Des heurts entre manifestants et policiers à Abidjan font des blessés
ABIDJAN – De violents heurts ont éclaté lundi entre la police ivoirienne et de jeunes manifestants qui s’opposaient à une opération d’évacuation dans le quartier d’Abobo à Abidjan, faisant plusieurs blessés, ont rapporté à l’AFP des témoins.
Selon ces témoins, des manifestants ont été blessés parmi plusieurs centaines de jeunes qui s’opposaient à une opération visant à libérer les voies, occupées par des marchands ambulants, autour du grand marché de ce quartier très populaire, qui a été l’un des épicentres de la crise ivoirienne de 2010-2011.
D’après l’un de ces témoins, un militaire des Forces républicaines (FRCI) a également été blessé, atteint au ventre.
La police a réagi en dispersant (les manifestants) dans un premier temps à l’aide de gaz lacrymogènes. Les jeunes ont riposté en lançant des pierres aux policiers, a expliqué un témoin.
La police, appuyée par la gendarmerie et les FRCI, a ensuite procédé à des tirs de sommation, après quoi ont éclaté des échanges de coups de feu, a raconté un autre témoin.
Les policiers ont reçu des tirs de gens qui étaient sur le lieu à évacuer, a affirmé à l’AFP la ministre de la Salubrité urbaine, Anne Désirée Ouloto, évoquant une zone dangereuse.
L’opération de salubrité qu’on a voulu lancer a permis de découvrir que des personnes détenaient des armes de façon illégale dans cette zone, a-t-elle souligné.
Mme Ouloto et ses collègues des Mines, Adama Toungara, également maire d’Abobo, et de la Défense, Paul Koffi Koffi, ont été longuement bloqués à la mairie du quartier.
Après ces affrontements, la police a réussi un moment à repousser les manifestants, mais les heurts ont repris en fin de journée avec de nouveaux échanges de tirs, l’armée tirant avec des armes de gros calibre.
Abobo a été au cœur de la crise postélectorale ivoirienne de décembre 2010-avril 2011, qui a opposé l’ex-président Laurent Gbagbo et le chef de l’État Alassane Ouattara et fait quelque 3.000 morts.
Une guérilla anti-Gbagbo baptisée commando invisible avait pris le contrôle de ce quartier pro-Ouattara pendant la crise et de nombreux ex-combattants non démobilisés y circulent toujours.
Ces incidents surviennent alors que la Côte d’Ivoire a été la proie de nouvelles attaques armées dans la nuit de dimanche à lundi, dont l’une a visé pour la première fois une infrastructure sensible, une centrale thermique en plein Abidjan qui a subi de sérieux dégâts.
Leur presse (Agence Faut Payer, 15 octobre 2012)
Hier, à Abobo. Le déguerpissement de la gare vire à l’affrontement entre forces de l’ordre et syndicalistes. 3 ministres se réfugient à la mairie. Plusieurs blessés.
L’atmosphère était très électrique, hier lundi 15 octobre, à Abobo, précisément au rond-point de la gare, en face de la mairie.
Le déguerpissement des alentours de la mairie servant de gare routière aux syndicalistes a tourné au drame. Les forces de l’ordre, Frci (Forces républicaines de Côte d’Ivoire), gendarmes et policiers venus en renfort aux agents de la brigade de salubrité ont dû employer la manière forte, avant que le bulldozer ne puisse passer à l’acte.
Au cours de l’affrontement qui a éclaté entre forces de l’ordre et syndicalistes, l’on a déploré plusieurs agents blessés avec des pierres. Les ministres Anne Ouloto, Adama Toungara, maire de la commune et Paul Koffi Koffi de la défense sont restés bloqués dans les locaux de la mairie, pendant près de 4h d’horloge. Vers 11h, au rond-point de la gare d’Abobo, de nombreux syndicalistes et autres apprentis, scandaient : « On ne bouge pas. Vous allez nous tuer tous ».
À l’intérieur de la cour de la mairie, plusieurs policiers et gendarmes ont dû faire un replis stratégique pour éviter un affrontement. Les deux camps sont face à face. Les bulldozers, venus pour démolir la gare routière, sont immobilisés dans l’enceinte de la mairie. Dans cette ambiance surchauffée, des discussions sont entamées par les responsables de la mairie et la brigade de salubrité urbaine avec les syndicalistes. Ceux-ci sont intransigeants. Pas question de les déguerpir de là. Ainsi, les soldats des Frci, basés au camp commando d’Abobo sont-ils alertés.
