Comment le gouvernement écoute ce qui se dit sur Twitter
L’analyse de l’évolution de l’opinion publique ne passe plus seulement par les sondages. Le SIG, qui est en charge de cette mission pour Matignon, scrute aussi ce qui se dit sur les réseaux sociaux.
Il n’y a pas que les entreprises qui s’intéressent à leur réputation sur internet. Le gouvernement scrute lui aussi les critiques dont il est la cible sur les réseaux en vogue, comme Twitter ou Facebook. C’est le SIG, le Service d’information du gouvernement géré par Matignon, qui est chargé de cette veille. Et pour ne rien rater, il recourt à des technologies permettant d’identifier les messages pertinents. L’une d’elle a été mise au point par Visibrain, une jeune start-up qui a mis au point un outil de veille stratégique et qui fait désormais partie des sous-traitants du SIG. Il s’agit d’un logiciel mouchard qui passe au crible tous les « tweets ».
Objectif du gouvernement : prévenir les situations de crise et de mesurer l’impact d’une décision. « Ils veulent devancer les tendances données par les journalistes qui commentent les actions du gouvernement, et ce, heure par heure », explique Nicolas Huguenin, le co-fondateur de Visibrain qui offre aussi ses services à des agences de communication (Publicis, Loomis) et des entreprises (Coca Cola, Peugeot, entre autres).
La vérité sur Twitter
« Ils ont accès au tableau de bord et ainsi à toutes nos données en temps réel. Ils sont en mesure de savoir ce qu’on disait sur le gouvernement entre 8h et 10h, par exemple », affirme Nicolas Huguenin. Twitter deviendrait-il le miroir par excellence de l’opinion des Français ? « C’est rare de voir des mensonges sur ce réseau, c’est pour cela que l’analyse est intéressante », avance le jeune chef d’entreprise.
Un intérêt pour le réseau Twitter que confirme le SIG. « Nous allons créer d’ici la fin de l’année un profil spécial pour le gouvernement », indique à Challenges Philippe Guibert le directeur nommé il y a deux mois à la tête de l’autorité. Pour l’instant, les comptes officiels sont ceux du Président (@Elysee), du premier Ministre (@Matignon) et des ministères. L’idée serait d’avoir un seul compte pour « tweeter » pour une présence plus officielle et « moins artisanale », précise Philippe Guibert.
Cellule spéciale de veille
Le SIG s’est en plus doté d’une nouvelle cellule d’écoute. « Nous avons trois personnes chargées en permanence et uniquement de la veille sur internet », confirme le patron du service d’information. L’organe de Matignon ne fait toutefois « aucun commentaire » sur ses prestataires — ils seraient plusieurs — spécialisés dans la veille.
La start up Visibrain mise en tout cas beaucoup sur ce créneau porteur et espère « convaincre d’ici peu tous les ministères ». « Ça rend les politiques plus intelligents : ils réagissent mieux : avant ils n’étaient pas assez réactifs », relève Nicolas Huguenin.
Alors que François Hollande avait promis avant l’élection de réduire « la frénésie de commandes de sondage », — promesse tenue jusqu’à septembre —, la veille sur les réseaux sociaux pourrait bien devenir le nouvel outil indispensable des politiques.
Publié par des larbins de la police cybernétique (Jeanne Dussueil, Challenges.fr, 23 novembre 2012 – mis à jour le 28 novembre 2012)