Joué-lès-Tours : des témoignages mettent à mal la version policière
Une semaine après les faits, des témoignages mettent à mal la version policière du drame survenu au commissariat de Joué-lès-Tours, samedi 20 décembre.
Bertrand Nzohabonayo, après avoir blessé trois policiers à coups de couteau, a été tué dans le commissariat. Selon la version de la police, le jeune homme se serait volontairement présenté au commissariat avec un couteau à la main. Il aurait porté un coup au visage du policier d’accueil et aurait crié « Allah Akbar ». Le ministre de l’intérieur et le procureur de la République de Paris ont insisté sur le caractère « radical » de Bertrand Nzohabonayo, qui aurait fait siennes les thèses de l’organisation de l’État islamique.
C’est une tout autre version qui est suggérée par de nouveaux témoignages. Selon un témoin rencontré par France 3 Région Centre, une altercation entre deux jeunes du quartier et un policier serait en fait à l’origine de l’affaire. Une bagarre aurait eu lieu vendredi 19 décembre, c’est-à-dire à la veille des faits. Bertrand Nzohabonayo ne se trouvait pas à Joué-lès-Tours le jour de cette altercation. Mais le lendemain, il se serait rendu dans un fast-food à proximité du commissariat de police et aurait alors été interpellé par des policiers désireux de connaître l’identité des deux jeunes de la bagarre de la veille. L’interpellation de Bertrand Nzohabonayo aurait mal tourné, deux policiers sont blessés et Bertrand est tué par un agent de police.
Selon Ghyslain Vedeux, un représentant du Conseil représentatif des associations noires d’Indre-et-Loire interrogé par France 3, le policier qui s’est battu avec les deux jeunes, le 19 décembre, avait été « condamné il y a un an pour des violences policières ».
Leur presse (Mediapart, 26 décembre 2014)
Affaire de Joué-lès-Tours : « il y a eu une altercation avant entre deux jeunes et l’un des policiers »
Les premiers éléments de l’enquête privilégient la piste de l’islamisme radical pour expliquer les motivations de Bertrand Nzohabonayo, l’agresseur du commissariat de Joué-lès-Tours. Depuis samedi dernier, nous avons enquêté pour comprendre si ses motivations étaient uniquement religieuses.
Des doutes planent dans l’affaire de Joué-lès-Tours. De nouveaux témoignages pourraient suggérer une autre version des faits, qui ne concorde pas vraiment avec celle des forces de l’ordre.
La sœur de Bertrand, Eunice Nzohabonayo s’est exprimée pour la première fois depuis les faits, mardi 22 décembre, après sa garde à vue. Elle tient à comprendre ce qu’il s’est passé avant. « Je veux que les policiers écoutent les gens qui disent qu’il y aurait pu avoir une altercation avant ».
Originaire du Burundi, où le frère Brice a été arrêté samedi dernier, la famille Nzohabonayo est de confession catholique. Pour sa famille, Bertrand était un jeune homme très calme. Depuis les faits, c’est l’incompréhension pour le père de Bertrand, revenu du Burundi. « Comment mon fils Bertrand s’est retrouvé au commissariat de police de Joué-lès-Tours alors qu’il savait qu’il n’allait pas s’en sortir ? », s’interroge Vénérand Nzohabonayo. La famille, qui va se constituer partie civile dans la semaine, ne croit pas à la radicalisation de Bertrand.
Au départ de l’affaire, une altercation
Selon un témoin qui préfère garder l’anonymat, une altercation entre deux jeunes du quartier et un policier serait à l’origine de l’affaire. Une bagarre qui aurait eu lieu vendredi 19 décembre, c’est-à-dire à la veille des faits. « J’étais au fond du bus et arrivé à l’arrêt Rotière, il y avait un embouteillage. Je suis allé près du chauffeur et là j’ai vu un agent de police en sang, avec l’arcade ouverte ». Bertrand ne se trouvait pas à Joué-lès-Tours le jour de cette altercation. Il est à Paris, où il accompagne sa mère qui doit prendre un avion pour le Rwanda à Roissy. Il reviendra en covoiturage le lendemain de l’altercation.