Lorsque le commandant Koné Gaoussou dit Jah Gao et un nombre impressionnant d’éléments débarquent sur les lieux, la tension monte d’un cran. Les syndicalistes se bandent les muscles, de plus bel. Le commandant Jah Gao et le colonel Soumahoro Gaoussou, commandant en second des forces terrestres entament, à leur tour, des négociations avec les syndicalistes. Plusieurs heures après, les syndicalistes qui n’entendaient pas laisser sortir les bulldozers, s’adonnent à des jets de pierres en direction des forces de l’ordre.
Plusieurs agents sont atteints et conduits à l’Hôpital militaire d’Abidjan (Hma). Les manifestants sont contraints de reculer, en raison des tirs nourris de sommation, faits avec des kalachnikovs et des armes lourdes. Dès lors, un char avant blindé ouvre le passage pour les machines qui commencent la démolition des baraques et autres appatams bâtis sur le site en question. Les syndicalistes, poussés hors du périmètre de la mairie se dispersent dans les quartiers. C’est donc sous une surveillance accrue des Frci, gendarmes et policiers que s’effectue le déguerpissement de la gare routière d’Abobo.
Leur presse (FOFANA Mambé, linfodrome.com, 16 octobre 2012)
Déguerpissement dans le sang. Échanges de coups feu à Abobo : 3 ministres échappent à la mort
Des enfants, des jeunes, des adultes, des femmes qui se couchent à même le sol, plongent dans des caniveaux, dans les poubelles, s’engouffrent dans le premier taxi ou un autre véhicule pour échapper aux balles perdues. Hier à Abobo, l’ambiance était électrique et à la guerre. Des éléments des Frci, surexcitées, certains aux visages bariolés ou encagoulés, prêts à tuer, qui tirent dans tous les sens. Pour un simple maintien d’ordre en plein centre d’Abobo, au rond point de la mairie de la commune. Des femmes musulmanes qui ne juraient que par Alassane Dramane Ouattara et le Rdr, et qui ont eu la malchance de passer par là, sont traumatisées. Des individus en tenue civile, munis de pistolets automatiques, mécontents de l’opération de déguerpissement menée par la ministre Anne-Désirée Oulotto, échangent des coups de feu avec les Frci. C’est le spectacle d’affrontement armé que les Frci dont nombreux ont été recrutés parmi les ex-rebelles et des habitants armés d’Abobo ont offert hier. Une véritable bataille rangée, sanglante entre les Frci et les manifestants qui s’opposent à la destruction des gares wôrô-wôrô (taxis communaux) et des étals de commerçants dans cette commune par la ministre de la Salubrité urbaine, Anne Désirée Oulotto.
Déjà dans la matinée, des individus se réclamant du Rdr et les Frci se sont tirés dessus, à balles réelles. Venue superviser le déguerpissement de ces commerçants et transporteurs, Mme Anne Oulotto était accompagnée de ses collègues Adama Toungara (mines et énergie, par ailleurs, maire d’Abobo) et Paul Koffi Koffi (défense). Conspuée, insultée et menacée physiquement de mort, elle a dû se réfugier dans les locaux de la mairie, en compagnie des deux autres ministres en difficulté devant la détermination des populations à s’opposer, par tous les moyens, à cette opération de déguerpissement. Les ministres du régime Ouattara et tous ceux qui les accompagnaient ont été lapidés et pourchassés par les manifestants. « Trop, c’est trop, vous êtes venus au pouvoir pour nous affamer, bandes d’ingrats », s’écriaient des commerçants. Les propos hostiles au régime Ouattara fusaient de partout, pour la première fois à Abobo, censé être son fief. « Foutaise !!! Non seulement, le nouveau site de PK 18 est exigu, mais il est mal placé », se plaint R. J, un responsable d’un syndicat des transporteurs.
Après la reprise des violents combats dans l’après-midi, un calme précaire a prévalu en fin d’après-midi. Mais la tension était toujours vive. De nombreux individus non identifiés, des ex-combattants non démobilisés, selon des sources dignes de foi, qui ont porté Alassane Ouattara au pouvoir par les armes, circulaient librement hier dans la commune d’Abobo, avec des pistolets automatiques ou des kalachnikovs. Prêts à en découdre avec les Frci, disent-ils.
Leur presse (Charles Bédé, Abidjan.net, 16 octobre 2012)