Interpellations au Centre culturel libertaire : la plainte d’un sympathisant classée
Le 15 janvier 2011, le Centre culturel libertaire organise une soirée de soutien au journal La Brique. La police investit les lieux et procède à une série d’interpellations. Deux plaintes sont déposées contre les forces de l’ordre. Mardi, l’avocate d’un des plaignants a appris que la sienne venait d’être classée.
Quatre heures du matin, le 15 janvier 2011, rue de Colmar à Wazemmes. Une patrouille de police intervient pour un inconnu en pleine séance de tags. Sur place, tout se complique. Une altercation éclate avec d’autres personnes dans la rue. L’un des deux policiers se retrouve au sol et est traîné vers les portes du Centre culturel libertaire (CCL), où se déroule une soirée en soutien au journal La Brique. Des renforts sont appelés et c’est la confrontation. Ordre est donné d’investir le CCL, avec du gaz lacrymogène. Au final, cinquante-trois personnes sont interpellées.
Cinquante et une seront libérées sans poursuites le lendemain, et deux suspects renvoyés devant le tribunal pour violences envers les policiers, dont un est légèrement blessé.
Dans les jours qui suivent, des associations dénoncent l’intervention policière jugée « disproportionnée ». En février 2011, la Ligue des droits de l’homme (LDH) parle de « quatorze témoignages » faisant état de « faits inadmissibles très graves ». Et d’annoncer des dépôts de plainte devant le procureur de la République, ainsi que la saisie par la sénatrice Marie-Christine Blandin (Verts) de la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS – aujourd’hui intégrée au Défenseur des droits). Trois mois plus tard, les deux suspects sont jugés : l’un est relaxé, l’autre condamné à quatre mois ferme.
Un an et demi après les faits, début mai 2012, la LDH lance un nouvel appel « pour savoir ce qui s’est passé cette nuit-là ». « Rien ne bouge. On n’a aucune information sur les suites données aux plaintes des participants à la soirée du CCL. » Mais mardi, le parquet de Lille a confirmé que l’une des deux plaintes identifiées a été classée. Motif : le plaignant n’a pas répondu aux convocations.
L’homme vit en Italie et était en visite au CCL la nuit des faits : « Les policiers avaient brisé une vitre (du CCL) et lancé des gaz lacrymogènes à l’intérieur. Je suis sorti mains levées et j’ai pris un coup de matraque sur le visage et des coups de pied au sol. » Et d’évoquer, ensuite, des « insultes et humiliations » en garde à vue.
Mardi, l’annonce du classement a fait bondir son avocate, Me Dalila Dendouga : « Je suis stupéfaite ! J’en suis au moins à trois relances par courrier recommandé au procureur, je n’ai pas eu le moindre retour pour cette plainte, et j’apprends par un journaliste qu’elle est classée ! On avait les photos de la victime (blessée au visage) juste après la garde à vue, et des témoignages. Ça méritait vraiment une enquête ! » Et concernant son absence aux convocations ? « Il aurait suffi de passer par moi, je l’aurais appelé tout de suite. Je n’exigeais pas des poursuites, mais que le parquet nous informe de l’état du dossier et du classement, pour que je puisse retrouver ma liberté d’action. Là, c’est comme si il n’y avait jamais eu de plainte. » Concernant la deuxième plainte, on ignorait encore, hier, les suites données par le parquet.
Publié par des larbins de la maison Poulaga (Arnaud Dufresne, lavoixdunord.fr, 18 mai 2012)