Condamnation d’un couple de militants chinois
Le couple, qui luttait contre les expropriations, a été condamné à la prison. La femme, Ni Yulan, a perdu l’usage de ses jambes lors d’une précédente détention.
Un an après leur arrestation intervenue en pleine chasse aux militants des droits de l’Homme, la Chinoise handicapée Ni Yulan et son mari Dong Jiqin ont été condamnés à deux ans et huit mois de prison pour elle et deux ans pour lui pour leur combat contre les expropriations.
L’Union européenne et la fille du couple ont immédiatement appelé à la libération de Ni et de Dong, arrêtés en avril 2011 alors qu’une répression accrue s’abattait sur des dizaines de militants des droits de l’Homme, le régime communiste craignant les risques de propagation de la révolte du printemps arabe à la Chine.
Ni — qui est handicapée depuis l’un de ses précédents passages en prison — et Dong avaient été accusés lors d’un procès expéditif en décembre dernier de « provoquer des troubles » et de « détruire des biens publics et privés ».
Ni Yulan avait également été accusée de fraude, une charge qui lui vaut six mois sur l’ensemble de sa peine de prison, a précisé le porte-parole du tribunal de l’ouest de Pékin.
Les époux ont apporté une assistance légale à de nombreuses familles victimes d’expropriations, un fléau à l’origine d’un nombre croissant de manifestations en Chine. Ils avaient entamé leur bras de fer avec les autorités en 2001, après que leur propre maison, à Pékin, eut été vouée à la démolition.
(…) La fille du couple, Dong Xuan, qui, elle, avait été admise dans le tribunal, a jugé cette condamnation « totalement injuste ». « J’appelle le gouvernement à libérer mes parents », a-t-elle dit à l’AFP.
« Tous les deux m’ont paru amaigris », a ajouté Dong Xuan, « je n’ai pas pu voir le visage de ma mère, elle ne s’est pas retournée, elle était dans un fauteuil roulant et semblait très faible ». Dong a en revanche pu échanger quelques mots avec son père qui lui a dit « qu’il allait bien ».
« Nous pensons que le verdict est injuste et viole la loi », a déclaré l’avocat du couple, Cheng Hai, devant les journalistes.
« Nous avons expliqué que cette affaire n’était pas criminelle mais relevait d’un différend au civil, elle aurait due être jugée différemment. Cela en dit long sur l’état du système judiciaire en Chine », a-t-il dit.
Tortures
Me Cheng a expliqué que Ni et Dong avaient été condamnés pour avoir refusé de payer une facture de 69’000 yuans (300 euros) pour l’hôtel où la police les avait confinés en juin 2010, après la dernière libération de Ni.
Selon Amnesty International, Ni a eu les rotules et les pieds brisés lors d’une première détention en 2002 et est depuis réduite à se déplacer en fauteuil roulant. Elle est aussi en mauvaise santé et a des difficultés à s’exprimer.
Lors de son procès en décembre, Ni avait été la plupart du temps allongée sur une civière dans le tribunal.
Pour l’organisation Chinese human rights defenders (CHRD), Renee Xia a également condamné ce jugement.
En punissant Ni Yulan « qui a subi des tortures qui l’ont laissée paralysée (…) le gouvernement chinois dit au monde avec assurance qu’il n’a que dédain pour les droits de l’homme », a-t-elle déclaré dans un communiqué.
Ni, qui a une formation d’avocate, avait été condamnée à un an de prison en 2002 pour « obstruction d’affaires officielles » puis à deux ans en 2008 pour « dommages à des biens publics » ; alors qu’elle tentait de protéger sa maison de la démolition. Le couple avait ensuite vécu dans la rue.
Cette femme âgée de 51 ans aujourd’hui avait été rayée du barreau en 2002.
En janvier, la police avait empêché Dong Xuan d’aller chercher au nom de sa mère aux Pays-Bas un prix de 100’000 euros récompensant cette militante des droits de l’homme.
Leur presse (Agence Faut Payer, 10 avril 2012)