Des gens marrants aux Chambarans
Pour sûr que nous nous sommes bien amusés ce matin là. Nous ne fûmes qu’une trentaine à affronter la froideur saisissante de Roybon au petit matin. Nous étions là réuniEs contre le Center Parcs qui espère toujours s’implanter sur cette belle forêt des Avenières, captant les sources des villages alentours, chassant bestiaux, insectes et végétaux. Ruinant la nature pour faire du fric. Et parce que désormais plus aucun espace ne peut s’offrir le luxe de ne rien faire rapporter au capital, ce n’est pas un barrage ou un aéroport qui drainera les deniers mais un tourisme des plus aliéné. Un peu moins de 100 ha à ravager pour construire un bulle de verre (sic) au climat maîtrisé et aux animations folkloriques afin de détendre tout son beau monde une fois l’heure des vacances bien méritées. Quoi de mieux qu’un petit cottage au milieu d’un monde artificiel pour fuir la bêtise humaine et les désastres qu’elle charrie ?
Parce que nous considérons ce projet néfaste, nous sommes allés nous promener dans la forêt que nous aimions arpenter avant qu’elle ne soit privatisée par « Pierre et Vacances », animéEs par l’idée de freiner le départ de ce chantier colossal. Des piquets de repérage bornent le site pour le lancement des travaux. Hop hop y en a plus… Quelques traces de peinture marquent les arbres (apparemment ceux qui devrait être épargnés). Hop hop y en a plein… Nous nous serions crus dans Pocahontas, des piquets soulevés par le vent, et des biches et des sangliers qui taguent ; un spectacle merveilleux.
Au fil de notre ballade, nous croisons une vigile et sa gazeuse familiale, une chic personne que notre indifférence laissa pan-toi. Également des géomètres qui sortent des fourrés la mine rageuse comme si les buissons les avaient molestés.
Plus loin une troupe d’ouvriers que les mille couleurs de l’air du vent n’atteignent plus sont amassés autour de deux monstres machines assimilables à des : « vas-y-que-je-te-mange-la-forêt-pour-faire-des-routes ».
Des ratons laveurs passent et nettoient les quelques détritus que l’entreprise « VIEUX-MELCHIOR », un chef d’entreprise de « broyage et sylviculture » bien bonhomme que les contradictions ne torturent pas trop, avait disposé afin de savamment tout ravager.
Pour les personnes qui désirent lui poser quelques questions sur son travail, n’hésitez pas à lui téléphoner ou à écrire à sons siège d’entreprise (de nos jours on trouve ça facilement). Pour l’heure quelques morceaux choisis : « — Suffit de saccager tout notre travail ! — Bin oui mais toi tu saccages la forêt… — Non mais vous avez qu’à venir avec nous dans votre forêt de merde, vous allez voir ! Des moustiques et des sangsues, des ronces et du houx. — Nous même pour de l’argent on voudrait pas faire ce que tu fais… — Oué c’est ça bin continuez de profiter du chômage ! — Murf murf… »
Tout était dit. Le salaire suffit à ne pas se poser de question quant aux causes et au conséquences du travail que l’on effectue. Une logique sans faille que, si questionnée, ne ferait que plonger dans la plus profonde torpeur.
Plus tard nous entendrons que les sabotages de ce jour-ci auront causé un retard d’un mois et demi sur les chantiers. On peut s’en féliciter même s’il semble que ce chiffre soit un peu « olé olé ».
Plus loin sur le chemin nos croisons les gens d’armes (deux voitures), ils nous invitent à rebrousser chemin car nous serions en violation de propriété privée. L’ambiance est tranquille. Il semble s’inquiéter de savoir si nous avons croisé d’autres groupes. Le temps pour nous est venu de regagner nos véhicules à l’orée de la forêt et de partir. Ils nous suivent et sur le parking, deux autres véhicules arrivent. Ils faut donner son identité… certainEs acceptent, d’autres non, d’autres avec d’autres noms… bref.
Nous quittons les lieux, contents mais pas satisfait. La lutte ne fait que commencer.
N’hésitez pas à venir aider les quelques animaux résistants de la forêt. Ces petites balades peuvent se faire en footing, en couple, ou entre amis (de deux à 10’000).
Ce n’est qu’un début, la lutte s’organise
Rémi nous pensons à toi.
Indymedia Grenoble, 29 octobre 2014