[Chronique de Youv derrière les barreaux] « Tu es mon fils, mais je ne te connais pas, tu as grandi entre les bras de la justice »

http://juralib.noblogs.org/files/2012/09/0513.jpg[6 février 2012]
Partie lettre à la mama

Ma chère mère,

J’espère que ma lettre va te trouver en bonne santé sous la protection d’Allah ma lettre vient annoncer une fois de plus mon incarcération, je sais Maman que je suis un fils indigne, indigne d’être fils d’une mère pieuse, même si tu dis que non, que malgré tout j’ai ta bénédiction, depuis l’âge de 14 ans j’ai passé plus de temps en prison que dans tes bras, au lieu de panser tes blessures, [j’en] ai créé ; tu as toujours bravé le froid, la pluie, les on-dit, pour venir soutenir ton fils incarcéré, on dit que le paradis se trouve sous le talon de sa mère, même si il y serait pas wallah, je t’aimerai jusqu’à la mort, je voulais faire de ta vie un rêve, faire de toi une reine, te sortir du taudis dans lequel on a grandi, mais toi tu disais toujours hamdoullah même quand dans le frigo il restait que trois petits suisses, alors qu’on était dix enfants, toujours à l’heure pour tes prières, combien de tes sommeils j’ai brisés, tu dormais pas jusqu’à [ce] que je regagne mon lit superposé, pas un mot, un regard suffisait pour voir et lire ton soulagement quand je rentrais sain et sauf, un jour je me souviens, tu m’as dit « je préfère aller te voir au parloir, qu’aller fleurir ta tombe au cimetière », quand j’écris cette lettre mes larmes inondent la feuille, tu m’as toujours protégé, tu t’es toujours interposée quand le daron me prenait en combat, où tous les coups étaient permis au milieu du salon, tu étais toujours de mon côté, mais je t’ai trahie, Maman ton fils aîné des garçons a failli à sa mission, je ne mérite pas ton amour, ton affection, toutes tes deha « bénédictions », il y a deux ans dans un parloir à Fresnes, tu m’as dit « tu es mon fils, mais je ne te connais pas, tu as grandi entre les bras de la justice » cette phrase a hanté mes nuits tellement elle est réelle, alors que j’ai vingt ans tu me parles toujours comme si j’en avais dix.

Pour toi je reste et je resterai le petit Oumar que tu as connu, je suis fier d’être ton fils, pardonne-moi ma chère mère pour tous les drames que je t’apporte.

Ça fait déjà une semaine que je suis incarcéré, hier j’ai vu le juge, il m’a informé qu’il t’avait accordé le permis de visite, je te connais par cœur donc, tu risques de venir mercredi, j’ai honte de tout ce que je t’inflige, j’ai commencé à faire la prière depuis hier, je sais que ça te tenait à cœur que je la fasse, c’est sur ces lignes que je te laisse en espérant te voir mercredi inchallah, ton fils qui t’aime.

P.-S. : Cette lettre a été traduite à ma mère, par l’une de mes sœurs 🙂

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