Mort d’un homme interpellé dans le Doubs : le parquet requiert le non-lieu
Selon un avocat de la défense, le parquet de Montbéliard a requis le non-lieu dans l’affaire de la mort de Mohamed Boukrourou, en 2009 lors de son interpellation par la police à Valentigney dans le Doubs.
« Le parquet a requis un non-lieu, mais c’est désormais au juge d’instruction de décider s’il renvoie finalement l’affaire devant le tribunal ou s’il confirme le non-lieu », a déclaré Me Randall Schwerdorffer, confirmant une information de France bleu Belfort. « L’avis du parquet est conforme à la logique de la défense selon laquelle un usage de la force strictement nécessaire a été utilisé par les policiers » confrontés à une « situation très délicate » lors de l’interpellation, a-t-il ajouté.
Pour l’avocat de la famille Boukrourou, Me Alain Dreyfus-Schmidt, qui s’est dit « pas étonné » par les réquisitions du parquet, la « bavure policière » ne fait au contraire « aucun doute ».
Le parquet avait ouvert une information judiciaire contre X pour homicide involontaire en 2009 afin d’établir si l’intervention policière avait « concouru au décès de Mohamed Boukrourou » le 12 novembre 2009 à Valentigney.
Il avait été conduit dans un fourgon par des policiers appelés par un pharmacien inquiet de « l’état d’énervement extrême » de son client, qui protestait contre la qualité des médicaments vendus. Trois policiers auraient maîtrisé M. Boukrourou en s’asseyant et en se tenant debout sur ses jambes, son bassin et son torse. Âgé de 41 ans, il avait succombé à un arrêt cardio-respiratoire.
La Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) a estimé dans un rapport de décembre 2011 que la police avait fait un « usage disproportionné de la force » lors de l’interpellation.
Leur presse (macommune.info, 9 novembre 2012)
Affaire Boukrourou : vers le non-lieu ?
Le parquet de Montbéliard requiert un non-lieu dans l’affaire Mohamed Boukrourou, ce père de famille décédé dans un fourgon de police à Valentigney, après une intervention policière controversée.
« J’ai 50 ans de barreau derrière moi. J’en ai vu pas mal mais un blanchiment comme celui-ci, jamais ». Me Pelletier, l’avocat parisien qui défend les intérêts de la famille Boukrourou n’a pas de mot assez fort pour dire son « indignation ». Indignation à la suite des réquisitions de non-lieu prises par le procureur de Montbéliard dans l’affaire Boukrourou. Du nom de cet homme de 41 ans qui a trouvé la mort le 12 novembre 2009 dans un fourgon de police à l’issue d’une interpellation mouvementée.
Tout a commencé dans une pharmacie à Valentigney où le père de famille a refusé les médicaments génériques que le praticien lui proposait. Échanges de mots, intervention des policiers et décès tragique une poignée de minutes plus tard dans le fourgon. Depuis, les quatre policiers chargés de l’interpellation ont été entendus par les fonctionnaires de l’IGPN, avant d’être entendus sous statut de témoins assistés par le magistrat saisi de l’instruction. « Les expertises médicales faisant état des violences subies par Mohamed, les témoignages des nombreuses personnes qui ont assisté à son interpellation, la position du Défenseur des droits… bref tout allait dans le sens d’une mise examen des policiers pour coups et blessures ayant entraîné la mort sans intention de la donner. Comprenez notre stupéfaction en apprenant que le procureur requiert aujourd’hui un non-lieu », se fâche Abdelkader Boukrourou, le frère de la victime. Pas plus tard que la semaine dernière, il était reçu au ministère de l’Intérieur pour exposer le dossier à Jacques Meric, un conseiller de Manuel Valls. Me Pelletier était également de l’entrevue. « À tout le moins, cette affaire embarrasse. L’autopsie fait état de tuméfactions à la tête, au thorax, à l’abdomen, aux yeux… Pardonnez l’expression, mais le malheureux Mohamed Boukrourou a morflé dans le fourgon des policiers. Peu de chose m’étonne encore mais qu’un procureur puisse tordre ainsi la réalité pour requérir un non-lieu, c’est franchement incroyable ».
Selon le parquet, il ne résulte pas de l’instruction judiciaire des charges suffisantes pour établir que les policiers ont commis une violation délibérée d’une obligation de prudence ou de sécurité. « Somme toute, le parquet estime qu’ils ont fait leur boulot. Je n’en resterai pas là », assure l’avocat.
La balle est désormais dans le camp de l’instruction. Soit le magistrat suit les réquisitions et rend un non-lieu, soit il estime que les charges sont suffisantes pour renvoyer les policiers devant un tribunal. « En cas de non-lieu, je ferai illico appel devant la chambre d’instruction », prévient l’avocat parisien.
Leur presse (Françoise Jeanparis, LePays.fr, 9 novembre 2012)