Ma petite entreprise ne connaît pas la crise

L’aciériste allemand ThyssenKrupp en pleine tourmente

Le géant allemand de l’acier ThyssenKrupp s’apprête à vivre un début de semaine bien turbulent. Son conseil de surveillance devait se réunir, lundi 10 décembre, pour entériner le départ anticipé de trois des six membres du directoire d’ici à la fin de l’année. Et ce coup de balai pourrait en annoncer d’autres.

Le président du même conseil de surveillance, Gerhard Cromme, se trouve en effet aussi sous le feu des critiques, en raison de ses responsabilités dans une aventure qui aura coûté cher : la débâcle financière des aciéries que le groupe allemand a fait construire  au Brésil et aux États-Unis, via sa filiale Steel Americas, et qui devrait grever l’exercice de l’entreprise.

Les comptes annuels de la société doivent être présentés mardi 11 décembre et les analystes s’attendent à d’importantes pertes.

Lancés en 2005, ces projets d’aciéries outre-Atlantique ont été des gouffres. Ainsi, ThyssenKrupp a investi 12 milliards d’euros au total sur les deux sites avant de décider de s’en défaire. Mais le groupe ne pourrait espérer en tirer que 2 à 4 milliards, selon le quotidien Süddeutsche Zeitung citant un document interne. Le pire scénario évoque même la somme de 1milliard d’euros.

DOMMAGES ET INTÉRÊTS À L’ÉTUDE

Cette perte abyssale pour l’entreprise serait à mettre sur le compte d’un management qui, au mieux, n’aurait pas fourni les bonnes informations au siège, à Essen.

« Une série de chiffres et de revenus donnés à l’époque se sont révélés trop optimistes ou faux au final », a reconnu la direction, le 5 décembre, dans le communiqué annonçant le départ des trois membres du directoire. Il s’agit de Olaf Berlien, responsable des activités industrielles, d’Edwin Eichler, président deThyssenKrupp Steel  Europe, et de Jürgen Claassen, chargé de la « bonne gouvernance » au sein du directoire.

Quelles sont les responsabilités de M. Cromme, qui siège au conseil de surveillance depuis 2001, dans cette affaire ? A-t-il su, lui aussi, mais laissé faire ? Selon plusieurs médias allemands, il aurait commandé un nouveau rapport sur les responsabilités … de l’ancien président du directoire, Ekkehard Schuz, ainsi que sur d’autres managers afin d’établir s’ils avaient sciemment falsifié leurs informations. Il s’agirait d’étudier la possibilité de leur réclamer des dommages et intérêts.

ThyssenKrupp traverse en tout cas sa crise la plus grave depuis la fusion entre Thyssen et Krupp à la fin des années 1990.

Outre le dossier des hauts-fourneaux américains et brésiliens, la firme, qui a fêté son bicentenaire cette année, accumule les déconvenues sur d’autres fronts.

SOMPTUEUX VOYAGES AUX FRAIS DE L’ENTREPRISE

Ainsi, le départ de M. Claassen a révélé certaines pratiques inappropriées au sein du management. M. Claassen est en effet accusé d’avoir entrepris, à titre privé mais aux frais de l’entreprise, de somptueux voyages avec des journalistes. Avions en première classe, luxueux hôtels, certains de ces déplacements auraient coûté jusqu’à 15’000 euros par personne.

Par ailleurs, ThyssenKrupp est confronté à plusieurs affaires de cartel et de corruption.

Suite à des manipulations de prix sur les prix rails, aux dépens de la Deutsche Bahn (la SNCF allemande), quatre aciéristes dont le géant d’Essen ont été condamnés en juillet par l’office allemand anti-cartel à payer la somme de 124 millions d’euros.

D’autres accusations portent sur des ententes illicites concernant les prix des ascenseurs et des escalators. Entre les amendes et les demandes de dommages et intérêts, il pourrait en coûter au total un demi-milliard d’euros au géant de l’acier. Enfin, le parquet d’Essen enquête sur un cas de corruption concernant les activités au Kazakhstan d’une filiale de ThyssenKrupp, GfT Bautechnik.

Presse esclavagiste (Blandine Milcent à Berlin, LeMonde.fr, 10 décembre 2012)

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