Des gendarmes font le portrait des “Niktamère”
Ils figurent en bonne place sur un tableau de service de la gendarmerie de Bras-Panon. Deux imprimés qui dressent le portrait-robot des jeunes “Niktamère”, un “nouvel animal introduit en Europe de l’Ouest”. Ce texte vise les jeunes originaires du Maghreb. Pas sûr que ces écrits racistes et d’extrême-droite fassent rire la hiérarchie de la gendarmerie nationale.
“Identification”, “mode de vie”, “moyens de transports” et un schéma en guise de fiche signalétique. Ces deux pages proposent un exposé très exhaustif en forme de message d’avertissement sur le “jeune Niktamère” qui “ne sort que la nuit et se déplace généralement par petits troupeaux de 5 ou 6 spécimens appelés branleurs”. Le texte cible les jeunes Maghrébins qui vivent “dans les grandes villes de notre pays”. Ces imprimés A4 tirés d’un message internet diffusé au sein de la gendarmerie doivent être considérés de la plus grande importance au sein de la brigade de Bras-Panon. Ils sont exposés sur l’un des panneaux de service de cette gendarmerie, au-dessus du message officiel de recherche lancé à l’encontre de Joseph Yanis d’Eurveilher qui s’est évadé de la prison de Saint-Pierre en disparaissant de l’hôpital de Saint-Pierre le 6 mai dernier et d’un courrier au sujet d’une cérémonie tamoule arrivé le 28 avril 2011. Ce qui prouve que cette affichage est récent. Dire que le texte est discriminatoire et xénophobe à l’égard des jeunes de banlieue issus de l’immigration et d’Afrique du Nord est un euphémisme. Car après avoir décrit le “Niktamère” comme vêtu d’un survêtement, chaussé de baskets portant une casquette et avec “le regard haineux”, le message précise qu’il s’agit d’un “animal en voie de disparition dans son pays, le Maghreb”. Le texte enchaîne ensuite les pires clichés en faisant l’amalgame entre le fait d’être un jeune Maghrébin et celui d’être un délinquant. Ainsi le “Niktamère” est un “animal peureux et craintif. Il fuit devant tout être humain de bonne constitution, toutefois il s’attaque aux femmes seules et aux personnes âgées, ainsi qu’aux enfants à la sortie des écoles”. “Les plus vieux “Niktamère”, appelés Chibani, s’agglutinent durant la journée aux points de survie (cafés, bars, PMU, bancs publics, parcs et marchés, pelouses). Le “Niktamère” ne chante pas la Marseillaise : il la siffle. Il se fait enterrer en Afrique du Nord mais personne ne sait qui paie (Qui à votre avis ?).”
“MOHAMED, MOULOUD, KADER, RACHID OU MOURAD” — Et de préciser, pour donner un peu plus dans l’anti-musulman, que le “Niktamère est armé d’un couteau qu’il utilise pour égorger les moutons mais pas seulement… Il répond habituellement au nom de Mohamed, Mouloud, Kader, Rachid ou Mourad.” Ces jeunes sont désignés comme les responsables des incendies de voitures dans les banlieues et les caillassages de véhicule de pompiers, ainsi que comme des trafiquants qui “veillent jalousement à la virginité de ses sœurs”. On pourra aussi reprocher aux gendarmes d’afficher ostensiblement leurs opinions d’extrême-droite : “Le “Niktamère protège jalousement son territoire où il pratique le business. Tout intrus en est violemment chassé… Si les intrus, généralement, vêtus de bleu ou de noirs sont trop nombreux, il appelle cela de la provocation et en appelle à Emmanuelle Béart, Josiane Balasko, Guy Bedos, aux communistes, aux socialistes ou autres vedettes du show-biz.”
Ces propos sont encore plus virulents et racistes quand les jeunes Maghrébins sont assimilés à des animaux : “grégaire, caractériel et indomptable, le “Niktamère” est aux sociétés policées ce que le zèbre est aux arts équestres”. Et d’ajouter que “les pattes sont cagneuses (pas par le travail !!!). Le teint est mat. La chevelure dense et noire.” Ou qu’il est “une espèce protégée par diverses associations (Mrap, SOS Racisme)”.
