EXCLUSIF – Affaire Bentounsi : « des tirs hors situation de légitime défense »
Le rapport d’enquête consulté par Le Point.fr contredit la version du policier qui a tué Amine Bentounsi.
Selon le rapport d’enquête que Le Point.fr a pu consulter, Amine Bentounsi, 29 ans, multirécidiviste en cavale, a été tué « hors situation de légitime défense » par un policier le 21 avril à Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis) et « d’un tir à distance sans autre lésion de violence, de prise ou de défense ». Les constatations médico-légales et l’audition d’un témoin oculaire, Jean-Pierre [Le prénom a été modifié] S., 53 ans, ont contredit la version du policier selon laquelle il était en état de légitime défense.
« J’ai vu un homme juste derrière lui (Bentounsi, NDLR), à une dizaine de mètres, qui courait le bras tendu. Il est arrivé de la même direction, sur le même trottoir… Le fuyard avait quelque chose dans la main. À ce moment-là, j’ai entendu une première détonation, suivie d’autres », a déclaré Jean-Pierre S. Si le fuyard, très défavorablement connu des services de police, était bien porteur d’une arme à feu dont il n’a pas fait usage, une chose est sûre : Bentounsi courait et tournait le dos au policier.
Manifestations
Le gardien de la paix Damien S. qui a tiré à quatre reprises sera retrouvé par ses collègues en pleurs devant le corps inerte. « Le tir est quasi horizontal d’arrière en avant, quasi perpendiculaire à l’axe du corps », selon le rapport du médecin légiste. En garde à vue, Damien S. a reconnu avoir tiré sans sommation. Me Daniel Merchat, son avocat, va faire appel de la mise en examen de son client. La conseil des parents d’Amine Bentounsi, Me Samia Maktouf, se félicite de l’indépendance du magistrat instructeur. « Il a su garder la tête froide, malgré la manipulation de l’opinion publique par les syndicats de police et les hommes politiques. »
La mise en examen pour homicide volontaire de Damien S., policier de 33 ans, continue de faire des vagues. Des manifestations des forces de l’ordre sont régulièrement organisées, sur les Champs-Élysées, rue de Rivoli ou encore devant la préfecture de Bobigny. La défiance des syndicats de police à l’égard de la justice a trouvé un écho certain dans la dernière ligne droite de l’élection présidentielle. Une affaire qui devrait être abordée durant le débat de l’entre-deux-tours opposant mercredi soir Nicolas Sarkozy et François Hollande.
Leur presse (Aziz Zemouri, LePoint.fr, 2 mai 2012)