Violation des Droits de l’Homme et répression contre les Azawadiens
Le 31 janvier ainsi que le 1er, le 5 et le 6 février 2012, le Gouvernement malien a réédité les forfaitures des années 63, 91, 92, 93, 94, 95 et 96 en organisant indifféremment des pogroms sur les populations de l’Azawad.
Auparavant, la Sécurité d’État, police politique du régime malien, avait recensé les domiciles et commerces appartenant aux Azawadiens.
Dans ce cadre, deux femmes appartenant à l’association des Femmes de l’Azawad, Aminetou Wallet Bibi et Assi Walet ont été arrêtées dans la journée d’hier et ont passé la nuit en prison. Elles sont toujours détenues.
Suite à une marche organisée à Kidal aujourd’hui pour obtenir leur libération, les manifestants ont été malmenés avec des bombes lacrymogènes et des tirs réels qui ont fait deux blessés, deux jeunes de 17 et 18 ans. Beaucoup de manifestants ont été arrêtés, 20 (femmes, enfants etc.), tous conduits au Camp 2 de Kidal.
Parmi les manifestants arrêtés , il y a Bab-Ahmed Ag Bozan, Mossa Ag Hamed-Ahmed etc.
Aminetou Walet Bibi et Assi sont responsables de l’association des Femmes de l’Azawad qui œuvre pour la lutte des droits des femmes de l’Azawad.
Un autre homme, de couleur noire, a été grièvement blessé hier soir. Il a perdu ses deux jambes.
La presse locale, toujours aux ordres des autorités, à la manière de la « Radio des Mille Collines », avait abondamment excité les esprits pour susciter une vague de haine raciale à l’endroit des « peaux-rouges » sous la houlette des agents spéciaux.
Nous lançons un appel très urgent aux organisations des droits de l’homme, Amnesty International, Human Rights Watch, la FIDH, le CICR, l’Association Européenne pour la Défense des Droits de l’Homme, le HCR, Agir Ensemble pour les Droits de l’Homme, Trial Watch pour venir en aide le plus rapidement possible aux populations.
Nous lançons également un appel pressant au monde entier pour que le Mali soit mis au ban de la communauté internationale pour crimes contre l’humanité.
Pour le MNLA,
Moussa Ag Acharatoumane et Ishaq Ag Al Housseyni
Communiqué du MNLA, 6 février 2012.
Intervention de Mossa Ag Attaher au rassemblement du 4 février 2012 à Paris
Rassemblement organisé par Tamazgha devant l’assemblée nationale
Nous mettons en ligne l’intervention de Mossa Ag Attaher, Chargé de communication du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), au rassemblement du 4 février 2012 à Paris organisé par Tamazgha devant l’assemblée nationale, en guise de solidarité avec le mouvement de libération de l’Azawad.
Chers frères, chères sœurs, chers amis,
Merci d’être venus apporter votre soutien à l’Azawad qui se bat avec courage et détermination pour accéder enfin à sa liberté et à sa dignité.
Le combat que mène actuellement le MNLA dans l’Azawad est un combat noble et légitime. Il est noble parce qu’il aspire à mettre en place une société emprunte de liberté, de justice et d’égalité entre les différentes composantes de l’Azawad. Il est légitime parce qu’il est l’émanation de l’ensemble des peuples qui vivent sur ce territoire façonné par des siècles de cultures et de civilisations autochtones ayant vécus auparavant en parfaite harmonie.
Aujourd’hui, l’Azawad, dans toutes ses composantes, lutte pour se libérer de la politique criminelle de l’État malien qui nie nos existences, ruine notre territoire et affame nos peuples. Il est vrai que nous traversons actuellement une période très difficile mais c’est aussi une période cruciale pour notre avenir, parce qu’il n’y a pas de droit plus légitime que celui de vivre dignement et librement sur sa propre terre et qu’il n’y a pas pire que d’être l’étranger de son propre pays.
Les peuples et les communautés humaines aspirent naturellement, et depuis toujours, à la justice, à la liberté et à la dignité. Ce sont des aspirations universelles, partagées par l’ensemble des peuples de la terre. Les principes fondamentaux que sont la liberté, la justice et la dignité doivent s’appliquer à tous les peuples, en tout lieu et en tout temps, sans distinction de race, de religion de langue ou de culture. Ce sont des valeurs sacrées applicables à tous les êtres humains. Il n’y a pas de raison que les peuples de l’Azawad en soient privées.
Le mouvement de l’Azawad est d’abord et avant tout un ensemble de valeurs humaines universelles que nous portons en nous depuis des millénaires. Nous estimons que la violation des droits humains est une grave violation que nous ne pouvons pas accepter.
