À Lyon dans la rue — et sous la pluie — contre les racistes et leurs cochonneries – 14 mai

Sa manifestation ouvertement islamophobe interdite, l’extrême-droite radicale avait quand même maintenu son appel national à rassemblement ce samedi. La mobilisation antifasciste et antiraciste était donc également maintenue, malgré la pression de la préfecture et de la presse pour faire passer cette journée comme une simple « guerre de clans ». Les violences racistes perpétrées ensuite à St Jean, jamais vues jusqu’alors, montrent que la mobilisation nécessaire à Lyon contre l’extrême-droite doit devenir massive et se diversifier, plus qu’elle ne l’est aujourd’hui.

Retour et photo sur une journée sombre et mouvementée.

Mise à jour diman­che 15/05 11h : Samedi soir, après leur pogrom dans le vieux Lyon (voir récit ci-des­sous) les nervis par­ti­ci­pant au ras­sem­ble­ment iden­ti­taire se sont livrés dans les pentes de la Croix-Rousse à de mul­ti­ples raton­na­des, atta­quant les lieux alter­na­tifs, le bar le Pheo­bus, et sur­tout de nom­breu­ses per­son­nes, sou­vent au hasard. Selon nos sour­ces près d’une dizai­ne de per­son­nes sont encore hos­pi­ta­li­sées suite à ces vio­len­ces, cer­tai­nes dans un état grave.

Par ailleurs nos cama­ra­des sont tou­jours en garde à vue. Un rassemblement de sou­tien a lieu aujourd’hui à partir de 13h devant le com­mis­sa­riat de 2e arr. 47 rue de la Charité.

Lyon est depuis un peu plus d’un an un enjeu pour l’extrême-droite radi­cale. Les réseaux iden­ti­tai­res et néo-nazis cher­chent tout deux à y pour­sui­vre leur implan­ta­tion et à s’y péren­ni­ser dans le pay­sage poli­ti­que. Agressions mul­ti­ples et ouver­tu­res de locaux fas­cis­tes ont planté le décor depuis plu­sieurs mois déjà.

Samedi 14 mai le Bloc Identitaire et son émanation locale, Rebeyne, ont tenté d’expri­mer dans la rue leur obses­sion xéno­phobe et leur désir d’une Europe blan­che en orga­ni­sant une « mani­fes­ta­tion des cochons » isla­mo­phobe [Voir notamment l’analyse proposée sur le site REFLEXes]. Suite à son inter­dic­tion par la Préfecture et la média­ti­sa­tion qui a suivie, les iden­ti­tai­res se sont pré­sen­tés en vic­ti­mes et ont tenté, avec un ras­sem­ble­ment pour la « liberté d’expres­sion » (sic) d’en faire un sym­bole natio­nal, voire inter­na­tio­nal [Cet aspect est visible à travers la mobilisation de groupes identitaires de toute la France — des bus de Bretagne, Nice, etc. — mais aussi par la venue de représentants de groupes xénophobes étrangers, comme l’English Defense League].

Identitaires et communication, tout un poème…

Les Identitaires se sont donc retrou­vés à 14h30 pour un ras­sem­ble­ment sta­ti­que sur la place St Jean, pour l’occa­sion bou­clée par les flics. Le ras­sem­ble­ment se vou­lait très « com­mu­ni­quant » et les tenues « sapin de noël » avaient beau être inter­di­tes, la façade n’a guère tenu long­temps. Les cranes rasés y étaient nom­breux et l’isla­mo­pho­bie a très rapi­de­ment pris le pas sur les slo­gans plus poli­cés que dési­raient impo­ser les iden­ti­tai­res. D’autant plus que ces der­niers par­ta­geaient la place et la mani­fes­ta­tion avec leurs frères enne­mis du Bunker Korps Lyon et autres néo-nazes. Les slo­gans à tona­lité nazie ont d’ailleurs été légion à St Jean cette après-midi. Leur fai­blesse numé­ri­que (moins de 400) malgré une mobi­li­sa­tion inter­na­tio­nale, montre clai­re­ment que les ten­sions inter­nes à l’extrême-droite empê­chent encore la com­mu­ni­ca­tion des iden­ti­tai­res de faire recette.

Les « troupes » nationalistes place St Jean

Pendant ce temps la mani­fes­ta­tion anti­fas­ciste, oppo­sée à la pré­sence des fachos dans les rues de Lyon mais pro­tes­tant également contre la pré­sence des deux locaux d’extrême-droite [La traboule des identitaires dans le vieux lyon, montée du Change, et le local des néo-nazis à Gerland, impasse de l’Asphalte] et les nom­breu­ses agres­sions de ces der­niers mois se met en place dès 14h sur la place des Terreaux.

La mani­fes­ta­tion, d’envi­ron un bon mil­lier de per­son­nes lors du départ, plus par la suite, com­po­sée de nom­breux cor­tè­ges et col­lec­tifs de gauche et d’extrême-gauche malgré une pro­por­tion mar­quée de mili­tants liber­tai­res, a ensuite pris le chemin de Bellecour sous les slo­gans anti­fas­cis­tes. Arrivée sur place, une prise de parole a eu lieu devant le Veilleur de pierre [Mmonument érigé à la mémoire des cinq résistants assassinés par les Allemands le 27 juillet 1944, en représaille à l’explosion organisée par la Résistance au café le Moulin à Vent la nuit précédente. Les cinq hommes n’étaient pas les responsables de l’attentat. Ils se nomment Albert Chambonnet, Gilbert Dru, Léon Pfeffer, René Bernard, Francis Chirat.].

