[Chronique de Youv derrière les barreaux] « À tous les immigrés morts dans des soutes à bagages, dans des embarcations sommaires exploités par des passeurs sans pitié complices de Babylone »

http://juralib.noblogs.org/files/2012/09/0513.jpg[25 février 2012]
Partie sans papiers

Un jour en allumant la télé j’ai vu des CRS expulser des sans-papiers réfugiés dans une église sans épargner femmes et enfants comme du bétail. Ce fait divers m’a marqué et m’a inspiré ce texte.

SANS-PAPIERS,

Parti de ton village, d’une contrée lointaine originaire d’Afrique adolescence passée à la madrasa tu as des échos qu’il existe une vie meilleure en Occident ton rêve le plus fou c’est d’y accéder par tous les moyens pour améliorer ton quotidien et celui de ta famille. Tu as un cousin éloigné qui lui a déjà fait ce voyage tu le contactes il te met en relation avec des passeurs qui te demandent une somme à quatre chiffres tu hypothèques tout le bétail des tiens pour acheter ta place sur cette pirogue vous êtes entassés à cinquante sur un radeau prévu pour cinq prie Dieu pour arriver sain et sauf, plusieurs jours à errer sur la Méditerranée les passeurs n’étant pas suicidaires sont restés lâchement sur la rive. Une vague imprévue vient briser votre embarquement en deux les trois quarts des victimes de leurs rêves meurent sans même arriver au large des côtes occidentales tu t’en sors par miracle tu es repêché par un bateau policier c’est les menottes aux poignets que tu sors de ton enfer.

On te mitraille de questions que tu ne comprends même pas, même leur traducteur ne parle pas la langue de ton village tu t’inventes une nationalité inexpulsable que tes bourreaux t’avaient soufflée à l’oreille avant d’embarquer pour la mort. Un mois au centre de rétention ne sachant pas quoi faire de toi ils te libéraient avec une sommation de quitter le pays sous huit jours par tes propres moyens à compter de cette date tu deviens « un clando » un sans-papiers, un fugitif, l’ennemi public numéro un pour un certain Premier ministre de cette République tu sors de ta poche un papier plié en dix plastifié avec un sac poubelle que tu gardes au fin fond de ton jean depuis ton départ du village il y est inscrit le nom d’un de tes cousins qui loge dans un foyer Sonacotra de la capitale française tu t’y rends aussitôt, les retrouvailles furent chaleureuses il t’explique le comportement à tenir à chaque sortie en public tu risques ta vie à la vue d’un képi ton cœur se brise tu enchaînes les boulots au noir de tout temps à toute heure sans te plaindre, tes patrons connaissent ta situation donc t’exploitent un maximum et te payent une bouchée de pain puis montré du doigt par ce système accusé à tort de VOLER LE TRAVAIL DES FRANÇAIS considéré comme un sous-homme voilà déjà dix ans que tu es dans l’Hexagone tu envoies chaque mois la moitié de ce que tu gagnes au pays tu fais vivre tout ton village tu es devenu la fierté des tiens. Tu finis par épouser une femme qui est dans la même situation que toi de votre union naît une magnifique fille, elle on peut rien lui reprocher elle est née sur le sol français donc scolarisée mais elle ne comprend pas pourquoi ses parents longent les murs pour venir la chercher à l’école pourtant ça fait déjà quinze ans que ses parents bossent à plein temps cotisent et payent les impôts à la seizième année en rentrant du boulot le père croise des militaires du plan Vigipirate catastrophe retour à la case départ centre de rétention. La FRANCE ne veut rien savoir malgré que t’as femme et enfants te ligote et te jette dans un charter direction ton village, au même moment un certain Premier ministre instaure une loi totalement raciste qui consiste à éradiquer tous les sans-papiers de ce pays la chasse à l’homme est lancée les immigrés sont traqués, dénoncés, délogés des foyers et des squats par instinct de survie ils se regroupent en masse dans une célèbre église ils se pensaient à l’abri que jamais la police oserait venir les chercher dans ce lieu saint mais à l’approche des élections Babylone sans scrupule donne l’assaut, les CRS chargent menottent femmes et enfants direction les nombreux centres de rétention pourtant ils étaient venus en paix mais on leur fait la guerre.

TRISTE ÉPILOGUE.

Donc moi descendant d’esclaves tout ça me touche en plein cœur je suis militant de rien du tout, mais je dis que la France a oublié son passé c’est ces mêmes immigrés qu’ils ont envoyés en première ligne en temps de guerre, les tirailleurs sénégalais et algériens ont marqué l’histoire de France. La France a soudain un trou de mémoire sans parler de nos parents qui ont reconstruit ce pays de leurs mains.

Je dédie ce texte à tous les immigrés morts dans des soutes à bagages, dans des embarcations sommaires exploités par des passeurs sans pitié complices de Babylone.

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