[Bolivie] Intervention policière contre la marche indigène, projet routier « suspendu »

Bolivie : Morales suspend un projet routier au cœur d’intenses protestations

Le gouvernement bolivien a fait marche arrière lundi et suspendu un projet de route controversée à travers un parc naturel amazonien, devant la vague de protestations suscitée dans le pays par la répression, dimanche, de marcheurs indigènes opposés à ce projet.

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Le président Evo Morales a annoncé la suspension, dans l’attente d’une consultation populaire, du chantier de route reliant les provinces de Beni (nord) et Cochabamba (centre), qui devait couper une réserve écologique d’un million d’hectares, terre ancestrale de 50.000 Indiens amazoniens.

Dans l’attente de ce débat national et afin que les provinces décident, le projet de route à travers le Territoire indigène et Parc national Isiboro Secure est suspendu, a déclaré le chef de l’État, dans une déclaration lue lundi soir à la présidence.

Il n’a pas précisé la durée de la suspension, mais lorsqu’il avait évoqué il y a quelques jours un référendum régional sur la route, des fonctionnaires avaient suggéré un délai de six mois à un an pour organiser la consultation.

La route de 300 km, dont le chantier devait être livré en 2014, était à l’origine d’une marche de protestation d’un millier d’Indiens amazoniens depuis 40 jours de Trinidad (nord) vers La Paz, à 600 km.

Ce projet, co-financé par le Brésil et construit par la firme brésilienne OAS, devait désenclaver, notamment vers le Brésil voisin, deux provinces rurales de Bolivie, l’un des pays les moins développés d’Amérique du Sud. Il est présenté par le gouvernement comme un enjeu économique vital.

Les indigènes dénonçaient l’impact écologique sur le parc, mais accusaient aussi Morales de vouloir ouvrir de nouvelles terres aux cultivateurs de coca, une famille syndicale et politique dont il est issu.

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La déclaration de Morales intervient après un vague d’indignation lundi, et des manifestations en province, en réaction à la dispersion musclée par la police, dimanche, des marcheurs, dont des femmes et enfants, qui campaient à mi-chemin de leur périple à Yucumo (nord-est).

L’intervention chaotique, à coups de gaz lacrymogènes, a fait deux blessés au moins chez les indigènes, et selon eux plusieurs enfants perdus et séparés de leurs parents. Elle a été condamnée par des défenseurs de droits de l’Homme et profondément déplorée par la délégation de l’ONU en Bolivie.

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« J’étais convaincu que nous avions planifié la route en écoutant le peuple », a déclaré Morales, qui a affirmé a plusieurs reprises que l’opposition à la route était le fait d’une minorité, manipulée politiquement.

« Que le peuple décide, particulièrement les provinces concernées », a-t-il réaffirmé lundi.

Il a convenu que les incidents de dimanche étaient impardonnables, et annoncé une commission d’enquête sur des événements qui laissent beaucoup à désirer.

La longue marche indigène depuis mi-août avait cristallisé un soutien croissant, parfois opportuniste, bien au-delà des indiens amazoniens, parmi des opposants de droite ou ex-alliés du pouvoir socialiste.

Morales, premier président amérindien (aymara) de Bolivie, et auteur d’une Constitution (2009) plaçant l’indigène au cœur de la nation, se trouvait lundi encore plus en porte-à-faux après l’intervention de police de dimanche.

« Nous ne comprenons pas : c’est un gouvernement qui se dit indigène, et qui s’en prend aux indigènes », a déclaré à l’AFP Rafael Quispe, un des leaders de la marche.

Un autre dirigeant, Adolfo Chavez, avait affirmé depuis San Borja, où il avait été évacué de force avec quelque 200 marcheurs, la détermination des indigènes, éparpillés entre plusieurs villes du Beni, à se regrouper et reprendre la marche sur La Paz.

La principale centrale syndicale bolivienne, la COB, avait lancé vendredi un appel, renouvelé lundi, a une grève générale mercredi en soutien aux marcheurs.

Leur presse (Agence Faut Payer), 27 septembre 2011.

 

Bolivie : des habitants libèrent des indigènes gardés par la police

Des habitants de Rurrenabaque, dans le nord-est de la Bolivie, ont libéré lundi à l’aube quelque 300 indiens amazoniens que la police s’apprêtait à évacuer par avion, après que leur marche de protestation eut été dispersée, a indiqué le maire de la ville.

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Des habitants ont bloqué l’aéroport et empêché que les (indigènes) détenus soient transférés, a déclaré le maire Yerko Nunez sur la radio privée Panamericana, ajoutant que les policiers avaient été mis en fuite par l’intervention des habitants, qui n’a apparemment pas fait de blessés.

