[8 octobre 2012]
Je prends parti
Je ne te demande pas la permission comme mes permissions de sortie. Ma télé est devenue un banc des accusés, à chaque jour suffit sa peine. À la chaîne, on y blasphème, ils montrent du doigt « l’autre ». Je prends parti, prends position.
Si j’étais né en 68, j’aurais été dans les barricades, lanceur de pavés. Si j’avais été là avant l’indépendance de l’Algérie, je me serai battu auprès du F.L.N., jusqu’à ce qu’on l’obtienne. J’aurais été le premier soutien de Léopold Sédar Senghor, premier président de la République du Sénégal. En France, je me serais exilé en Angleterre avec De Gaulle pour préparer la Résistance. L’hiver 54, j’aurais fait ce fameux appel au côté de l’Abbé Pierre. Malheureusement, nous sommes le 8 octobre 2012, je suis enfermé dans ma cellule, impuissant mais toujours indigné, je prends parti.
Aujourd’hui la misère des uns est devenue le commerce des autres. Ils exhibent les souffrances extrêmes de certains peuples pour se donner bonne conscience mais sans bouger le petit doigt. C’est pire que tout, de savoir sans rien faire, c’est se rendre complice de la douleur. Amalgame sans précédent, ils comparent des terroristes fanatiques à des musulmans. Raccourci facile et volontaire. Un ex-ministre qui parle d’un fameux pain au chocolat arraché par des ados pour une fois de plus diaboliser le ramadan. Je ne peux que prendre parti, ce soir ma plume est en colère, n’a plus envie de se taire.
Le monde part en « coquille » et on le suit. La télé nous sert tous les soirs une soupe de mensonge ou une vérité falsifiée. Il est temps de se soulever, de dire NON, de contester.
Le malheur des uns fait le bonheur des autres. Ces fameux « autres » qu’on nous apprend à détester, à diaboliser. On aura toujours peur de l’inconnu, si on ne prend pas la peine de faire sa connaissance, jusqu’à ce que notre malheur devienne les autres.
Mais les « autres » c’est toi. Juifs, musulmans, chrétiens, athées, vous nous cassez les oreilles avec vos querelles interminables. Je suis noir, musulman, humaniste, dans un attentat je me placerai toujours du côté des victimes. Donc arrêtez de systématiquement nous mettre au banc des accusés.
De ma cellule, je m’exprime, je m’indigne. Indigne-toi, prends parti, enfant de la patrie, « inch’Allah » jusqu’à ce que notre heure de gloire finisse par arriver.
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[11 octobre 2012]
Commanditaire
J’ai décidé de commanditer mon dernier casse de ma cellule. Un braquage intellectuel sans dégât matériel. Ma plume me sert d’arme de poing. Mon casse consiste à éveiller les consciences, élever le niveau, faire comprendre que la fatalité n’existe pas. Personne n’est condamné à l’échec malgré ce qu’ils veulent nous faire croire.
[La Chronique de Youv derrière les barreaux est disponible en téléchargement gratuit sur le site des Éditions Antisociales. Elle est à suivre sur le compte Facebook dédié.]