BIXI – Vandalisés par de la poésie
Des citations de Cocteau, Boris Vian ou de Gainsbourg sur les vélos en libre-service de la Ville de Montréal : non BIXI ne se lance pas dans la promotion de la littérature.
Sur les plus de 4000 BIXI en circulation, « pratiquement tous » ont été victimes de vandalisme littéraire, a indiqué, à l’Agence QMI, Michel Philibert, directeur des communications et marketing de BIXI.
En moins de 24 heures, des autocollants reprenant des citations littéraires ont été collés à la place des encarts publicitaires présents sur les garde-boue arrière des vélos en libre-service.
Le vandalisme littéraire est apparu à la suite d’un faux communiqué diffusé lundi matin par des pirates informatiques sur le site bixipoesie.ca, reprenant sans autorisation le logo ainsi que la marque de commerce de la société BIXI, a expliqué M. Philibert.
Le faux communiqué annonçait le remplacement des publicités sur les garde-boue des BIXI « par plus de 500 extraits DIFFÉRENTS de poèmes, de chansons, de romans, d’essais ».
Une « belle opération »
« On reconnaît que ça a été bien fait et que des efforts considérables ont été mis en œuvre, a commenté Michel Philibert. Malheureusement, par respect pour nos commanditaires, on va devoir retirer les autocollants. »
Michel Philibert justifie le retrait des autocollants littéraires en expliquant que l’investissement des commanditaires permet de « maintenir un coût accessible aux utilisateurs ».
Face à une telle mobilisation, le directeur des communications et marketing a ajouté : « on a eu des propositions originales et on va regarder ça ».
La page Facebook de BIXI vélo, une page officielle, invite le public à soumettre « leurs citations préférées ». « Nous ferons un comité à l’interne et nous vous les soumettrons au vote. Nous trouverons un moyen original de les réutiliser », indiquait, lundi soir, un message sur la page Facebook de la société.
Il a, par ailleurs, été décidé qu’aucune plainte ne sera portée à la police.
Un faux communiqué
Dans le faux communiqué, mis en lien avec la page d’accueil de BIXI Montréal, il est écrit que la Société de vélo en libre service (SVLS) veut inscrire sa « saison 2012 dans la mouvance sociale actuelle ». Le faux document prête de faux propos au directeur adjoint des communications. « En l’absence d’une réelle volonté du gouvernement Charest de rendre le savoir accessible à tous, on s’est dit qu’on allait faire notre part. À défaut d’être véhiculé dans les cégeps et dans les universités, le savoir va donc circuler librement dans les rues, sur les BIXI ! »
Il est en outre indiqué dans le faux communiqué : « Il nous apparaissait un peu gênant de ne pas contribuer minimalement à la grève étudiante, d’autant plus que bon nombre de nos clients sont justement des étudiants et étudiantes surendetté-e-s ».
Le maire Tremblay s’est également trouvé engagé par de fausses déclarations : « C’est l’image de marque de Montréal, ternie par certains dérapages policiers récents, qui se trouve ainsi rehaussée par tant d’intelligence qui circule dans nos rues ! »
Qui lisait le communiqué jusqu’au bout se trouvait interpeller par ces propos en phase avec l’actualité étudiante.
Et pourtant, certains se sont fait avoir. C’est le cas de VOX MONTREAL qui interroge à ce propos ses abonnés sur sa page Facebook : « Quels auteurs aimeriez-vous lire sur les BIXI ? »
Et les abonnés Facebook de la chaîne de télévision citoyenne se prennent à rêver de vélos arborant les citations de Frédéric Beigbeder, Paulo Coelho, Alexandre Dumas, Khalil Gibran ou encore de Charles Baudelaire.
Les auteurs du canular n’ont pas encore été identifiés.
Leur presse (Katia Tobar, Agence QMI, 30 avril 2012)
Opération Mea culpa – La poésie remplace la publicité sur les BIXI
La Société de vélo en libre service (SVLS) est fière d’annoncer sa décision de retirer les publicités sur les BIXI et de les remplacer par plus de 500 extraits DIFFÉRENTS de poèmes, de chansons, de romans, d’essais, etc. C’est suite à une longue réflexion déclenchée par le tollé qu’avait suscité il y a deux ans l’ajout de pubs sur les ailes des vélos que la SVLS a pris cette décision importante.