Notre mouvement œuvre dans le sens de la confirmation du droit des êtres humains à disposer librement d’eux-mêmes, à vivre dans la dignité et à jouir de tous leurs droits naturels.
Le droit à l’autodétermination est le droit le plus important qui soit issu des luttes des peuples au cours de l’histoire de l’humanité. C’est au nom de la charte universelle des droits de l’homme, du principe de la criminalisation du colonialisme et de l’occupation illégale des territoires d’autrui ; au nom de tous les pactes similaires tels que le droit des peuples à choisir le système de gouvernance qui leur convient, le droit des peuples à disposer de leurs terres et de leurs richesses, c’est au nom de tous ces droits consacrés par le droit international, que le mouvement de l’Azawad, dans ses diverses composantes, résiste à ceux qui tentent de le jeter hors de la roue de l’histoire par tous les moyens possibles.
C’est pour cela qu’aujourd’hui, nous appelons les organismes internationaux, les démocrates du monde entier ainsi que les États de la région à assumer leurs responsabilités pour qu’il soit mis fin au massacre perpétré par le régime malien contre les peuples de l’Azawad et pour soutenir les revendications légitimes des Azawadiens.
Depuis l’indépendance du Mali, la tyrannie et l’arrogance absolue constituent le seul quotidien des peuples de l’Azawad. La création des États postcoloniaux tel que le Mali ne représente pour nous qu’une succession de grands malheurs vécus dans une indifférence générale indigne de la race humaine.
Bien que le mouvement de libération de l’Azawad soit l’un des plus anciens mouvements de lutte des peuples pour l’acquisition de leurs droits légitimes, il continue de souffrir de l’abandon et de l’indifférence de la communauté internationale au point où les peuples de l’Azawad se demandent s’ils sont concernés par les droits de l’homme au même titre que les autres peuples ? Pourquoi le monde entier ignore les génocides auxquels ils sont exposés depuis tant d’années ? L’Azawad subit depuis la création de l’État du Mali une succession de génocides, de révoltes, de pseudos accords jamais respectés, de pseudos apaisements, de déplacements de populations, d’assimilations forcées et d’humiliations sans que personne ne réagisse. Pourtant nous sommes aussi constitués d’hommes et de femmes, tout comme les autres peuples qui ont subi des situations similaires telles que l’Érythrée, le Kosovo, le Timor oriental et le Sud Soudan au Darfour.
La détresse du peuple de l’Azawad depuis l’avènement de l’État-nation
Les Peuples de l’Azawad furent, avant d’entrer dans le colonialisme français en Afrique, une communauté vivant sous un système de fédérations fondés sur l’étendue de leurs terres. Ils contrôlaient l’ensemble du territoire selon une conduite démocratique rare en Afrique et caractérisée par la séparation entre ces autorités, conformément aux principes reconnus aujourd’hui dans tous les systèmes modernes.
Il y avait trois sultanats sur la terre d’Azawad, maintenant connu sous le nom du nord du Mali. Ces sultanats étaient coordonnés dans la gestion de tout le pays dans un système politique et social commun dans le respect de la diversité des peuples le composant. Le secteur scientifique y était également développé notamment dans la ville de Tinbouctou. Celle-ci était connue par sa prospérité de son industrie traditionnelle ainsi son autosuffisance économique.
Les peuples de l’Azawad avaient vécus de façon générale, en paix avec leurs voisins. Ils étaient liés entre eux par leurs relations de bon voisinage, le commerce et les échanges culturels. Une fois la colonisation française arrivée, les Azawadiens avaient continuellement menés, de 1894 à 1954, des batailles de résistance contre l’occupation française pour défendre leurs terres et leur héritage social, culturel, et politique, construit sur des milliers d’années.
Puis le retrait français de l’Afrique commença et les peuples de l’Azawad ont pris conscience de l’importance et de la gravité de toute décision dans ces moments historiques. Alors, les peuples de l’Azawad ont présenté une lettre signée par près de quatre cents figures emblématiques représentant l’ensemble des composantes de l’Azawad. La lettre adressée au gouvernement français demandait la restitution de l’indépendance du territoire de l’Azawad sans le réaffecter à un autre territoire. Les peuples de l’Azawad avaient obtenu la promesse de leur indépendance. Mais, la promesse ne fut pas tenue en raison de certaines interventions régionales et internationales et l’Azawad a fini par être lié à un corps étranger qui ne lui garantissait en rien un quelconque développement économique, social, culturel ou technologique, ni même le minimum de respect dû à la dignité humaine.
