AMIENS NORD Violences urbaines : les lampistes cloués au pilori
Aucun des émeutiers d’Amiens-Nord n’a encore été interpellé. Mais, ce mercredi, un homme a été condamné pour provocation et une femme a été placée en garde à vue pour outrages.
Il a beau être baraqué, Cédric H… a manifestement endossé un costume trop large pour ses épaules, quand il s’est retrouvé principal interpellé après les émeutes qui ont embrasé Amiens-Nord.
À l’époque, on allait voir ce qu’on allait voir : dans un premier temps, « Shrek » (le surnom d’H… dans le quartier) était poursuivi pour « provocation directe à un attroupement armé suivie d’effet » ; dans un second, les principaux émeutiers tomberaient.
Un mois plus tard, on attend encore la vague d’arrestations et Cédric H… est seul dans le box des accusés, cerné par un double cordon de policiers et de journalistes. Il a 27 ans. Son casier compte neuf mentions, pour des délits routiers, des violences, des outrages et un vol aggravé… Il vit chez sa mère et touche le RSA. Les policiers le décrivent comme « discret, ne cherchant pas les problèmes ».
D’emblée, ce mercredi après-midi, la procureure Naïma Ben Ahmed retouche le tableau peint à la hâte un mois plus tôt : « On lui a peut-être donné un rôle, une importance qui ne sont pas les siens ».
Quatre mois de prison ferme
Le soir du 12, H… participait à la soirée de deuil en mémoire de son ami Nadir Hadji, tué à moto trois jours plus tôt. « Son père a voulu voir l’endroit où il était mort. Je l’ai conduit. Au retour, il y avait des CRS partout. On est entré au domicile des Hadji et je n’en suis plus ressorti », soutient-il. Le parquet dément cette version : les policiers ont « formellement identifié » H… comme étant l’homme au tee-shirt rayé qui a crié « Venez, venez, ramassez des cailloux, faut tous les niquer ».
Plus question, en revanche, de lui attribuer cette menace lourde de sens : « Demain, ça va être la guerre ». « Elle a été prononcé par un jeune homme torse nu, que la police n’a pu identifier », convient Mme Ben Ahmed.
Me Stéphane Daquo saute sur l’occasion comme un para sur Kolwezi : « De quel attroupement parle-t-on ? D’une émeute ou d’une veillée de deuil ? » Il évoque un « quartier qui fait peur à la France entière, grain de sable dans l’été normal d’un début de présidence normale ».
Les juges, finalement, condamnent Cédric H… à huit mois de prison dont quatre ferme, pour « provocation directe à un attroupement armé », mais pas suivie d’effet. Loin de ces subtilités, Shrek ne se départit de ce sourire doux et triste qui, autant que son physique massif, lui a valu son surnom. « Oh, c’est quoi c’te peine de bébé ! », commente l’un de ses amis à la sortie de la salle. Fin connaisseur…
Publié par des larbins de la maison Poulaga (Tony Poulain, Le Courrier Picard, 13 septembre 2012) via Le Chat Noir Émeutier