des millions de personnes sont dans les rues en train de résister aux attaques policières partout à travers le pays, plusieurs partis politiques d’opposition essaient de prendre avantages en manipulant les actions et la politisation présentes. Exactement comme ce fut observé dans différentes régions lors du Printemps Arabe, les partis d’opposition (spécialement les kémalistes) essaient de s’approprier l’origine des actions présentes. En prenant avantage de la politisation sociale, ils essaient d’acquérir des gains et ainsi espèrent accéder au pouvoir. Les révoltes ont laissé les politiciens et l’État dans une mauvaise position. Alors que le gouvernement essai de manipuler le sens de la révolte en la qualifiant de protestation d’un groupe de radicaux, une crise économique commence à montrer ses premiers signes sur le marché boursier.
Cependant, c’est une des plus grosses actions de l’histoire du pays. Dans la rue, le peuple se soulève contre les politiques d’oppression, de suppression, de terreur et de violences policières que l’État n’a cessé d’augmenter depuis trop longtemps déjà. Le peuple que l’État a essayé de soumettre avec une oppression de plusieurs centaines d’années se révolte désormais directement contre lui.
Nous appelons tou.te.s nos camarades qui luttent partout à travers le monde: Élevez la voix de la révolte depuis tous les lieux et canaux que vous pouvez utiliser contre l’État turc et les médias de masse qui essaient de la réduire au silence. Organisez des actions de solidarité de chez vous pour élever nos voix avec des millions de personnes dans les rues à travers le monde.
Joignez votre voix à la révolte de gens ignorées par l’État, opprimées et exploitées depuis des années. Laissez le feu de la révolte contre l’État turc que nous avons allumé d’une étincelle prendre de l’ampleur et s’étendre.
Partout à Istanbul tout est désormais résistance contre l’État terroriste, la violence policière et l’exploitation capitaliste.
Nous allons continuer de diffuser la suite des émeutes.
Revolutionary Anarchist Action (DAF)
A-infos, 11 juin 2013
4 juin : Révolution de Taksim – Nous sommes en train de gagner !
Nous avons vu la plage sous les pavés, nous avons porté le drapeau noir de la révolte !
Dans la rue Istiklal, près du consulat Français, à 200 mètres de la police, un pavé de la plage dans une main et le drapeau de la révolte dans l’autre, vous affrontez la police.
Votre masque à gaz est un morceau de tissu imbibé de Talcid. La police pulvérise de l’eau sous pression, jette des grenades à gaz l’une après l’autre, vous vous retrouvez au milieu des gaz, en train de reculer, jetant des pierres, vous êtes à bout de souffle, étouffé, essoufflé, à ce moment quelqu’un court près de vous, pulvérise sur votre visage de l’eau antiacide et demande : « Comment ça va, vous allez bien ? »
Vous n’allez pas bien mais tout de suite vous vous sentez mieux. Vous prenez une pierre de la plage dans une main, le drapeau de la révolte dans l’autre. Vous vous appuyez sur la barricade, hors de souffle. Votre respiration se rafraîchit avec la liberté de la rébellion. Parce que la solidarité est partout ; cette révolte est embellie par la solidarité, vous tombez mais on vous relève, on vous demande si ça va bien, vous huez tous ensemble au moment où la bombe assourdissante explose, ensemble vous retenez votre souffle quand une nouvelle grenade de gaz arrive.
Lorsque le barrage disparaît vous chantez ensemble et criez votre rébellion. Interminable eau sous pression, gaz et résistance. Vous êtes fatigué, vous vous asseyez sur le pavé pour reprendre votre souffle, quelqu’un arrive avec de l’eau et vous donne à boire, un autre arrive avec un sandwich.
Vous n’avez pas soif, pas faim parce que partout les gens partagent, il n’y a pas ici de « mien », pas de « nôtre ». Tout le monde est ensemble. Il n’y a pas de relâche, si vous tombez, celui qui est à côté de vous ne tombera pas. Il n’y a pas de découragement, si vous vous découragez votre camarade ne se découragera pas.
Vous vous débarrassez de la peur que le système a créée au fil des ans, et le courage c’est de faire de ce dont vous aviez peur. Et vous vivez cette expérience.
Vous êtes arc-boutés contre la police et vous avancez courbé. La police fait tout son possible pour vous arrêter. Même si parfois vous ralentissez, le bruit des autres affrontements murmure à votre oreille : « Nous allons de l’avant ». Vous commencez à être excité et vous poussez encore et encore.
Au dernier choc vous voyez que la police bat en retraite. Non, vous voyez qu’elle s’enfuit ; peut-être êtes-vous en train de vivre ce que vous attendiez depuis si longtemps.
Vous rencontrerez d’autres personnes sur la place Taksim, vous êtes heureux de voir ceux que vous aimez. Après de longues accolades, vous commencez à construire des barricades. Sans perdre de temps. Ceux qui sont avec vous commencent à chantonner une chanson des années 1930, la chanson des anarchistes espagnols. Vous joignez votre voix aux leurs. « Pour le pain, la justice, la liberté, tout le monde sur les barricades… »
La chanson devient plus forte avec la construction des barricades ; avec les voitures de police retournées sur le toit, les cars de police, avec les barrières d’un chantier pillé. Qu’ils viennent, qu’ils viennent et voient la communion et la solidarité qui augmente. Tout le monde veut s’éloigner de l’égoïsme, de la concurrence. Les tables sont ouvertes, les tentes érigées. Une place du peuple est en train d’être créée. Il y a quelques hypocrites mais cela vous est égal. Parce que, à chaque instant, partout, se trouve la rébellion : Ankara, Izmir, Antalya, Dersim. D’Athènes, Thessalonique, Paris, Sofia… Les nouvelles de la solidarité arrivent. La solidarité se développe, ceux qui partagent sont en augmentation. La révolte se répand parce que nous sommes en train de gagner.
Maintenant, une revolte nous parle d’elle-même, une révolte nous raconte ce que nous avions oublié. Elle nous parle de l’importance de la communion, de la solidarité, de l’organisation et plus que tout, de la liberté.
Maintenant, la cendre sans fin dans nos mains rougeoie avec la révolte. Maintenant, au sein de la rébellion nous voyons dans nos yeux miroitants les mots des autres. Nous nous tenons par la main pour transporter les pierres de la plage, nous brandissons le drapeau de la révolte qui a été brûlé par les grenades à gaz. Nous serrons les uns contre les autres ces corps qui ont porté nos cœurs pleins de révolution. Et bien que nous ne le disions pas à haute voix, nous nous disons merci les uns les autres avec le bonheur du partage de cet instant. C’est un remerciement temporaire sans que nous soyons satisfaits. Sans être satisfaits aujourd’hui, côte à côte, nous attendons demain.
Action Révolutionnaire Anarchiste (DAF) – Traduction Fédération Anarchiste