La réalité du Mali commença alors à se manifester, c’était un État venu pour prendre et non pour donner ou partager tout au moins. Les premiers projets dans l’Azawad étaient d’imposer le communisme et la pensée socialiste avec le gouvernement du dictateur Modibo Keita. Cette politique était fondée sur la dépossession des Azawadiens de leurs terres et de leurs animaux pour devenir des biens de l’État. Cette politique était également fondée sur la politique des mariages forcés visant à éliminer la diversité ethnique au sein des peuples de l’Azawad. Clairement, ce qui était exigé de l’Azawad était sa disparition en tant qu’entité ayant ses propres particularités. Ce n’était pas l’unité des peuples et la création d’un État démocratique dans lequel tous participent et bénéficient de la diversité culturelle et ethnique.
Le premier des soulèvements Azawadiens contre la dictature et le racisme était en 1963. Mais le Mali avait utilisé des méthodes odieuses pour éradiquer le combat des Azawadiens pour la liberté en passant par l’assassinat des personnes âgées, les gardiens de la mémoire, la mise à feu des camps, l’extermination des animaux et l’empoisonnement des puits. Ces pratiques reflétaient bien la politique réelle de l’État du Mali dont l’objectif réel n’était pas d’éliminer les éléments de le révolte seulement, mais il s’agissait bien d’un nettoyage ethnique visant à éradiquer l’ensemble de la communauté, accompagnée en cela de la famine et de la politique de la terre brûlée. La résistance fut alors avortée avec une brutalité inouïe, grâce à l’aide de Ben Bella en Algérie et du roi Hassan II du Maroc, qui ont remis les dirigeants politiques de la révolution azawadienne au gouvernement malien, provoquant auprès des peuples de l’Azawad un choc énorme. C’est ainsi que se termina le soulèvement de 1964.
La situation continua ainsi avec son lot d’assassinats et de déplacements, de famine, et d’humiliation. Les tentatives d’éliminer les cultures autochtones et d’éradiquer le sentiment national azawadien s’est poursuivi jusqu’à ce que les peuples de l’Azawad en arrivent à décider d’entamer sa deuxième Révolution en 1990. Cette seconde révolution s’est caractérisée par des massacres encore pires que ceux de Modibo Keita. Les événements de la seconde révolution vont aboutir au 1er Accord en Algérie qui prévoyait un statut particulier pour les zones de l’Azawad. Mais le Mali a vite trouvé un moyen facile de ne pas respecter les dispositions du traité en organisant un coup d’État contre le système de Moussa Traoré. Le rôle d’Amadou Toumani Touré, en tant qu’homme politique du Mali, a commencé par la formation, en 1993-1994, d’une milice dirigée contre l’Azawad et qui visait à remettre en question leur droit d’exister en Afrique en général et à accélérer le mouvement de la migration des populations. Ces milices avaient déjà commis des massacres contre des civils, tuant plus de 700 civils chez les femmes et les enfants et les personnes âgées. Tout cela s’est passé sous les yeux de la communauté régionale et internationale.
La situation dramatique des peuples de l’Azawad persista jusqu’au soulèvement de 2006 qui s’est terminée avec le 3e Accord entre le peuple d’Azawad et le gouvernement malien, toujours sous les auspices de l’Algérie, et comme ses prédécesseurs, il était sensé garantir les conditions de respecter la vie privée des autres aires culturelles et politiques de l’Azawad, d’accélérer les projets de développement, de réduire le nombre de troupes militaires dans des zones peuplées et d’arriver à la formation d’unités militaires constituées essentiellement d’habitants de l’Azawad afin de prendre en charge la sécurité de la région. Mais, encore une fois, c’était exactement le contraire qui s’est réalisé depuis la signature de l’Accord. Le Mali se précipita à commettre d’autres crimes avec le meurtre d’un membre du précèdent soulèvement Barka Cheikh et de son compagnon, Mohamed Ag Mossa. Les peuples de l’Azawad n’ont vu aucun suspect traduit en justice. Bien au contraire, le Président a signé la décision de l’exercice parlementaire de 1996 en graciant tous les responsables des événements liés à l’Azawad. Les peuples de l’Azawad ont été alors considérés comme étant tous des criminels méritant ce qui leur était arrivé. Mais tout cela était une question de stratégie de la domination des minorités ethniques orientée et délibérée, exploitant la définition de l’État comme étant le seul à avoir le droit légitime de monopoliser l’usage de la force.
Les résultats de l’annexion de l’Azawad au Mali
1. L’entretien du désespoir dans la communauté de l’Azawad en tentant de court-circuiter tout espoir d’avoir un rôle dans la gestion de sa vie politique, sociale, culturelle et économique ; opérant à travers le blocage de toutes les tentatives révolutionnaires dans le but de réaliser quelque chose de leurs aspirations, en éliminant le sentiment de la nécessité de préserver les spécificités culturelles et sociales de l’Azawad. Quant à la protection du reste de l’humanisme de l’Azawad, elle a été contrecarrée en se servant des méthodes de la malice et de la ruse, comme le fait de créer le chaos dans la société en montant une partie de sa population contre l’autre pour couper la route à toute action collective utile. Tout cela était bien entendu accompagné du refus systématique du gouvernement malien d’appliquer les Accords signés.
