7 février 2012 : À Claude Guéant
Aujourd’hui s’est tenue l’audience pour la fermeture de notre site au Tribunal de Paris.
Monsieur le sinistre Guéant, alors même que la justice doit se prononcer sur votre demande « inconcevable » de censure, nous tenions à vous faire part de nos sentiments.
Certains voudraient voir en nous des citoyens engagés dans la sauvegarde de la république, mais il n’en est rien. Si être citoyen, c’est accepter d’appartenir à votre « civilisation », à cette société civile qui depuis des siècles impose sa domination sur des millions d’êtres humains au nom d’une prétendue supériorité démocratique, alors cela ne nous intéresse pas. Vous pouvez ranger votre civilisation (et votre démocratie corrompue) au fond de votre poche et brûler votre pantalon.
Des hommes comme vous, le passé en a connu beaucoup. L’ordre social dont vous rêvez est notre cauchemar. Il a déjà été expérimenté par d’autres en des temps bien plus obscurs et cela n’a pas été un succès. Vos déclarations nauséabondes et votre xénophobie manifeste ne plaisent qu’aux sordides pantins réactionnaires qui vous ressemblent, ceux-là même qui en d’autres temps menaient leurs croisades vers des pays dont ils ignoraient tout. Vous représentez un obscurantisme qu’on pensait naïvement révolu.
Aujourd’hui, nous constatons que vous vous agitez et que vous vous pavanez, que vous courtisez les partisans de l’extrême-droite pour les jeter dans les bras de votre candidat. Il semblerait que Nicolas vous a demandé de faire le sale boulot à sa place, sans doute parce qu’il ne pourrait se permettre de dire le quart de ces inepties fétides que vous déversez quotidiennement dans les médias. On ne le lui pardonnerait pas, tandis qu’à vous… Vous agacez même les petits soldats de votre propre camp, alors vous n’êtes pas fait pour durer de toute façon !
À propos, nous vous avons croisé lors du nouvel an chinois. Vous veniez sans doute courtiser la seule communauté étrangère qui réclame plus de policiers dans les rues. Mais personne n’est dupe. Chacun sait combien vos politiques xénophobes, ou celles de vos prédécesseurs, sont responsables de milliers d’expulsions, y compris au sein de la communauté chinoise.
Nous ne nous épancherons pas. Nous souhaitions seulement vous dire que nous savons combien vos services nous collent déjà au cul. Et bien sûr nous avons peur, parce que nous savons combien cela peut coûter de défier les puissants. La DCRI est à votre service, comme la Stasi était au service du pouvoir soviétique. Et comme toutes les polices politiques, elle sait frapper fort quand le pouvoir le demande…
Pour autant, en demandant la suppression des miroirs de notre site, vous nous avez démontré combien vos services sont incompétents en informatique : c’est tout bonnement impossible. Quand vous en aurez supprimé 10, il y en aura 100 qui naîtront ailleurs. Et pourquoi pas, prenons-nous à rêver, à la place de l’URL du ministère de l’Intérieur ? Cela n’est pas, heureusement, de notre ressort, mais de celui des centaines d’internautes et hackers engagés en faveur de la liberté d’expression (ce qui ne veut pas dire qu’ils soutiennent notre action).
Verdict le 10 février. On se tient prêts. Mais en attendant, ce serait bien que chacun se renseigne : il n’y a AUCUNE mention de la vie privée des flics dans nos bases de données, ni AUCUNE adresse ou information d’ordre privé, car la vie privée des flics ne nous intéresse pas, ils font bien assez de conneries dans le cadre de leurs fonctions.
On nous accuse aussi de “diffamation à l’égard de l’institution” suite à notre dénonciation de la “torture psychologique” infligée aux migrants de Calais par la police. À ce sujet, les conclusions de deux années d’observation ininterrompue des activités policières menées par les activistes no border de Calais ont été déposées au Défenseur des Droits. Nous attendons toujours sa réponse pour nous dire si, oui ou non, il s’agit là d’affabulations.
Monsieur Guéant, si vous choisissiez de démissionner vous feriez certainement, si vous nous permettez de paraphraser votre avocat, “cesser un dommage qui cause un réel préjudice”.
À bon entendeur.
Copwatch, communiqué du 7 février 2012.
Copwatch : victoire en demi-teinte pour Guéant
Le ministre a obtenu le blocage d’un seul site sur 35 pour lesquels il demandait l’interdiction de certaines pages. Il annonce que « l’action judiciaire n’est pas finie. »
Si le ministre de l’Intérieur a salué une « victoire pour l’ensemble des forces de sécurité dont l’honneur et la réputation ont été honteusement salis par des individus utilisant l’anonymat et le mensonge », cette victoire n’est pas totale.
Le tribunal de grande instance de Paris a en effet ordonné vendredi 10 février le blocage du site Copwatch (copwatchnord-idf.eu.org) accusé de diffamer les policiers et de diffuser, pour certains, des informations personnelles (nom, prénom, fonction, téléphone…) susceptibles de les mettre en danger. Le site est toujours accessible lundi matin.