Encore plus odieux : “le “Niktamère fait l’objet d’une interdiction de chasse, d’où un risque de prolifération dangereux pour l’équilibre de notre système judéo-chrétien”. “Chasse”, animal”, “prolifération” : des mots dangereux qui font froid dans la bouche lorsqu’ils viennent de représentants de la force publique. Dans la même logique, les auteurs distinguent bien l’immigré du Français de souche : “il fait vrombir jusque tard dans la nuit sous les fenêtres des travailleurs (Français de Souche). Celui qui travaille et qui, par pitié, par charité (nous sommes des Chrétiens), l’aide à vivre pour ne pas le laisser mourir de faim.”
“À DIFFUSER SANS MODÉRATION” — Le plus inquiétant dans l’affaire est que ces deux feuilles A4 ne sont pas placardées dans le bureau d’un militaire mais dans le couloir, autrement dit un espace commun à la brigade. Ce qui laisse entendre que cet affichage n’est pas l’œuvre d’un gendarme cherchant à se défouler ou à partager une mauvaise et grosse blague. Il est vrai que le message se conclut par ce conseil écrit en capitales : “À diffuser sans modération”. Ces propos exposent clairement ceux qui les diffusent à des sanctions pénales. Mais aussi à des sanctions disciplinaires car ils sont antinomiques des valeurs de la gendarmerie nationale.
Les règles déontologiques de la gendarmerie sont exposées dans plusieurs textes de loi et décrets et sont fondées sur le respect de la loi, et de la personne humaine, la neutralité, le contrôle de l’usage de la force et la transparence dans l’exercice des missions. Difficile en effet qu’un gendarme puisse afficher ce genre de message et être capable de faire preuve de droiture dans sa mission et de respect des personnes sans distinction de leurs origines. En découvrant cette histoire, beaucoup de gendarmes seront sidérés que l’on puisse à ce point dégrader l’image de leur corps et saboter leurs missions quotidiennes durant lesquelles ils peuvent mettre leur existence en péril.
En 2009, un gendarme se vantait d’aimer les “ratonnades”
Une affaire similaire avait éclaté en métropole en mars 2009. Le Monde avait révélé qu’un gendarme mobile d’Aubervillers se vantait sur son profil Facebook d’apprécier particulièrement les “ratonnades, le nationalisme et les croisades” et se disait “d’extrême droite, mais très extrême”. Le gendarme expliquait avoir pour citations favorites “Travail, famille, patrie”, la devise du régime de Vichy lors de la Seconde Guerre mondiale. Le sous-officier avait également adhéré à des réseaux sociaux tels que « Pour que les CRS chargent au sabre lors des manifs de gauche », « Vive la race blanche », « Français, défends-toi tu es ici chez toi », « La France aux Français, Algérie, le Maroc, la Tunisie aux Maghrébins », ou encore « Tu niques la France… Dégage ». La direction générale de la gendarmerie nationale avait décidé de suspendre de ces fonctions le gendarme en disant condamner “l’expression d’opinions manifestement contraires à l’éthique, qui porte atteinte de surcroît à l’obligation et au devoir de réserve qui s’imposent à tout gendarme”. Une enquête judiciaire avait été ouverte.
Leur presse (Jérôme Talpin, Clicanoo.re), 27 mai 2011.
Portrait raciste : le commandant de la brigade de Bras Panon suspendu
Communiqué de la gendarmerie de La Réunion
S’agissant de l’affaire rapportée par le JIR ce jour, impliquant la brigade de gendarmerie de Bras Panon, le Colonel, commandant la gendarmerie de La Réunion a immédiatement pris attache avec Monsieur le Procureur général près la Cour d’Appel lequel a souhaité que soit saisie la section des recherches afin que toute la lumière soit faite sur ces faits graves.
Le commandant de la brigade de Bras Panon fait l’objet depuis ce matin d’une mesure de suspension de fonctions. Il ne fait aucun doute que ce type de document n’a en aucune façon sa place dans un local de gendarmerie quel qu’il soit. M. le Préfet de la Réunion a également demandé au colonel, commandant la gendarmerie de la Réunion qu’une enquête administrative soit diligentée.