Selon nos sources, le 20 décembre, Bertrand retrouve sa sœur autour de midi. Il serait sorti en début d’après-midi pour manger un morceau. Le kebab dans lequel il se rend se trouve à proximité du commissariat de police de Joué-lès-Tours. Sur sa route, il aurait été interpellé par des policiers désireux de connaître l’identité des deux jeunes de la bagarre de la veille. L’interpellation de Bertrand Nzohabonayo tourne mal, deux policiers sont blessés et Bertrand est abattu par un agent de police.
Un policier de Joué-lès-Tours dérape en août 2013
Ghyslain Vedeux, représentant du Conseil Représentatif des Associations Noires d’Indre-et-Loire est formel, le policier qui s’est battu avec les deux jeunes, le 19 décembre, est « celui qui a été condamné il y a un an pour des violences policières ».
En août 2013, une interpellation musclée à Joué-lès-Tours avait fait réagir. Un policier avait utilisé sa matraque contre une femme, avant de faire usage de sa bombe lacrymogène. En juin 2014, le tribunal a infligé au policier une amende de 1500 euros dans cette affaire, lui reprochant une garde à vue irrégulière ainsi qu’un usage excessif de la force par l’utilisation de gaz lacrymogène lors de l’interpellation.
L’enquête privilégie la piste de « l’islamisme radical »
Cette nouvelle version des faits, décrite par des témoins, s’oppose à celle des policiers. Selon des sources policières, le jeune homme se serait volontairement présenté au commissariat de Joué-lès-Tours avec un couteau à la main, samedi 20 décembre à 14h. Il aurait porté un coup au visage du policier d’accueil. « Pour « justifier » son acte de folie, le ministre de l’Intérieur et le Procureur de la République de Paris ont insisté sur le caractère « radical » de Bertrand Nzohabonayo qui aurait fait siennes les thèses de DAESH », indique Le Point dans un article publié ce jeudi matin.
Dans un communiqué de presse de Bernard Cazeneuve, datant du jour de l’agression, le ministre de l’Intérieur « condamne l’agression brutale d’un policier à l’arme blanche ». Plus tard dans l’après-midi, devant le commissariat de Joué-lès-Tours, il indique aux médias que Bertrand « était connu pour des faits de délinquance mais qu’il n’était pas connu pour des actes terroristes ».
Lundi 22 décembre, le procureur de la République de Paris a donné une conférence de presse où il a expliqué que Bertrand Nzohabonayo « se serait converti à l’islam et se serait radicalisé vers l’âge de 16-17 ans, un an après son frère Brice, dont il était très proche » avant d’ajouter des éléments sur le testament religieux retrouvé lors de la perquisition des domiciles de la sœur et de la mère. Il faut rappeler que Bertrand Nzohabonayo a publié jeudi 18 décembre sur son profil Facebook une photo du drapeau de l’organisation État islamique.
Leur presse (france3-regions.francetvinfo.fr, 25 décembre 2014 | mis à jour le 26 décembre)
La sœur de l’agresseur présumé de Joué-lès-Tours : « J’aimerais savoir ce qu’il s’est passé avant le commissariat »
Pour la première fois depuis les faits, la sœur de Bertrand Nzohabonayo s’est exprimée devant les caméras de France 2. Elle cherche à comprendre ce qui a déclenché cette colère chez son frère au commissariat de Joué-lès-Tours, samedi 20 décembre.
Eunice est la sœur de Bertrand Nzhohabonayo, l’homme de 20 ans abattu samedi 20 décembre après qu’il est agressé au couteau trois policiers. C’est chez elle, ou chez sa mère, que logeait le jeune homme lorsqu’il était à Joué-lès-Tours. Placée en garde à vue juste après les faits, elle a été interrogée par les enquêteurs, puis libérée, lundi 22 décembre.
« Je voudrais juste savoir ce qu’il s’est passé avant le commissariat. J’aimerais que les policiers écoutent les gens qui étaient autour, qui disent qu’il y a eu une altercation avant. J’attends la vidéo de surveillance pour savoir ce qu’il s’est vraiment passé et si c’était vraiment nécessaire de le neutraliser avec quatre coups de feu. »
« Bertrand avait des antécédents judiciaires, il s’est présenté plusieurs fois au commissariat tout seul sans aucune agressivité. »
Leur presse (france3-regions.francetvinfo.fr, 23 décembre 2014 | mis à jour le 25 décembre)