Le mercredi 20 mars 2013 a eu lieu le procès en appel d’Ibrahim El Louar, condamné à deux ans d’emprisonnement par le TGI d’Évry le 18 janvier pour « vol et violence en réunion sur agent dépositaire de l’autorité publique ayant entraîné une incapacité de travail de moins de 10 jours » et « soustraction à une mesure d’éloignement ». Il a également été condamné à verser des dommages et intérêts de 1000 et 600 euros à deux flics.
Le 16 décembre 2012, quatre prisonniers du centre de rétention de Palaiseau avaient réussi à s’évader après avoir subtilisé à un flic le badge magnétique ouvrant les portes. Suite à cela, un cinquième retenu, Ibrahim, a été arrêté et placé en garde-à-vue, accusé d’avoir participé à l’évasion. Frantz Pièce, maton au centre, l’a accusé de l’avoir ceinturé et maîtrisé pendant que les autres lui dérobaient son badge et prenaient la fuite. Sa collègue, Coralie Bouton, arrivée en renfort l’accusait elle de l’avoir fait tomber au sol et d’avoir essayé de lui prendre ses menottes et son badge.
Après une courte instruction d’un mois, il a été jugé par le tribunal d’Évry, sans bénéficier de l’assistance d’un avocat bien qu’il en ait demandé un. Lors de l’audience les faits ont été requalifiés (de « tentative de soustraction à une mesure d’éloignement et violence ayant entraîné moins de dix jours d’ITT » en « vol et violence en réunion sur agent dépositaire de l’autorité publique ayant entraîné une ITT de moins de 10 jours » et « soustraction à une mesure d’éloignement ») de façon à pouvoir appliquer la récidive (sur une précédente condamnation pour vol) et donc faire passer la peine encourue de trois à quatorze ans.
Ce jour-là, des vidéos des caméras de surveillance du centre ont été visionnées. Comme l’a fait remarquer la défense, le tribunal devait être en possession de « lunettes spéciales qui altéraient sa capacité de vision ». En effet, sur les images que nous vu lors de l’audience d’appel, on voit que rien ne s’est déroulé comme l’on déclaré Pièce et Bouton. Déjà, on ne voit rien (les retenus qui ont dérobé le badge avaient pris le soin d’éteindre la lumière), ou presque : des ombres qui ceinturent un policier (reconnaissable à son uniforme) puis deux policiers qui tabassent quelqu’un dans un couloir. Ibrahim, qui nie depuis le début avoir participé à l’évasion, s’est par contre toujours reconnu dans la personne tabassée. Un PV établi en garde-à-vue constate d’ailleurs qu’il porte de nombreuses traces de coup. Lors de cette garde-à-vue, Ibrahim a essayé de se mutiler avec une lame de rasoir qu’il avait sur lui, ce à quoi les flics ont répondu en le gazant et en l’entravant aux pieds et aux mains jusqu’à ce qu’il soit déféré.
Lors de l’audience d’appel à laquelle une trentaine de personnes étaient présentes en solidarité, l’avocate a plaidé le fait qu’il n’avait pas pu se défendre en première instance et qu’elle-même n’avait pas pu préparer la défense comme elle l’aurait souhaité (pas eu accès aux vidéos, pas pu bénéficier d’un interprète pour s’entretenir avec son client les jours avant l’audience…). Ibrahim n’a pas varié dans ses déclarations. Il a continué à réfuter les accusations des flics et son avocate a pu mettre en avant les nombreuses incohérences existant entre les déclarations policières et les images vidéo. D’ailleurs, lors de l’exposé des faits on remarque que les déclarations des flics ont changé au cours de leurs auditions.
Le procureur a demandé confirmation des chefs d’inculpation et de la peine. L’avocate a plaidé la relaxe. Le jugement sera rendu le 2 avril à 13h, sans qu’Ibrahim ne soit extrait.
Liberté pour toutes et tous, avec ou sans papiers !
Ni prison, ni rétention !
Évasion Palaiseau, ce 20 mars 2013