[Chronique de Youv derrière les barreaux] « Mes parents étaient contents de me voir prendre le chemin du lycée avec tous les intellos du quartier ils ne savaient pas que l’on était formés à l’usine »

http://juralib.noblogs.org/files/2012/09/0513.jpg[12 décembre 2011]
Partie 76 bis

1997 9 heures du mat lycée Jean-Rostand à Mantes-la-Jolie (BEP CHAUDRONNERIE MÉTALLERIE), j’avais atterri là pas par choix mais par accident de parcours LOL je n’avais rien contre les chaudronniers mais c’était loin d’être une de mes vocations, mais exclu du collège un an plus tôt je devais m’estimer heureux d’être scolarisé, mais comment t’investir dans un domaine que t’as pas choisi ? Moi j’étais content parce que j’étais au lycée quand on me demandait ma classe je disais que j’étais en électro­technique LOL mais c’était trop grillé puisqu’on était les seuls du lycée à mettre un bleu de travail c’était ficha (l’affiche) de marcher dans la cour du lycée en bleu de travail MDR mais je voyais que mes parents étaient contents de me voir prendre le chemin du lycée avec tous les intellos du quartier ils ne savaient pas que l’on était formés à l’usine on était vingt-cinq élèves vingt-quatre mecs et une fille c’est au bout de deux mois que j’avais su qu’il y avait une fille dans notre classe c’était indétectable un méchant garçon manqué androgyne « on rit mais on se moque pas » MDR.

J’étais là sur les bancs du lycée à faire de la figuration je faisais que dormir en cours walkman sur les oreilles j’écoutais l’album Guet-Apens de Expression Direkt en boucle.

Un jour alors que je rentrais en salle de classe j’ai fait tomber devant le prof principal un extincteur lacrymogène à poivre, le prof était tellement choqué qu’il m’a rien dit, un mois avant la fin du premier trimestre le proviseur en personne vient me chercher en classe et il me ramène dans son bureau où nous attendaient deux agents de la police, il me mettent les gourmettes et m’amènent en garde-à-vue, ils m’accusaient d’avoir braqué un cinéma du centre-ville « le Domino » la police était passée chez moi c’est mes parents qui leur avaient dit que j’étais en cours donc ils sont venus me cueillir comme une fleur LOL le problème dans cette histoire c’est que je n’avais rien à voir avec cette histoire j’ai jamais braqué de cinéma de ma vie, mais la dame du guichet du cinéma me reconnaissait formellement sur les photos que la police lui soumettait un truc de fou mais dans mon malheur j’ai eu de la chance puisque à la date du braquage j’étais à Bois-d’Arcy en prison donc ça ne pouvait pas être moi, jamais j’aurais pu imaginer que la prison me servirait un jour d’alibi MDR j’en rigole mais si à l’époque du braquage j’aurais été en liberté bah j’aurais mangé deux ans de taule gratuit j’avais quand même tapé quarante-huit heures de garde-à-vue à me casser le dos et à repondre à des heures d’interrogatoire musclé pour que j’avoue un truc dont je savais rien même quand c’est moi j’avoue pas alors imaginez quand j’y suis pour rien. La justice des fois avait du mal à reconnaître ses torts, je suis sorti de garde-à-vue pas une excuse de qui que ce soit limite je devais m’estimer heureux qu’ils m’ont lâché. Depuis ce jour j’ai raccroché plus de lycée j’étais ficha tout le monde savait que j’avais fait d’la prison etc. ça m’a soûlé donc j’ai tout fait pour qu’ils me tej et j’ai frappé la porte de l’école de la rue.

Plusieurs fois j’essaie de me remettre dans la peau de cet adolescent que j’étais autrefois pour essayer de trouver la faille et à quel moment j’ai endossé cette rage de vivre de vaincre et d’avancer même si le chemin était truffé d’embûches. Comment ne pas sombrer dans la délinquance quand tout t’accuse j’étais présumé coupable.

On était venu me chercher au lycée pour me mettre en GAV « VOILÀ OÙ ÉTAIT MA PLACE » le symbole était énorme des cours en GAV à force d’être montrés du doigt on aurait pu sombrer et nous-mêmes finir par croire qu’on était bons qu’à être délinquants beaucoup se sont laissés prendre au piège moi le premier mais nos épreuves nous endurcirent l’essentiel c’est d’ouvrir les yeux avant que ça explose.

Le 12 décembre 2011 à 20 h 45 je pose ce texte rempli de nostalgie d’émotion de tragédie de gâchis je ne regrette rien mais si c’était à refaire 100 % je ferais autrement.

« LA VIE VAUT LA PEINE D’ÊTRE VÉCUE J’EN SUIS CONVAINCU ».

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