Granville – Ligne THT : des opposants aux multiples visages
Des riverains inquiets pour leurs biens ou leur santé, aux anti-nucléaire les plus radicaux, le mouvement anti-THT agrège des profils extrêmement variés. Tour d’horizon de ces opposants à la ligne Cotentin-Maine.
Qui sont les militants anti-THT ? Prévue pour acheminer l’électricité produite par le futur EPR de Flamanville à travers quatre départements, la ligne Cotentin-Maine fédère les oppositions depuis l’annonce de sa construction. Derrière le rejet de ce projet se cachent des opposants aux profils et motivations très variés. Tous ne portent pas les mêmes revendications. Tous n’imaginent pas s’impliquer au même degré dans leur « combat » contre RTE.
La plupart de ces opposants se réclament du mouvement anti-nucléaire. Sympathisants écologistes ou militants politiques, ils ont fait de la ligne THT une nouvelle bataille dans leur guerre contre l’atome. « L’avantage avec la ligne Cotentin-Maine, c’est que l’on transporte le problème du nucléaire », résume Michel Houssin, président de l’association Marais sous tension.
Aujourd’hui perçue comme le maillon faible de cette industrie, la ligne électrique permettrait, selon eux, de porter le débat au-delà du périmètre immédiat des centrales.
Une mobilisation intergénérationnelle
Ces opposants se sont très vite organisés en association, ou collectif anti-THT. Ceux-ci ont essaimé le long du tracé et regroupent des militants de tout âge et de toute sensibilité. On y retrouve également des élus, des exploitants agricoles et des riverains « qui ont pris le train en route », inquiets pour leur santé ou pour la valeur immobilière de leurs biens. « Nous ne voulons pas être sacrifiés pour une vitrine commerciale (l’EPR) », lâche l’un d’entre eux. Tous mettent en avant leur « attachement à la non-violence ». « Ce qui ne veut pas dire de la tiédeur dans nos actions », avance un opposant.
Car les premiers chantiers de la ligne THT ont modifié la donne. Les militants, qui portaient jusqu’alors leur combat sur le terrain du droit, évoquent désormais ouvertement la possibilité d’actions directes. « Les associations ont tout mis en œuvre pour instaurer un dialogue. Elles n’ont eu en retour qu’une fin de non-recevoir », juge André Robinard, codirigeant du collectif Stop THT en Ille-et-Vilaine. « Nous avons organisé des manifestations. Ils ne nous ont pas écoutés. Maintenant, c’est fini », tranche Géraldine Tallec, codirigeante du même mouvement dans la Manche.
Convaincus de la « légitimité de leur combat » face à ce qu’ils apparentent à un « déni de démocratie », les militants anti-THT se disent « prêts à assumer les conséquences de leurs actes ». Ils voudraient ainsi provoquer un rapport de force favorable et transformer leurs actions en autant de tribune pour leurs revendications. L’occupation d’un bois promis à destruction sur la commune du Chefresne, ou le blocage de dépôts de sous-traitants employés par RTE, répondent à cette stratégie.
Une frange plus radicale commence également à émerger au sein du mouvement. Jeunes pour la plupart, venus de Bretagne et des Pays de la Loire pour certains, ces militants revendiquent l’amplification des actions contre le projet de RTE. Cultivant la méfiance et la défiance envers les autorités, ces opposants « extrêmement motivés » n’hésitent pas à parler de « sabotage ». Une méthode qui aurait le mérite, selon eux, de « ralentir l’édification de la ligne » et de « contraindre RTE au dialogue ».
Presse policière (Fabien Paillot, Ouest-France.fr, 10 mai 2012)