Les conclusions de ces enquêtes permettront d’établir les responsabilités et les éventuelles sanctions pénales ou administratives seront prises en conséquence. Ces faits semblent pour l’heure être la conséquence d’un acte individuel et ce dernier ne saurait, en aucun cas, remettre en cause la parfaite loyauté des gendarmes et le respect par ce corps des lois et règlements de la République, de la personne humaine et d’une stricte neutralité. Le respect des personnes, quelques puissent être leurs singularités, leurs appartenances communautaires, religieuses, philosophiques ou leurs origines, est non seulement la règle mais plus encore une éthique.
La gendarmerie est ulcérée lorsque l’un de ses membres peut se montrer défaillant. Enfin, le Colonel, commandant la gendarmerie de la Réunion présente ses excuses aux personnes et associations qui ont pu être, à cette occasion, choquées voire blessées.
Leur presse (Clicanoo.re), 27 mai 2011.
Les policiers réunionnais à l’épreuve des violences urbaines
Plus de 70 policiers et une vingtaine de pompiers participaient hier soir à un spectaculaire exercice d’intervention dans un contexte de violences urbaines nocturnes. Une première à la Réunion, qui clôture une semaine de stage destinée à l’assimilation des dernières techniques en la matière.
Une voiture qui brûle, des projectiles qui volent, des explosions qui tonnent, des cris qui fusent, des sirènes qui retentissent… On n’était pas dans une cité du “9-3” hier soir sur le circuit Félix-Guichard de Sainte-Anne, mais c’était tout comme. En clôture d’une semaine de stage consacrée à l’assimilation des toutes dernières techniques d’intervention des forces de l’ordre et des secours dans le cadre des violences urbaines, ils étaient près de cent, policiers nationaux, policiers municipaux et pompiers à se livrer à un exercice grandeur nature aussi réaliste que possible jusqu’à tard dans la nuit. De telles manœuvres, nocturnes de surcroît, constituent une première dans le département. Dans le rôle des émeutiers, un plastron composé de jeunes cadets de la police, empêchant les pompiers d’intervenir et tenant tête aux forces de l’ordre. Policiers municipaux et patrouilleurs pris au piège, arrivent ensuite les renforts de la compagnie départementale d’intervention, brigades anticriminalité et équipes cynophiles.
Maîtriser les dernières techniques — L’action va crescendo : sécuriser l’intervention des pompiers, protéger le matériel et le voisinage, évacuer un blessé, procéder à des interpellations, le tout dans un contexte particulièrement chaotique. “Il y a du bruit, on est dans le noir, il y a la chaleur du feu, la confusion due à la foule… Le but est d’arriver à mener une action coordonnée entre différents acteurs de la sécurité soumis à des difficultés multiples”, explique Éric Gallet, l’un des deux conseillers techniques régionaux qui animent le stage et conçoivent les scénarios d’intervention, avec l’aide de cinq formateurs locaux. “Il est clair que la Réunion est moins souvent touchée par les phénomènes de violences urbaines que certains quartiers dits sensibles de métropole, mais il est important que les personnels bénéficient des techniques les plus récentes en la matière et entretiennent leurs acquis. Il n’est pas question que les forces de police réunionnaises soient en décalage avec ce qui se fait en métropole”, souligne le commandant Patricia Mougenot, responsable de la délégation au recrutement et à la formation de la police nationale (DRFPN) Réunion-Mayotte. “Avec cet exercice très particulier, nous professionnalisons nos unités et montrons à la population qu’elle peut se sentir en sécurité.” Après un autre stage, il y a quelques mois, de spécialisation à la protection des hautes personnalités, la police réunionnaise entend se maintenir au niveau et coller “à l’évolution de la société et ses problématiques de sécurité publique”.
Leur presse (Sébastien Gignoux, Clicanoo.re), 27 mai 2011.
Réunion : tract raciste chez les gendarmes
Un tract raciste comparant les jeunes Maghrébins à des « animaux » dont « la prolifération est dangereuse » a figuré sur un tableau de service d’une gendarmerie de La Réunion, conduisant le préfet de l’île à suspendre un commandant de brigade et à saisir la justice.