Dans le contexte actuel où sévit une alarmante marchandisation de l’espace public (incluant nos universités), et considérant les faibles revenus générés par cette publicité (autour de 2 millions de dollars en 2011, alors que le budget 2012 prévoit des revenus de plus de 91 millions), il devenait difficile pour la SVLS de justifier la publicité sur les BIXI. « On s’est vite aperçus, par l’avalanche de commentaires ulcérés reçus des utilisateurs, qu’on avait fait une erreur. Il y a quand même des limites à prendre les citoyens pour des hommes-sandwichs ! », a admis un cadre de l’entreprise, sous le couvert de l’anonymat.
En nommant cette opération Mea culpa, la SVLS fait non seulement un volte-face courageux, mais veut aller encore plus loin en inscrivant sa saison 2012 dans la mouvance sociale actuelle. En effet, comme l’a déclaré en conférence de presse ce matin le directeur adjoint des communications : « En l’absence d’une réelle volonté du gouvernement Charest de rendre le savoir accessible à tous, on s’est dit qu’on allait faire notre part. À défaut d’être véhiculé dans les cégeps et dans les universités, le savoir va donc circuler librement dans les rues, sur les BIXI ! ». Cette déclaration a été saluée par les trois principales organisations étudiantes, la FECQ, la FEUQ et la CLASSE, cette dernière ayant souligné le caractère non-violent de la décision.
Décision qui a d’ailleurs été d’autant plus facile à prendre que la Société de vélo en libre-service annonce des profits de dix millions dans son budget 2012, et que ses activités à Montréal, déficitaires depuis leurs débuts, seront rentables pour la première fois cette année. « Dans ces circonstances, il nous apparaissait un peu gênant de ne pas contribuer minimalement à la grève étudiante, d’autant plus que bon nombre de nos clients sont justement des étudiants et des étudiantes surendetté-e-s. », déclare la SVSL.
D’ailleurs, la lutte contre l’augmentation des frais de scolarité étant en train de devenir un enjeu mondial, BIXI étudie présentement la possibilité d’étendre l’opération Mea culpa à d’autres grandes villes qui ont acheté des BIXI, notamment New York, où les premiers vélos seront livrés cet été.
Appelé à commenter la situation, le maire Gérald Tremblay a déclaré : « Je n’étais pas au courant… Mais, de toute évidence, Bixi a pris la bonne décision. C’est l’image de marque de Montréal, ternie par certains dérapages policiers récents, qui se trouve ainsi rehaussée par tant d’intelligence qui circule dans nos rues ! ». L’administration Tremblay en a profité pour critiquer le gouvernement Charest qui veut l’obliger à vendre la division internationale de BIXI, ce qui pourrait sonner le glas des vélos en libre service à Montréal. « Le premier ministre change les lois pour accommoder Quebecor et son amphithéâtre à Québec, mais il fait la sourde oreille quand il est question de l’intérêt collectif. On le voit avec l’éducation, et maintenant avec BIXI. Nous, on veut poursuivre l’aventure de ce service public, d’autant plus cohérent sans publicité ! », a ajouté le maire, visiblement excité.
Du côté des commanditaires, bien qu’on se dise évidemment déçus de ce revirement de situation, on accepte la décision avec philosophie, inspirés en cela par les nombreux aphorismes apposés sur les vélos. Assimilées à du « greenwashing » par la population, ces pubs étaient de toute façon si mal accueillies qu’elles devenaient illisibles au cours de l’été à cause des graffitis.
Dans l’ensemble, l’opération Mea culpa est donc très bien accueillie, en particulier par les employé-e-s, qui non seulement auront la chance de parfaire leur culture personnelle tout en transportant les vélos, mais participeront par le fait même à un mouvement social historique. « Je redécouvre chaque jour le plaisir d’apprendre et la beauté de la poésie, et ce gratuitement, dans la rue, grâce à BIXI ! », de conclure l’ex-responsable des contrats publicitaires de la SVLS.
Bixi Poésie, 30 avril 2012