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Selon le récit du maire de cette localité de moins de 20.000 habitants, des policiers ont acheminé dans la nuit vers l’aéroport des cars avec plusieurs centaines d’indigènes à bord. Ils avaient été délogés dimanche de leur campement à Yucumo, à mi-chemin d’une marche de protestation de 600 km sur La Paz.

Après avoir appris la nouvelle, des habitants de Rurrenabaque se sont rendus à l’aéroport, ont occupé la piste pour empêcher le décollage de l’avion et mis en fuite les quelques policiers qui escortaient les indiens, a ajouté l’élu local.

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La libération des centaines d’indiens à Rurrenabaque a été confirmée sur la radio catholique Fides par Adolfo Chavez, un dirigeant des marcheurs indiens, qui se trouvait à 150 km de là, à San Borja, en compagnie de 200 indigènes qui avaient réussi dimanche à échapper aux policiers.

L’intervention des habitants de Rurrenabaque suggère une forte réprobation populaire de l’intervention de la police dimanche à Yucumo contre le millier d’indiens amazoniens qui protestent depuis août, à travers une longue marche sur La Paz, contre un projet routier à travers un parc naturel et territoire indigène.

La ministre de la Défense, Cecilia Chacon, a démissionné lundi pour protester contre l’intervention policière à Yucumo.

Leur presse (Agence Faut Payer), 26 septembre 2011.

 

Bolivie : les indigènes se comptent après leur éviction par la force

Jenny Eutando éclate en sanglots : au lendemain de la dispersion par la force d’une marche d’Indiens amazoniens en Bolivie, cette mère d’ethnie siriono n’a toujours pas retrouvé Valeria, une de de ses petites jumelles, perdue dans le tumulte de l’intervention de police.

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Ma fille s’appelle Valeria Melgar… elle a 9 ans, elle est habillée en bleu. Je ne la trouve pas, elle n’est pas arrivée…, se lamente Jenny, en larmes, au milieu des indigènes à San Borja, ville située à 50 kilomètres de Yucumo, d’où ils ont été évincés la veille.

Dans une opération surprise, les policiers ont dispersé le campement des Indiens à Yucumo, usant de gaz lacrymogènes, les poursuivant à travers les broussailles, leur liant les mains avec du ruban adhésif. Et forçant tout le monde à embarquer dans des cars.

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Transportés pour la plupart à San Borja, officiellement pour éviter des affrontements avec des contre-manifestants à Yucumo, les Indiens parlent déjà pour certains de reprendre leur marche de 600 kilomètres vers La Paz, commencée mi-août pour protester contre un projet routier à travers un parc naturel.

Pour d’autres, il s’agit d’abord de récupérer les leurs.

Nous avons rencontré d’autres indigènes dans divers endroits autour de San Borja, plus loin on a trouvé quatre enfants sans leurs parents, et qui sont en pleurs, explique à l’AFP Maria Ines Seda, une habitante de San Borja, qui aide spontanément les déplacés.

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Le ministre bolivien de l’Intérieur a affirmé lundi qu’il n’y avait pas de disparitions rapportées par la police après l’intervention de Yucumo. Disparus, égarés… Pour Jenny, la distinction est ténue.

Deux blessés indigènes sont soignés à l’hôpital de San Borja pour des blessures à la tête.

« J’étais en train de protéger nos dirigeants, quand ils (les policiers) m’ont donné un coup de crosse (de fusil), et j’ai perdu connaissance », raconte à l’AFP Gabriel Torres, 23 ans, allongé sur son matelas de mousse, et qui se dit encore victime de malaises.

Juna Carlos Salazar, est encore vêtu de sa chemise ensanglantée : « il m’a fallu 14 points de suture à la tête », dit-il.

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À San Borja, où environ 200 indigènes ont pu se rassembler lundi, des femmes, des hommes, des enfants, arrivent au compte-goutte. Les informations, les rumeurs aussi, sur le sort de plus de 500 autres.

À Yucumo, où quelques-uns sont revenus lundi pour récupérer des affaires égarées, on parle de deux morts, un bébé de 3 mois et une personne âgée. Le ministre de l’Intérieur a fermement démenti lundi le moindre décès.

« Il y a ces versions (de morts), mais jusque là nous n’avions rien vu, on parle aussi de disparus. C’est pour ça qu’on demande un rapport de police, qu’on est en train de faire des listes », explique une militante de l’Assemblée des droits de l’Homme, Ligia Pinto.

