Suicides, immolations, défenestration…
Le syndrome de Tiaret
Le phénomène a atteint ses proportions les plus alarmantes les 10, 11 et 12 mai avec un suicide par jour.
La wilaya de Tiaret est-elle devenue le lieu de prédilection des phénomènes sociaux tels que le suicide sous ses différents procédés (pendaisons, immolations, défenestration… etc.) ?
À voir le nombre des actes « signés » ces derniers temps, on est tenté de le croire. Il ne se passe pratiquement pas une semaine sans que le suicide d’un jeune, d’une femme ou d’un enfant ne soit signalé.
Le dernier en date remonte à ce 19 juin lorsqu’un jeune de 25 ans s’est donné la mort dans la localité de Aïn El Hadid. Le procédé utilisé par ce jeune renseigne sur un malaise et un désespoir total : il s’est pendu, en pleine place publique, à un pylône électrique.
Selon des sources oculaires, ce père de famille venait de quitter le siège de la mairie après avoir eu un entretien avec le président d’APC.
Un passager a tenté de secourir la victime mais a été découragé par les flammes provenant de la ligne à haute tension. Les sapeurs-pompiers, appelés à la rescousse, n’ont pu que constater le décès du jeune.
Macabre bilan
Moins de 48 heures plus tôt, c’est un adolescent qui a mis fin à ses jours dans la même localité.
Malheureusement, ces deux cas ne sont pas les seuls à secouer cette wilaya de l’Ouest. Depuis le mois de mars dernier à ce jour, des dizaines de suicides et de tentatives de suicide sont enregistrées.
Le 9 juin dernier, un homme de 39 ans a tenté de s’immoler par le feu devant le siège de la mairie de Ksar Chellala.
Si le malheureux a échappé de justesse à la mort, ce n’est pas le cas de cet autre homme de 36 ans qui s’est pendu à un arbre à Mellakou, une localité située à une vingtaine de kilomètres au sud de Tiaret.
Deux jours auparavant, un adolescent âgé d’à peine 14 ans a mis fin à ses jours par pendaison à Aïn El Hadid.
Le phénomène a atteint ses proportions les plus alarmantes les 10, 11 et 12 mai avec un suicide par jour.
Le premier a ingurgité une bouteille d’acide à son domicile, le deuxième a avalé des comprimés de barbituriques tandis que le troisième s’est pendu à un arbre.
Le drame ne s’arrête pas là. Deux jours plus tard, un jeune chômeur qui participait à un sit-in de protestation devant le siège de l’APC de Aïn El Hadid, a tenté de se suicider en s’ouvrant les veines. Avec d’autres chômeurs, le jeune homme de 27 ans entendait dénoncer les critères de recrutement utilisés par les responsables d’une société publique locale auxquels ils reprochent notamment d’embaucher des personnes ne résidant pas sur le territoire de la commune.
Le mois de mars a connu un des bilans les plus macabres. Un homme de 35 ans s’est donné la mort en se pendant à un arbre à la sortie Sud de la ville de Tiaret.
Désespéré de voir son dossier de demande de logement social rejeté malgré de nombreuses réclamations adressées au chef de daïra puis au wali de Tiaret, un autre désespéré âgé de 36 ans s’est ouvert les veines en public devant le siège de la daïra de Frenda, à cinquante kilomètres de Tiaret. En début du même mois, alors qu’il venait de se faire retirer son permis de conduire à Ksar Chellala pour infraction au Code de la route, un homme de 43 ans, dénonçant un « acte arbitraire », a tenté de se suicider dans la rue, sous les yeux de dizaines de passants.
En juin, un lycéen âgé de 16 ans, qui avait été traduit en conseil de discipline pour avoir cassé un carreau, s’est immolé par le feu dans la cour de récréation de son lycée, au quartier Sonatiba, au sud de la ville de Tiaret sous le regard horrifié de ses camarades. Huit élèves de sa classe ont perdu connaissance devant une telle scène.
Même les lycéens
Le lycéen Rass Ghanem Walid est décédé une semaine plus tard. Au cours de la même semaine, un homme, âgé d’une cinquantaine d’années, a tenté de s’immoler par le feu avec son fils à Frenda, à une cinquantaine de kilomètres au sud de Tiaret. Au moment où de nombreux citoyens contestant une liste de cent bénéficiaires de logements attribués dans le cadre de la résorption de l’habitat précaire assiégeaient la daïra cernée par de nombreux policiers, l’homme est monté sur le toit de ce même édifice en compagnie de son fils de 17 ans qu’il a arrosé d’essence avant de s’en asperger lui-même la tête.
Vers la fin du même mois, un jeune homme de trente ans a tenté de s’immoler par le feu devant le siège de la police judiciaire de la wilaya de Tiaret.
Le jeune homme, habitant la localité de Mesra (Mostaganem), s’est rendu à l’ex-place Carnot, en face du siège de la sûreté de wilaya, pour s’asperger d’essence avant de s’enflammer à l’aide d’un briquet.
Enfin, au mois de février, un jeune chômeur de 23 ans s’est aspergé d’essence à Mahdia (50 km à l’est de Tiaret), avant d’allumer un briquet, se brûlant gravement sur différentes parties du corps. Cette tentative d’immolation est intervenue moins de trois semaines après la mort du jeune G. Hichem, qui s’est immolé par le feu sur la place publique le 26 janvier dans la même wilaya.
C’est dire que le suicide dans la wilaya de Tiaret est devenu un véritable fléau social sur lequel les autorités compétentes doivent se pencher. La régression sociale ne doit plus durer si l’on veut mettre un terme au désespoir dévastateur.
Presse suicidaire (Idir Tazerout, lexpressiondz.com, 24 juin 2012)
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