Le contenu d’un site jugé « illicite »
Le juge des référés a jugé son contenu « illicite », évoquant entre autres infractions « la diffusion de données à caractère personnel, ainsi qu’une atteinte caractérisée au droit à l’image des policiers. » Il a ordonné aux FAI (fournisseurs d’accès à Internet) le blocage total du site, et non celui des seules pages incriminées comme le demandait le ministre, le filtrage partiel étant techniquement difficile à mettre en place.
Mais Claude Guéant avait demandé le blocage des pages de 35 sites soupçonnés de relayer les contenus incriminés, et, s’il a obtenu la fermeture d’un des deux sites « principaux » (l’autre étant copwatchnord-idf.meta.gd), il a fait chou blanc pour les 34 « sites miroirs » qui, selon lui, reproduisaient les contenus.
« Rien ne permet de vérifier que les éditeurs et les hébergeurs de ces 34 autres sites seraient les mêmes que ceux du site https://copwatchnord-idf.eu.org qui n’a pu être identifié » explique à ce sujet le juge dans sa décision.
Pas de blocage des « sites futurs », et la note au ministre
Le ministre de l’Intérieur n’a pas non plus obtenu gain de cause concernant sa demande de blocage des « sites futurs », unanimement et vivement dénoncée par les FAI (fournisseurs d’accès à Internet). Lors de l’audience mardi 7 février, le ministère public s’y était déjà « fermement opposé », estimant la demande « hautement problématique » autant « qu’inconcevable ».
Dans sa décision, le juge a également précisé que le ministre devra régler la note. Il « devra rembourser aux FAI les coûts afférents aux dites mesures, y compris en terme de maintenance, de supervision et de gestion d’éventuelles difficultés sur présentation des factures correspondant aux dits coûts ».
Les syndicats de police Synergie Officiers et Alliance police s’étaient joints à l’action du ministre. Le secrétaire général d’Alliance police Jean-Claude Delage espère à présent que le ministère « arrivera à identifier les responsables de ce site ». Auquel cas il « portera plainte contre eux ».
L’Intérieur : « l’action judiciaire n’est pas terminée »
Contacté lundi 13 février par Le Nouvel Observateur, le ministère de l’Intérieur se félicite du nouveau blocage du site qu’il qualifie « d’excellente chose ». Il affirme toutefois que « l’action judiciaire n’est pas terminée », confiant que le ministère « étudie actuellement comment interdire également l’accès aux pages incriminées sur les sites miroirs ». Déterminé, il déclare aussi qu’il « continuera à mener toutes les actions judiciaires possibles pour faire cesser ce genre de dérive ».
À la demande, déjà, du ministre de l’Intérieur, le tribunal de Paris avait jugé le site « injurieux » le 14 octobre dernier et avait ordonné le blocage complet du site. Il avait entre-temps refait surface.
Leur presse (Céline Rastello, tempsreel.nouvelobs.com, 13 février 2012)
Copwatch Nord-IDF renaît de la censure
Bonjour à tous,
Nous avons bien reçu tous vos mails de soutien et d’encouragement. Nous les avons tous lu et y avons tous accordé de l’importance, c’est pourquoi nous prenons enfin le temps de vous répondre.
Comme vous savez, COPWATCH NORD-IDF a été censuré par la clique de Guéant. Jusqu’à maintenant, il n’était plus accessible depuis le réseau français, mais restait accessible de l’étranger et par le biais du protocole Tor (protection des connexions, relativement simple à installer : https://www.torproject.org/). Ainsi, nous avons pu être lu hors des frontières où d’autres collectifs du même type que le nôtre se sont solidarisés avec nous.
Nous n’avons évidemment pas dit notre dernier mot et notre plate-forme est loin d’être morte ! Elle renaît aujourd’hui à l’adresse suivante : https://copwatchnord-idf.eu.org/
• PROPOSITIONS DE CONTRIBUTION :
Nous avons été sensibles à vos demandes de contribution et de participation au site. Pour autant, il nous est actuellement très difficile d’y répondre, dans la mesure où nous devons nous garantir un maximum de sécurité : la moindre faille pourrait nous être fatale. Certaines personnes nous ont fait part de leurs problèmes personnels avec la police, ce que nous avons lu avec grand intérêt. Cependant, nous ne sommes pas des justiciers et ne pouvons pas donner de suites juridiques à des plaintes. Par contre, nous pouvons relayer les informations PROUVÉES concernant l’impunité avérée des flics, à condition d’avoir suffisamment d’éléments entre les mains. Par ailleurs, l’interface privée située à droite de notre site n’est pas ouverte à qui le veut, ce n’est pas un forum. De la même façon, nous ne donnons pas de codes d’activation pour la création d’une adresse mail riseup.
• CONSEILS ET SUGGESTIONS :
Nous allons tout faire pour prendre en compte les critiques et propositions faites, à commencer par la correction de l’orthographe et coquilles. Nous allons également veiller au ton utilisé dans nos articles, pour éviter au plus possible les comparaisons agressives et animalières.