Dans un communiqué, le préfet de la Réunion Michel Lalande indique avoir « suspendu de ses fonctions le commandant de la brigade » de gendarmerie de Bras-Panon (est de l’île) et « condamne avec la plus grande fermeté toute expression et comportement racistes, inacceptables, particulièrement quand ils sont le fait d’agents de l’État ». « Parallèlement à l’ouverture d’une enquête préliminaire, le préfet a aussitôt demandé au commandant de la gendarmerie de La Réunion d’ouvrir une enquête administrative afin que les sanctions qu’exigent ces faits soient prises dans les plus brefs délais », ajoute la préfecture.
« Le Niktamère répond au nom de Mohamed, Mouloud… » — Dans son édition d’aujourd’hui, Le Journal de l’île de la Réunion, qui a révélé l’affaire, publie la photo d’un panneau de service où sont placardés la photo et le fac-similé de deux imprimés s’en prenant au « Niktamère », un « animal en voie de disparition dans son pays le Maghreb ». Sous forme de fiche signalétique, l’un des documents montre un jeune en survêtement et basket avec pour légende : « Le Niktamère fait l’objet d’une interdiction de chasse, d’où un risque de prolifération dangereux pour l’équilibre de notre système judéo-chrétien ».
Sur une autre affiche est décrit le « mode de vie » du « jeune Niktamère », qui « ne sort que la nuit et se déplace généralement par petit troupeau de 5 ou 6 spécimens appelés “branleurs” ». « Le Niktamère isolé est un animal peureux et craintif. Il fuit devant tout être humain de bonne constitution, toutefois il s’attaque aux femmes seules et aux personnes âgées ainsi qu’aux enfants à la sortie des écoles », peut-on encore lire sur ce document qui précise qu’« il répond habituellement au nom de Mohamed, Mouloud, Kader, Rachid ou Mourad ». Le texte s’en prend également vivement aux associations anti-racistes, à certains partis de gauche et à des personnalités du monde du spectacle.
Leur presse (Agence Faut Payer), 27 mai 2011.
Une affiche d’Hitler dans les locaux de la CRS de Perpignan
La CGT a porté plainte après avoir découvert cette affiche du Führer faisant le salut nazi.
La CGT vient de porter plainte après la découverte d’une affiche montrant Hitler faisant le salut nazi dans des locaux de la CRS de Perpignan, a-t-on appris lundi auprès du syndicat.
La personne qui a placardé cette affiche « a pris un simple petit blâme, pratiquement la même chose que prend un officier de police en tenue qui fume dans la rue », a dit le secrétaire départemental de la CGT, Pierre Place, sans préciser qui avait pris l’initiative d’un tel affichage.
Contactés par téléphone, le commandant de la CRS et sa direction interrégionale à Marseille ont décliné tout commentaire.
Le parquet de Perpignan a dit avoir décidé d’ordonner une enquête de police après avoir reçu la plaine de la CGT.
C’est le 17 janvier que l’alerte a été donnée sur la présence de l’affiche dans les locaux de l’infirmerie de la CRS 58, a rapporté Pierre Place. L’infirmerie est aussi un lieu public par lequel passent les jeunes souhaitant intégrer la police nationale, a-t-il observé. « Donc la première image qu’ils vont avoir d’un service public de police nationale, c’est une photo d’Hitler », a-t-il dit.
On ignore combien de temps cette affiche de 42 × 59 cm, représentant le Führer saluant bras cassé, s’est trouvée sur le mur ; a priori plusieurs semaines, selon M. Place.
Si la CGT, syndicat minoritaire dans les CRS, s’est mobilisée jusqu’à porter plainte contre X, c’est à cause de la sanction selon elle dérisoire qui a été prononcée, alors qu’on a affaire à un lieu public, mais aussi à cause du climat politique actuel, a expliqué M. Place.
« On joue notre rôle, surtout dans une période où beaucoup de choses se disent sur l’entrisme du FN dans les milieux syndicaux », a-t-il dit, tout en se gardant d’établir un lien entre l’auteur de l’affichage et le Front national.
Leur presse (Sud-Ouest), 2 mai 2011.