Blessures et police politique
Deux mois ont passé depuis que la responsabilité de l’État a été reconnue pour une blessure au flashball et que le préfet de Paris a été condamné à verser une indemnité à Clément Alexandre qui avait eu la joue arrachée le 21 juin 2009.
Sans surprise, la liste des blessés et des éborgnés ne cesse de s’allonger. À Grenoble, Quentin, un pompier, perd l’usage de son œil lors d’une manifestation devant la préfecture le 27 décembre 2013. Le 1er février 2014 pendant les récentes émeutes à la Réunion (Le Port), c’est Steve, 16 ans, qui perd son œil à la suite d’une intervention de la BAC. Enfin, ce samedi 22 février à Nantes, lors d’une manifestation contre l’aéroport de Notre-Dames-des-Landes, la violence policière déployée rappelle celles des journées du 22 et 23 novembre 2012. Des armes inédites sont employées – des armes de guerre. On compte de nombreux blessés. Quentin, un charpentier de 29 ans, perd un œil à son tour.
Nous l’avons déjà dit, s’il n’y a pas de réparation possible, il y un certain usage stratégique du droit qui devrait relever en l’espèce du harcèlement. Dans les deux premiers cas (Grenoble et Le Port), une enquête a été confiée aux services de police (IGPN). Nous pensons que dans ce genre d’affaire il faut prendre soi-même les choses en main et ne pas se fier une seconde à ce que diront les flics, les préfets et les procureurs.
C’est le préfet qu’il faut attaquer devant le tribunal administratif (TA) puisque c’est lui qui arme la police et que le policier est toujours couvert pas sa hiérarchie. Ce sont ses propres expertises, médicales et balistiques, qu’il faut produire après avoir fait nommer un expert au TA. C’est avec ses propres moyens et sans se raconter d’histoire qu’il faut attaquer sur ce terrain avec un avocat auquel on peut faire confiance. Il n’y a pas d’erreur ou de faute policière derrières ces blessures, il n’y a pas de mauvais usage de ces armes, flashball ou grenades en tout genre, mais un usage politique qui repose sur la terreur et la mutilation. C’est à ce niveau qu’il faut porter l’offensive juridique et médiatique – aussi.
S’il y a toujours quelque chose d’absurde dans le fait d’adresser une revendication au pouvoir, surtout quand c’est celui qui nous mutile, il y a des coups à jouer et donner pour entraver l’usage de ces armes. Nous avons un avocat, nous connaissons une procédure qui a partiellement fait ses preuves, nous ne nous faisons pas d’illusion sur la justice et nous savons qu’accepter le caractère individualisant de la blessure, c’est perdre, pour soi et pour les autres. Que tous les préfets se retrouvent avec une procédure sur le dos, que tous les blessés élaborent une stratégie commune pour penser et contrer les violences policières, et que tous ceux qui luttent s’organisent pour les contrer pratiquement.
Face aux armes de la police, 24 février 2014
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