• CRÉATION D’AUTRES SITES COPWATCH :
De la même façon, nous n’avons actuellement pas les épaules pour mettre en place des sites similaires dans d’autres régions (comme cela nous a été suggéré pour Lyon, le Grand-Est ou la Belgique). Pour autant, nous invitons toutes les personnes de bonnes volonté et armées en informatique à faire naître d’autres plate-formes ailleurs, que nous nous ferons une joie de mettre dans les liens de notre site.
• NOS SOURCES :
Les infos que nous publions ont été recueillies sur le terrain ou grâce à nos contacts. Nous sommes conscients qu’il ne s’agit pas forcément d’informations exclusives, notre but n’étant pas de faire du buzz, mais de pointer du doigt la vraie nature de la police, en la montrant telle qu’elle se comporte au quotidien et pas seulement lorsqu’elle « dérape ». Nous recevons aussi des infos et images de personnes sympathisantes, mais nous ne publions que des informations que nous avons vérifiées, pour éviter au maximum la diffamation.
• CONSEILS SÉCURITÉ :
Si vous nous faites parvenir des images, effacez leurs métadonnées (informations sur l’appareil qui a pris l’image, date et coordonnées GPS de prise, nom de l’ordinateur, etc.) avec EXIFTOOL ou QUICKFIX. Si vous voulez envoyer du lourd, uploader sur un site comme MEDIAFIRE.COM ou TOOFILES.COM et envoyer nous le lien de téléchargement. Pour toute communication sécurisée, installez et activez TOR (https://www.torproject.org/) avant d’envoyer vos mails.
Nous conseillons également d’utiliser le live CD Tails (https://tails.boum.org), qui est selon nous un des meilleurs outils en terme de sécurité informatique. La base de ce projet est de ne pas laisser de traces sur l’ordinateur utilisé (sauf si la personne qui l’utilise le choisit volontairement). Il met à disposition une panoplie de programmes utiles pour l’anonymat sur internet et pour les différentes utilisations de base d’un ordinateur.
Bien évidemment, quant à votre moyen de connection, nous rappelons qu’utiliser un cable réseau (éthernet) est plus sécurisé que le wifi (facilement interceptable). Par ailleurs, si Tor anonymise les connections (l’adresse IP), il ne permet pas de se priver de l’utilisation du SSL, qui se traduit souvent par une url du type : https://lesite.com, et non http://lesite.com. Une connection SSL, dite sécurisée, à un site, permet le cryptage des données que vous envoyez (à commencer par vos mots de passe).
• QUESTIONS ET CONSEILS RELATIFS AUX RAPPORTS AVEC LA POLICE :
Nous sommes ravis de pouvoir répondre à certaines questions dans la mesure de nos connaissances et de notre expérience. Nous avons notamment reçu des demandes concernant le droit à l’image, le contrôle d’identité et la fouille corporelle :
Au regard de l’avis répondant à la saisine 2005-29 de la Commission Nationale de Déontologie de la Sécurité (abolie par Sarkozy, mais ses avis restent valables), il est tout à fait permis de filmer un agent de la force publique dans le cadre de ses fonctions. Ce dernier n’a pas le droit de contrôler vos images ni de les supprimer. Il peut vous demander de le faire, mais pas vous y contraindre.
Un policier est actuellement en droit, même si c’est très règlementé, de contrôler qui il veut quand il veut. Il est très difficile de s’opposer à un simple contrôle d’identité. Cependant, le flic ne peut vous demander que des informations concernant votre état civil et adresse. Toute question concernant votre profession, vos proches, vos idées, votre orientation sexuelle, la raison de votre présence sur le lieu du contrôle, ne le regardent pas.
La « palpation de sécurité » doit être effectuée par une personne du même sexe. Le flic ne peut en aucun cas vous demander d’enlever vos vêtement. Au regard strict de la loi, sauf mandat rogatoire spécifique, le flic peut vous demander de regarder dans votre sac, mais ne peut vous y contraindre. La fouille à nu, même dans le cadre d’une garde à vue, est totalement illégale.
• NOTRE POSITIONNEMENT VIS-À-VIS DE LA POLICE :
Nous n’agissons pas dans le but de « moraliser » la police. Nous partons du principe que la police est une institution violente et attentatoire aux libertés par nature. Nous ne nous considérons pas comme citoyens, dans la mesure où la « cité » contemporaine nous apparaît comme contraire dans la plupart de ses fondements à nos aspirations libertaires. Nous sommes conscients qu’il y a dans la police des « personnes de bonne foi », mais nous considérons que leur présence dans la police constitue une erreur de jugement et une collaboration implicite avec les violences commises par l’institution et l’État qu’elle protège. Dans le monde actuel, avec les humains tels qu’ils sont, un bon flic est un flic qui démissionne.
En espérant avoir répondu à la plupart de vos interrogations, nous vous souhaitons une bonne année 2012, pleine de bouleversements politiques et de changements en faveur de la liberté. Nous souhaitons la fin de l’occupation policière, de l’hypocrisie politicienne et vous invitons au rejet des élections !
Cordialement,
COPWATCH NORD-IDF, 23 janvier 2012.