[Maroc] Les manifestations de Safi prennent un tour violent

 

Les services de sécurité marocains et les manifestants se rejettent la responsabilité d’une récente explosion de la violence à Safi.

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Des devantures brisées et des biens incendiés dans un bureau du ministère de l'Intérieur à Safi témoignent des violences des récentes manifestations.

 

Plusieurs dizaines de manifestants marocains et de policiers ont été blessés et des bureaux gouvernementaux incendiés la semaine dernière à Safi lors d’affrontements occasionnés par la mauvaise situation économique.

Ces heurts ont débuté lorsqu’une centaine de demandeurs d’emploi ont organisé un rassemblement, lundi 1er août, sur la ligne ferroviaire qui relie les mines de phosphate et les usines chimiques au port. Les manifestants, qui demandaient des emplois à l’Office chérifien des phosphates (OCP), avaient bloqué les voies pour empêché tout trafic.

Lorsque les forces de sécurité sont intervenues pour mettre un terme à ce rassemblement, les manifestants se sont rendus dans les quartiers résidentiels du centre-ville. Les affrontements avec les forces de sécurité se sont poursuivis durant la nuit.

Près de vingt manifestants ont été arrêtés dans le cadre de ces violences, accusés d’incitation à l’émeute et d’incendie de bâtiments publics. Un bureau du ministère de l’Intérieur et un commissariat de police comptent parmi les bâtiments endommagés lors de ces agitations.

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Lundi après-midi, plusieurs manifestants s’en sont pris à un bureau administratif du ministère de l’Intérieur dans le quartier d’al-Qalia. Les manifestants ont retiré les chaises, les tables, les documents et les ordinateurs du bâtiment et les ont incendiés dans la rue. Un autre groupe aurait tenté de mettre le feu à un poste de police dans le quartier de Koki.

Si les autorités imputent la responsabilité de ces destructions aux manifestants, d’autres affirment en revanche que les forces gouvernementales sont à l’origine de ces actes de vandalisme.

Mercredi dernier, le bureau local de l’Association marocaine des droits de l’Homme (AMDH) a affirmé que les forces de sécurité avaient engagé des individus pour incendier les bâtiments administratifs, pour tenter de justifier leur réaction violente contre les manifestants et l’arrestation des membres de la Coordination des chômeurs.

Plus tard durant la même journée, la Direction générale de la sûreté nationale (DGSN) s’est empressée de publier un communiqué démentant toute implication dans ces incendies et appelant à l’ouverture d’une enquête sur les allégations de l’AMDH.

Les autorités ont par la suite arrêté Abdel Ghani Eweina, le responsable du bureau local de l’AMDH, avant de le relâcher plus tard dans la soirée du 3 août après l’avoir interrogé sur les allégations de son association.

Le porte-parole du gouvernement marocain et ministre de la Communication Khalid Naciri a qualifié les évènements de Safi de déviations, ajoutant que « elles sont graves et n’ont rien à voir avec l’expression démocratique d’une opinion ».

Naciri a accusé des entitées non désignées de « manipulation consciente » des demandes légitimes des personnes sans emploi « à des fins et dans des buts qui n’ont rien à voir avec la démocratie, les réformes ou les intérêts des citoyens ». Il a appelé l’opinion publique à aider les autorités dans l’application de la loi.

Safi avait déjà été auparavant le théâtre de manifestations violentes. La manifestation de lundi est intervenue moins d’une semaine après que le Conseil national des droits de l’Homme eut présenté son rapport sur les circonstances de la mort de Kamal Amari, un militant du Mouvement du 20 février. Amari était décédé après avoir été blessé lors d’une manifestation à Safi le 29 juin.

Mais le conseil a refusé de révéler les détails de ce rapport, expliquant qu’il avait été envoyé aux ministères de l’Intérieur et de la Justice. Ce rapport comporte les conclusions des enquêteurs sur la mort d’Amari, ainsi que des recommandations de mesures nécessaires.

Le procureur général de Safi avait auparavant déclaré dans un communiqué qu’Amari était décédé des suites d’une infection pulmonaire. Mais sa famille et le Mouvement du 20 février affirment pour leur part qu’il est mort après avoir été battu par la police.

Leur presse (Mawassi Lahcen, Magharebia), 7 août 2011.

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