[Montréal] « La police nous détruit, la police nous tue »

La mort, sous les balles de policiers du SPVM, de deux personnes rue Saint-Denis, a réveillé de mauvais souvenirs pour plusieurs familles de victimes de bavures policières la semaine dernière. Ensemble, elles réclament aujourd’hui, une fois encore, la fin de la « brutalité policière » et de « l’impunité ».

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Des proches de personnes décédées suite à une intervention policière ont dénoncé les méthodes du SPVM. De gauche à droite : Bridget Tolley, Lilian Villanueva et Julie Matson.

Lorsqu’elle a appris la mort, mardi matin, de Mario Hamel, un sans-abri en crise, et de Patrick Limoges, un passant atteint par une balle perdue, Francine Registre a secoué la tête. Son frère Quilem a trouvé la mort en 2007, sous les décharges électriques des pistolets Taser de policiers du SPVM. « Je présente toutes mes condoléances aux familles Hamel et Limoges, nous savons ce qu’elles vivent, explique la jeune femme. On n’a eu ni aide, ni soutien. Et ça fait trois ans et demi qu’on se bat en justice. J’aimerais que ça change. »

Au-delà de la colère, les familles des victimes de bavures policières déplorent surtout que les enquêtes sur les policiers soient encore confiées à la police. « Il faut trouver un autre mécanisme d’enquête. Si le gouvernement tient à maintenir un minimum de crédibilité, il faut se débarrasser de ce mécanisme. C’est une machine qui sert à blanchir les policiers », soutient Alexandre Popovic, porte-parole de la Coalition contre la répression et les abus policiers (CRAP).

La SQ a commencé la semaine dernière à interroger les policiers impliqués dans l’intervention de la rue Saint-Denis. Malgré cette relative rapidité, Alexandre Popovic estime que les délais sont toujours trop longs. « C’est pas normal qu’on attende 3 ou 4 jours. Je pense que ça va prendre une enquête publique. On risque d’apprendre que des témoins civils ont été rencontrés plus rapidement que les policiers témoins, dit-il. Ça prend une grande dose de naïveté pour croire ces enquêtes-là. »

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Près de 3 ans après la mort de son fils Freddy, Lilian Madrid Villanueva n’a toujours pas ravalé ses larmes, ni sa colère. Secouant la tête en écoutant Francine Registre, elle explose. « Oui, j’étais très en colère en écoutant la nouvelle. Je me suis dit, mais que se passe-t-il ? Pourquoi la police tue la famille ? Je ne comprends pas. La police n’est pas bonne. Elle nous détruit. J’ai perdu mon fils pour rien. Et ces deux hommes sont morts pour rien », s’exclame-t-elle.

Lilian Villanueva juge avec sévérité le processus d’enquête sur la police. « Il n’y aura pas de justice, il n’y aura pas de coupable. La police nous détruit, la police nous tue. »

Au lendemain de la fusillade, le ministre de la Sécurité publique Robert Dutil s’était montré ouvert à un changement dans le processus d’enquête sur la police. Cette ouverture est loin de convaincre la CRAP. « Il a joué à l’autruche pendant longtemps. C’est difficile pour lui de continuer, mais il serait temps qu’il passe de la parole aux actes. »

Leur presse (Anabelle Nicoud, La Presse), 14 juin 2011.

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