[Beat On The Brat] Crèche sauvage, mode d’emploi

Crèche clandestine à Marseille : les parents s’expliquent

Ils mettent en cause le manque de structures d’accueil

« Nous ne sommes pas des monstres ! Nous n’aurions jamais laissé nos enfants en danger ». Plusieurs parents ont vivement réagi à notre article d’hier, révélant l’existence d’une crèche clandestine aux Réformés à Marseille (1er). Fermée mercredi par les services de police, qui avaient été alertés par une lettre anonyme, cette structure dirigée par une ancienne infirmière de 60 ans, accueillait 26 enfants de 6 mois à 3 ans dans un appartement du Bd Roosevelt. Tarif : 17 € par jour, versés « au black » à la responsable, aujourd’hui poursuivie pour « travail dissimulé et mise en danger d’autrui ».

Mais pour les parents, Monique, la nounou, ne doit pas être montrée du doigt. « Nos enfants n’étaient pas entassés dans 25 m², les plus petits dormaient dans des lits individuels, dans une chambre à part. Le local comportait aussi une cuisine, une salle d’eau, une cour intérieure. Il y avait 3 personnes pour garder les enfants, et je n’en ai jamais compté plus de 15 en même temps », assure Yan Lovic, qui faisait « pleinement confiance à Monique » pour s’occuper de sa fillette de 2 ans. « Nous ne sommes pas des parents irresponsables. Il y a parmi nous des avocats, des médecins, des artistes. Cette affaire met en lumière de manque de crèches à Marseille », estime cet intermittent du spectacle, qui aurait « refusé de se faire pistonner » pour obtenir une place.

Chez Monique, il a trouvé un mode de garde collectif aux horaires souples (8h-19 h), « le seul adapté à la vie moderne ». Les enfants, assure-t-il, « y étaient parfaitement heureux ». Une crèche d’autant plus « tendance » que certains parents y trouvaient un avantage financier non négligeable : d’après les enquêteurs, plusieurs fraudaient le fisc en déclarant une garde à domicile, bénéficiant ainsi de chèques emplois-services.

La PMI consentante ?

« Mais quelle aurait été leur réaction si un incendie, un accident, un problème sanitaire était survenu dans cet appartement ? » tonne Michel Amiel, conseiller général (PS) chargé de la Petite enfance. L’élu rappelle qu’en matière d’accueil des enfants, « les normes d’hygiène, de sécurité, d’encadrement sont très strictes ». Une réglementation que les services de la protection maternelle infantile, qui dépendent du Conseil général, sont chargés de faire respecter.

Or, la PMI connaissait l’existence de la crèche clandestine. Depuis 2006 d’après certaines informations. Ce qui est sûr, c’est qu’il y a 4 ans, l’appartement avait été visité par des inspecteurs. Il avait été proposé à la nounou de créer (légalement cette fois) une micro-crèche. « Mais cette structure se limitant à l’accueil de 8 à 10 enfants, elle nous a répondu qu’elle préférait fermer », raconte Michel Amiel. L’an dernier pourtant, Monique accueillait encore des enfants quand elle a reçu une 2e visite de la PMI, suite, semble-t-il, à un problème avec un enfant.

Comment se fait-il que la crèche sauvage n’ait pas été fermée ? « Ce n’est pas normal. Une enquête interne a été ouverte pour comprendre ce qui s’est passé », reconnaît Michel Amiel. Mais pour l’élu à la Petite enfance, il est fort possible que d’autres structures de ce type fonctionnent en toute impunité. « La PMI n’est pas une police. Sauf dénonciation, on ne peut contrôler que les crèches qui sont déclarées comme telles ».

« Une aubaine »

« La solution proposée au cours Franklin Roosevelt est une véritable aubaine », estiment les parents dans un communiqué. « Ce lieu était connu des services de la PMI, qui avaient évoqué la possibilité de transformer le lieu en une structure officielle. Il était aussi connu des services de l’enfance de la Ville ». Malgré ce, « aucune interdiction d’ouverture n’avait été délivrée », observent-ils, estimant avoir été livrés à eux-mêmes face à la défaillance des services compétents.

« Nombre d’entre nous ont tenté sans succès d’inscrire son enfant dans une crèche municipale et/ou associative », où les délais d’attente « dépassent les deux années ». « Nous n’avons aucune autre solution que d’avoir recours à des systèmes alternatifs », plaident les parents, qui se disent par ailleurs « entièrement satisfaits » de ce mode d’accueil et de sa « souplesse de fonctionnement ».

Leur presse (Sophie Manelli et Romain Luongo, LaProvence.com, 30 juin 2012)


Crèche fermée à Marseille : illégale oui mais « par esprit de solidarité »

Jeudi à Marseille, deux femmes, qui gardaient 25 enfants dans un petit F2, ont été placées en garde à vue avant d’être relâchées pour poursuivre l’enquête sur cette « crèche clandestine » qui a été immédiatement fermée.

Pour les autorités, les deux femmes, la gérante de 59 ans (ancienne infirmière) et son employée, s’occupaient des enfants dans des conditions ne respectant pas les règles en matière de sécurité, d’hygiène ou du nombre d’encadrants.

Dans l’appartement, elles avaient installés huit lits et sept transats pour garder entre 15 et 25 enfants dans l’appartement de 50 m², disposant d’une cour intérieure de 30 m². Un rapport du médecin de la PMI est encore attendu, mais aucun cas de maltraitance n’est évoqué à ce stade.

Face à la pénurie de places en crêche…

L’avocat de la gérante de cette crêche illégale, a jugé vendredi qu’on « caricature et diabolise la réalité ». Pour lui c’est un système mis en place par des parents « par esprit de solidarité » face au « problème énorme de garde d’enfants » dans la ville. « Les parents se sont regroupés et une forme de coopérative s’est mise en place », avec trois personnes pour garder les enfants et la présence ponctuelle de parents pour animer des ateliers, a déclaré Me Christophe Pinel.

Pour l’avocat : « Seul le piston permet d’avoir des places en crèche à Marseille »

« Ce système s’est mis en place par esprit de solidarité, camaraderie, car le seul statut qui permet d’avoir des places en crèche à Marseille, c’est le piston », a poursuivi l’avocat. « On ne peut pas dire que toutes les règles aient été rigoureusement appliquées, mais tout s’est fait avec l’agrément des parents, sans aucune maltraitance à l’égard des enfants et aucune économie ne s’est créée là-dessus », a-t-il assuré.

Les parents, parmi lesquels plusieurs intermittents du spectacle, versaient 17 euros par jour, a précisé un père de famille, Yann Loric, dont la fille de 2 ans et demi était gardée depuis juin 2011 dans cette « crèche » qui existait depuis « de nombreuses années ».

« Les autorités étaient au courant. Si elles laissaient faire, c’est parce qu’elles avaient conscience que cette structure ne faisait que pallier le manque criant de crèches dans cette ville », a estimé ce parent.

« On avait conscience que ça flirtait avec l’illégalité, mais ce n’était pas insalubre. Ce qui me révolte, c’est qu’on fasse passer cette dame pour un monstre, les parents pour des gens inconséquents, voire criminels et que toutes les autorités se dédouanent !« , s’est-il insurgé.

Crèche fermée, enquête ouverte

La responsable de 59 ans a été relâchée dans l’attente des résultats de l’enquête, ouverte pour travail dissimulé, mise en danger de la vie d’autrui et escroquerie.

Leur presse (MidiLibre.fr avec l’Agence Faut Payer, 1er juillet 2012)

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