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La marche des Indiens amazoniens, partis il y a 40 jours de Trinidad (nord) avait généré un soutien diffus au fil des semaines. L’intervention policière musclée de dimanche semble avoir consolidé ce soutien.

À Rurrenabaque plus au nord, 300 indiens ont pu échapper à la police lundi à l’aube, avec l’aide de la population locale qui a mis en fuite leur garde policière.

À La Embocada, hameau à mi-chemin entre Yucumo et San Borja, des habitants locaux ont improvisé un barrage de troncs et de pierres, sur l’unique route en terre battue. « Pour protester contre les abus de police, contre ce pouvoir absolu du gouvernement », lance l’un des piquets du barrage, Mario Callau.

Leur presse (Agence Faut Payer), 26 septembre 2011.

 

Bolivie : tollé après l’intervention policière contre une marche indigène

L’intervention musclée de la police bolivienne, dimanche, contre une marche d’Indiens amazoniens a soulevé un tollé contre le gouvernement, provoquant la démission d’une ministre et des mobilisations en soutien aux marcheurs.

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Les autorités se trouvaient lundi sur la défensive face aux gestes de soutien au millier d’indigènes, dont des femmes et enfants, dispersés à coup de gaz lacrymogène et déplacés de force dans des cars, dimanche à Yucumo (nord-est), a mi-chemin d’une marche de protestation vers La Paz entamée depuis 40 jours.

À Rurrenabaque, dans le nord-est également, des habitants ont convergé vers l’aéroport pour libérer quelque 300 indigènes délogés dimanche de Yucumo, a révélé le maire local, Yerko Nunez. La police s’apprêtait à renvoyer les indiens dans leurs régions d’origine.

« Des habitants ont bloqué (la piste de) l’aéroport et empêché que les (indigènes) détenus soient transférés », a affirmé M. Nunez sur la radio Panamericana, ajoutant que les policiers ont été mis en fuite par l’intervention de la population, apparemment sans faire de blessés.

À Santa Cruz (est), deuxième ville du pays, 16 indigènes se sont installés dans la cathédrale pour y observer une grève de la faim de soutien aux marcheurs. Six autres en ont fait de même dans une église de Cochabamba (centre).

Dans la capitale, une manifestation de soutien a rassemblé lundi quelques centaines de personnes au centre-ville.

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Un peu plus tôt, la ministre de la Défense Cecilia Chacon avait annoncé sa démission en exprimant son désaccord avec l’intervention de Yucumo.

« Je ne partage pas la décision d’intervention contre la marche, et je ne peux la justifier dans la mesure où d’autres solutions existaient », a déclaré Mme Chacon, dans une lettre adressée au président Evo Morales.

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Une certaine confusion persistait par ailleurs lundi sur le bilan de l’opération policière. La police a fait état dimanche de « deux indigènes » et quelques policiers blessés, mais un « Comité de communication de la marche » a annoncé dans un communiqué à l’AFP la mort d’un bébé de trois mois dans la cohue, et a assuré que sept enfants restaient introuvables.

Le ministre de l’Intérieur Sacha Llorenti, a catégoriquement démenti ces informations lundi, affirmant à la presse qu’« il n’y a aucune information sur des personnes disparues, ni d’aucun mineur décédé ».

M. Llorenti a défendu l’intervention, plaidant qu’elle visait à prévenir des affrontements à Yucumo, où un barrage de contre-manifestants pro-gouvernementaux était résolu à barrer la route aux marcheurs. La police a aussi démantelé ce barrage dimanche.

L’opération policière a néanmoins été condamnée par des défenseurs boliviens des droits de l’Homme et a été « profondément déplorée » par la chef de délégation de l’ONU dans le pays andin, Yoriko Yasukawa.

Face à cette vague de réprobation, ce qui a motivé la marche passait lundi au second plan : l’opposition de communautés indigènes à un projet de route de 300 kilomètres qui doit traverser, dans le centre du pays, un parc naturel en Amazonie, terre ancestrale de 50.000 indiens.

La marche de ces dernières semaines avait suscité un soutien croissant, bien au-delà des indiens d’Amazonie, parmi des opposants ou ex-alliés du pouvoir socialiste. Le président Evo Morales, lui-même amérindien, se trouvait lundi encore plus en porte-à-faux après l’opération policière.

Un dirigeant des marcheurs, Adolfo Chavez, évacué à San Borja, à 55 kilomètres, avec 200 compagnons, a affirmé lundi que la marche reprendrait après une pause. Outre ceux libérés à Rurrenabaque, plusieurs dizaines d’indiens ont réussi à échapper à la police dimanche.

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Leur presse (Agence Faut Payer), 26 septembre 2011.

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