2. Les pressions régionales sur les peuples de l’Azawad au cours de chaque soulèvement contre son amère réalité et les contraindre à des accords qui ne contiennent guère que des aspirations minimales de sa Nation. De surcroît, le gouvernement malien n’hésite pas, devant les médiateurs et la communauté internationale, à trahir les termes de ces accords. Des promesses sont lancées aux peuples de l’Azawad ; mais, au Mali, les expériences des accords de 1991, 1992, 1996, 2006 et 2008 ont démontré que le gouvernement n’a jamais eu aucune intention d’appliquer quoi que soit.
3. La transformation de la région de l’Azawad de façon volontaire, en une région livrée à toutes les activités interdites dans le monde en l’occurrence, la soi-disant cellule d’Al-Qaïda au Maghreb islamique. Cette raison providentielle a permis à l’État malien de poursuivre ses activités telles que les enlèvements, les massacres et la politique de marginalisation. Le gouvernement malien prétexte ainsi la présence du terrorisme pour justifier ses crimes contre l’humanité commis contre les peuples de l’Azawad. L’existence de cette organisation terroriste donne une couverture suffisante à l’État malien pour continuer son blocus sur les zones densément peuplées de nos populations en vue de poursuivre les politiques de mise à mort lente mais certaine et dirigée au plus haut niveau du gouvernement malien.
Pour toutes ses raisons, notre mouvement a décidé de combattre cet État criminel et pervers dans ses modes d’actions. Et effectivement, jugez-en par vous-mêmes, suite aux combats qui ont opposés nos armées, ils ont attaqué nos familles, brûlé nos maisons, saccagé nos biens et terrorisé nos femmes et nos enfants. Pour se venger de la déroute de l’armée malienne dans notre territoire, le Mali n’a rien trouvé de mieux à faire que de se venger sur les familles Tamasheq vivant à Kati et Bamako. Des centaines de familles de Tamasheq quittent précipitamment leurs maisons et se dirigent actuellement vers les frontières du Sénégal, de la Mauritanie, du Burkina Faso, et du Niger pour échapper aux exactions commises contre eux. Nous rappelons à l’opinion internationale que, contrairement à l’armée malienne, nos troupes ne s’attaquent qu’aux institutions militaires et jamais à des civils.
L’armée malienne doit savoir qu’elle ne pourra jamais nous déposséder de notre détermination à mener jusqu’au bout notre combat pour la liberté. À travers leurs actes irresponsables, ils ne font qu’aiguiser davantage notre croyance aux idéaux qui nous animent. L’exil de nos sœurs, de nos aînés, de nos mères à travers les pays doit prendre fin ! Nous avons un territoire et il nous appartient depuis la nuit des temps.
Toutefois, nous tenons à rappeler à l’opinion régionale et internationale que cette situation de guerre nous a été imposée par le Mali qui n’a respecté aucun de ses engagements et qui persiste à refuser tout dialogue sur le principe du respect du droit à l’autodétermination du peuple de l’Azawad. Nous restons ouverts à tout dialogue mais uniquement dans le cadre du respect du principe du droit à l’autodétermination. Le MNLA met en garde, toute partie qui se dressera contre la volonté du peuple de l’Azawad pour son droit à l’autodétermination. À cet effet, nous rejetons les tractations actuelles et nous nous désolidarisons des accords actuellement en cours à Alger.
Notre combat est juste et légitime, l’Azawad retrouvera sa liberté. Rien ni personne ne nous détournera de notre objectif. Le MNLA est plus que jamais déterminé à continuer les opérations militaires jusqu’à la reconnaissance officielle par le Mali du droit à l’autodétermination du peuple de l’Azawad.
Nous demandons simplement aux divers organismes internationaux, au Comité International de la Croix Rouge, à la Fédération internationale des croix rouges et croissants rouges, au Haut-Commissariat des Nations Unies aux Réfugiés, à toutes les organisations humanitaires gouvernementales ou non gouvernementales, de répondre à l’appel des populations de l’Azawad qui souffrent de cette situation de guerre imposée par le Mali dans le but de nous faire renoncer à nous-mêmes pour nous faire fondre dans un système qui méprise et martyrise notre existence.
Tanemmirt-nwen
Je vous remercie pour votre solidarité et votre soutien.
Mossa Ag Attaher
Chargé de communication du MNLA
Publié sur tamazgha.fr, 4 février 2012.