La police s’interroge
Au XIIe siècle, les voyageurs qui arrivaient à Zurich, pouvaient lire cette inscription à l’entrée de la ville : « Zurich, noble par la richesse de beaucoup de choses ». Elle occupe aujourd’hui la troisième place dans le classement des villes où habiter coûte le plus cher ; la seconde dans le classement des villes du monde où il fait bon vivre.
Vendredi 12 décembre, il semblerait que 200 habitants mécontents se soient retrouvés à la nuit tombée. Après avoir déroulé une banderole sur laquelle était inscrit « reprenons la rue », ils se seraient mis en ordre de marche, parcourant la ville, le visage dissimulé.
La presse locale raconte que sur leur chemin et à l’aide de barres de fer, cette cohorte imprévue se serait mise à détruire des vitrines, à piller des magasins, pour finalement incendier des poubelles et des voitures. Le chef de la police locale précise que les hommes qu’il avait envoyé pour calmer l’attroupement auraient été « délibérément attaqués ». Les barres de fers qui auraient servi à briser les devantures de banques auraient aussi été utilisées contre ces policiers. Dès le lendemain, une dépêche AFP entend donner de plus amples précisions quant aux évènements : « Outre les pierres, pétards et fusées lancées sur la police, les manifestants ont également procédé à des attaques au laser ». Ils auraient même incendié deux arbres innocents, arraché une portière de voiture de police pour en attaquer les occupants, et brisé les vitres d’un restaurant bondé, en terrorisant les clients.
Le lendemain, devant les caméras de télévision, le chef de la police se montre stupéfait :
« Les raisons politiques, on va les examiner dans un second temps mais à première vue il n’y a aucun motif apparent. » (1’06)
Sur l’internet, en furetant bien, on peut pourtant trouver un texte faisant référence aux événements de vendredi :
Ce soir, cette ville aura vécu convenablement. Nous avons pris les rues, avec de la musique et de good vibes, afin de marquer le coup contre la gentrification en cours. La « revalorisation » de la ville signifie que la vie, la spontanéité, les espaces de liberté et les projets culturels alternatifs seront expulsés de chaque quartier.
Les déserts en béton tels que le Google-Quartier, Europa Allee, Züriwest, se répandent dans tout Zurich, au seul profit du capital. Pendant ce temps, ce sont tous les autres usages possibles et les projets alternatifs tels que le Binz ou Labitzke qui seront détruits.
Par notre action d’aujourd’hui, nous voulons vous inciter à agir vous aussi.
Nous voulons la ville et nous ne la laisserons pas à l’argent, aux propriétaires fonciers, aux capitalistes, aux « partenariats-publique-privé », ni à quelqu’autre détenteur de pouvoir que ce soit.
Pouvoir vivre dans cette ville ne peut-être conditionné par l’origine, la fortune, un permis de séjour, ou la conformité sociale.
Nous voulons une ville où il est possible de vivre ; bruyamment et passionnément.
C’est pour cela que nous nous organisons. Les agents de police et les systèmes de vidéosurveillance, ça ne nous branche pas.
Tous les flics sont des bâtards.
Nous ne nous laisserons pas dégager. Nous reprenons ce qui nous appartient. Nous sommes la ville.
Reprenons la rue !
Lundi matin, 15 décembre 2014