Prise de paroles au Veilleur de pierre

Le cor­tège a ensuite repris son chemin, gla­nant des mani­fes­tants au pas­sage, en per­dant d’autres sous la pluie, jusqu’à la Guillotière puis, via l’avenue de Saxe, la pré­fec­ture et la place Guichard. Tout le long du par­cours les cor­tè­ges vivants se répon­daient par slo­gans, contre le racisme d’État, contre la pré­sence fas­ciste et la xéno­pho­bie ambiante :

« Le fas­cisme c’est la gan­grène, on l’élimine ou on en crève. »

« Alerta, Alerta, Antifascista ! »

« Pas de fachos dans les quar­tiers,
pas de quar­tier pour les fachos. »

Dispositif policier autour de la préfecture

Après quel­ques prises de paro­les les grou­pes se dis­per­sent vers 16h, cer­tains pre­nant le métro ou rejoi­gnant la Guillotière, alors qu’un groupe de quel­ques cen­tai­nes repart en cor­tège en direc­tion des pentes de la Croix-Rousse. Quelques voi­tu­res et four­gon­net­tes de police ont suivi le dépla­ce­ment à dis­tance, cette der­nière sem­blant s’habi­tuer à ce que les liber­tai­res ren­trent de mani­fes­ta­tion en cor­tè­ges sau­va­ges, tant mieux.

Cortège sauvage en direction des Terreaux

Pendant ce temps les fachos, partis de leur ras­sem­ble­ment, remon­tent les rues en direc­tion de la Croix-Rousse, dans l’idée de casser de l’anti­fas­ciste et pro­ba­ble­ment d’inves­tir ce quar­tier sym­bo­li­que de la résis­tance. Un groupe d’anti­fas­cis­tes sans connaître ce mou­ve­ment se sont diri­gés vers St Jean : la ren­contre a lieu au milieu du pont qui enjambe la Saône entre St Paul et Terreaux. Affrontement bref mais vio­lent, puis­que la police s’y jette immé­dia­te­ment, coin­çant une partie des anti­fas­cis­tes entre eux et les fachos. Quatre de nos cama­ra­des ont été arrê­tés à cette occa­sion, la mobi­li­sa­tion s’orga­nise pour les sou­te­nir.

Les nervis faf en face de St Paul

Intervention policière sur l’affrontement

Explosion de vio­lence raciste à St Jean !

Repoussés dans le Vieux Lyon, les iden­ti­tai­res et autres néo-nazis, énervés, se met­tent à y casser les devan­tu­res des kebabs et autres com­mer­ces tenus — ou sup­po­sés être tenus — par des immi­grés. Plusieurs per­son­nes ont été agres­sées. Ce déchaîne­ment ouver­te­ment raciste, digne d’un pro­grom, ne semble pour l’ins­tant pas être dif­fusé dans la presse. La police inter­vien­dra dans la foulée, inter­pel­lant plu­sieurs dizai­nes de nervis d’extrême-droite (de 50 à 80 selon les sour­ces).

Le masque de com­mu­ni­ca­tion des iden­ti­tai­res est donc bien tombé aujourd’hui, malgré leurs bal­lons rose bon­bons, puis­que leurs trou­pes ont montré leur visage xéno­phobe, vio­lent et viri­liste.

Quai de Saône

Si c’est une réus­site pour une mani­fes­ta­tion anti­fas­ciste de réunir un bon mil­lier de per­son­nes, sous la pluie bat­tante, la gra­vité des faits dénon­cés depuis des mois par les dif­fé­rents col­lec­tifs devrait déclen­cher une mobi­li­sa­tion plus grande. Le racisme d’une telle marche des cochons aurait dû mobi­li­ser une partie beau­coup plus impor­tante de la popu­la­tion lyon­naise, pour faire com­pren­dre que Lyon est et res­tera une ville de la diver­sité.

La pres­sion de la pré­fec­ture et de la presse locale toute la semaine sur la mani­fes­ta­tion anti­fas­ciste et anti­ra­ciste, la fai­sant passer pour une simple et bête mobi­li­sa­tion à l’extrême opposé a quand même, malgré la peur des vio­len­ces, réus­si à mobi­li­ser. Mais cette mobi­li­sa­tion doit main­te­nant, à la vue sur­tout des vio­len­ces dans les rues de St Jean, après celles dont les mili­tants de gauche ont été les vic­ti­mes ces der­niers mois, aler­ter l’ensem­ble des Lyon­nais-e-s sur le danger que font peser ces grou­pes sur notre ville.

D’autres formes de lutte res­tent à penser pour que ces vio­len­ces ne se repro­dui­sent jamais, pour que ces appels racis­tes ces­sent, pour que les habi­tant-e-s pro­ches des locaux néo-fas­cis­tes ne subis­sent pas la loi du silence face à ce climat délé­tère.

Ce combat, s’il est celui des « anti­fas­cis­tes », est aussi celui de toutes les per­son­nes visées par cette poli­ti­que de la haine et de toutes les per­son­nes qui la refu­sent.

Organisez-vous, orga­ni­sons-nous !

À Lyon le racisme ne pas­sera pas !

Petite revue de presse du jour

— Reportage France info

— Le Pro­grès :
Manifestation de grou­pus­cu­les d’extrême-droite à Lyon : 80 per­son­nes inter­pel­lées (photo de salut nazi en prime)
L’extrême-droite radi­cale sème la pani­que dans Saint-Jean
Une contre mani­fes­ta­tion… à gauche toute

— Lyon Capitale : Extrême-droite/gauche : des débor­de­ments malgré des mobi­li­sa­tions très cadrées

— Lyoninfo : La manif contre l’« isla­mi­sa­tion » suivie d’échauffourées

Compléments d’info sur Rebellyon.

Rebellyon, 14 mai 2011.

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